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Les artistes maliens se mobilisent pour leurs "frères du nord"

Une quarantaine d'artistes maliens a collaboré à une chanson de soutien aux populations du nord du Mali, aux mains depuis plusieurs mois de groupes jihadistes armés coupables d'exactions. Initié et composé par la chanteuse et comédienne Fatoumata Diawara, ce morceau a été dévoilé jeudi soir (regardez le clip ci-dessous). Au préalable, la chanteuse avait expliqué sa démarche sur France Inter.
Article rédigé par Laure Narlian
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
La chanteuse, musicienne et comédienne malienne Fatoumata Diawara, à l'initiative de la chanson pour le Mali.
 (Paul Bergen / ANP / AFP)

Face à l'urgence de la situation, "il y a eu une envie de tous les artistes du Mali de faire une chanson, parce que c'est notre arme, c'est avec elle qu'on voyage aux quatre coins du monde pour défendre ce pays dans sa dignité par rapport à sa culture, par rapport à son histoire", a expliqué Fatoumata Diawara jeudi matin sur France Inter, dans le 7/9 de Patrick Cohen en direct de Bamako.

"La guerre n'a jamais été une solution", plaide la chanson
La chanson, baptisée "Mali-ko" (la Paix), a été composée par Fatoumata Diawara sur sa guitare. Elle a ensuite enregistré la musique et les choeurs et écrit une partie des paroles qui évoquent la situation actuelle et les aspirations à la paix. Puis les artistes, venus de toutes les régions du Mali, sont venus ajouter leurs couplets et leurs refrains et Toumani Diabaté sa merveilleuse kora. Amadou & Mariam, Vieux Farka Touré, Tiken Jah Fakoly,  Habib Koite et Oumou Sangaré sont également au nombre des 37 artistes réunis sur ce morceau.

"Je n'ai jamais vu de situation aussi désolante, catastrophique", disent notamment les paroles de la chanson. "Ils veulent nous imposer la Charia. Allez leur dire que le Mali est indivisible mais aussi inchangeable !". "Hier, le Mali est devenu comme un mégot de cigarette qu'on jette politiquement, on a tous pleuré, on s'est tous inquiétés", dit un autre intervenant. "Soyons unis, peuple malien, l'union fait la force. Arrêtons tous nos divergences, la guerre n'a jamais été une solution", conclut un autre.

"Le nord ce sont nos frères"
"Quand j'ai écrit la chanson, j'ai eu peur de brutaliser mes frères artistes", a raconté Fatoumata Diawara jeudi matin au micro de France Inter. "Mais je me suis rendu compte que chacun avait quelque chose à dire. Donc j'ai écrit le texte jusqu'à 2-3 minutes et à la fin j'ai libéré la parole et on s'est rendu compte que beaucoup de rappeurs s'étaient exprimés sur la situation des jeunes filles violées et battues dans le nord, des hommes aux mains coupées". 

"Le nord ce sont nos frères", et "ce n'est pas parce qu'on est à Bamako (situé au Sud du pays, alors que la guerre se déroule au Nord) qu'on doit se dire que tout va bien".

Réécoutez l'interview de Fatoumata Diawara Jeudi 17 janvier sur France Inter, avancez à 10:00 : Les musiciens sont la cible des groupes armés
"Tous les artistes se tiennent la main pour chanter pour notre pays et dire au monde entier que si les artistes n'ont pas d'armes, nous croyons en notre musique, en notre kora", a encore souligné Mme Diawara. "Nous souhaitons que cela puisse soulager le coeur des Maliens parce que j'avoue on est très tristes, une telle situation, nous ne l'avions jamais imaginée."

Au nord du pays, "les jeunes filles n'ont plus le droit de faire quoi que ce soit, il n'y a plus de vie. (...) On a des frères musiciens qui n'ont plus de maison, plus de studio et leurs instruments ont été détruits. Donc si la France n'intervenait pas, dans peu de temps, la musique n'existerait plus au Mali", s'inquiète la chanteuse. Cette chanson, "c'est notre participation pour sauver ce bien, cet héritage, parce que le Mali sans la musique n'est plus le Mali."
Tiken Jah Fakoly a déjà sorti une chanson pour le Mali
Le chanteur ivoirien Tiken Jah Fakoly, qui a vécu à Bamako, les avait précédés. Aux premières heures de 2013, il a publié une chanson intitulée "An ka Wili" ("Mobilisation et galvanisation" en langue bambara) dans laquelle il dénonce les actions des groupes djihadistes qui ont pris possession du nord du Mali par les armes depuis neuf mois.

Il y célèbre aussi les héros nationaux maliens comme Sonni Ali Ber, Babemba, Samory Touré ou Soudiata Keïta, et en appelle à la mobilisation générale des Maliens pour sauver leur patrie.

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