"Dardanus" : le baroque flamboyant de Rameau porté par le jeune Raphaël Pichon
Entre tragédie lyrique et opéra-ballet, sur le thème classique de l'amour d'Iphise pour Dardanus contrarié par son père, Jean-Philippe Rameau (1702-1766) a composé une musique flamboyante, chatoyante, mise en valeur par Raphaël Pichon et son jeune Ensemble Pygmalion, créé en 2006, tout à leur passion pour la musique baroque dont ils sont devenus des interprètes incontournables.
"Dardanus", un opéra peu joué
Ainsi, Raphaël Pichon, âgé de 31 ans, lui-même ancien chanteur du répertoire baroque (contre-ténor), mène orchestre et choeurs avec lyrisme, attentif à chaque nuance tout en assumant une grande expressivité.
Curieusement, "Dardanus", créé en 1739 par l'Académie royale de musique au Théâtre du Palais-Royal à Paris, a été peu joué (une seule représentation à l'Opéra de Paris en... 1979). A l'Opéra national de Bordeaux, Raphaël Pichon et Michel Fau ont choisi la version initiale de 1739, à laquelle ont été mêlés quelques éléments de celle de 1744, notamment l'air "Lieux funestes" qui permet de faire briller un haute-contre, le belge Reinoud van Mechelen dans le rôle-titre de Dardanus.
Un "livre d'images bariolées", proposé par le metteur en scène Michel Fau
"J'adore le mélange des genres et ainsi utiliser les clichés du passé, quitte à les déformer, les réinventer, pour illustrer le passage vers les codes de la modernité", a confié le chef d'orchestre. "Et cette musique de Rameau s'y prête merveilleusement, puissante tant dans les pages radieuses que dans les pages noires, avec des facettes grotesques, naïves, violentes, chaotiques, comme dans la vie". "Plutôt que de rechercher à démontrer l'unité d'une oeuvre, j'aime en souligner les contrastes".
Son complice, le metteur en scène et comédien Michel Fau, âgé de 51 ans, actif au théâtre, à l'opéra, au cinéma et à la télévision, a conçu sa mise en scène comme "une sorte de revue à tableaux, avec un credo au 1er degré et kitsch assumé, un livre d'images bariolées", comme en témoignent les couleurs vives des décors et costumes réalisés par les ateliers de l'Opéra de Bordeaux. "Rameau reste fascinant par sa réutilisation du passé, ses capacités d'imagination et d'improvisation qui annoncent les compositeurs à venir".
Coproduction
Un opéra aussi exigeant a pu voir le jour à Bordeaux seulement grâce à une co-production avec le Château de Versailles Spectacles, le Centre de musique baroque de Versailles et l'Ensemble Pygmalion, tandis qu'un mécénat était assuré par la Fondation Orange pour Pygmalion, a souligné le Directeur de l'Opéra de Bordeaux, Thierry Fouquet. "De plus, le fait d'amener l'Ensemble Pygmalion en résidence à l'Opéra national de Bordeaux a créé des conditions pratiques idéales pour les répétitions et l'implication de Pygmalion au jour le jour", a précisé Thierry Fouquet.
Un opéra servi aussi par des voix : outre Reinoud van Mechelen, la mezzo-soprano française Gaëlle Arquez (Iphise), une des révélations du chant lyrique des cinq dernières années, au jeu dramatique si expressif, la soprano canadienne Karin Gauvin (Vénus), le baryton français Florian Sempey (Anténor) et la basse argentine Nahuel di Pierro (Teucer et Isménor).
"Dardanus" de Jean-Philippe Rameau à l'Opéra national de Bordeaux
Du 18 au 26 avril
Mise en scène de Michel Fau
Direction musicale de Raphaël Pichon - Ensemble Pygmalion
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