L'Angolais Bonga, le roi du semba, enflamme le Cabaret sauvage
C’est la soirée de tous les remerciements. Le public, enthousiaste, s’est déplacé au Cabaret sauvage en nombre pour remercier l’artiste d’être toujours là, après plus de cinquante ans de carrière. Bonga, le roi de la semba, ne cache pas son plaisir de retrouver son public parisien, qui a bravé les pluies diluviennes ce vendredi 28 juillet. Celui qui va fêter ses 81 ans le 5 septembre est au meilleur de sa forme, comme si l’âge n’avait aucune prise sur lui. "Arrêtez de dire que je ne vieillis pas, que je rajeunis, que je suis toujours jeune. Bon, j’ai perdu du ventre, ça oui. Beaucoup même. Avant, j’avais un ventre si gros qu’il était difficile de danser avec une dame. J’ai arrêté le vin, je ne bois plus que de l’eau", confie, mi-sérieux mi-taquin, Bonga à son public. Le ton est donné : le spectacle sera dansant mais aussi intime. Entre chaque chanson, l’artiste revient sur sa vie personnelle et sème des blagues loufoques.
Engagement
La vie personnelle de Bonga est étroitement liée à son pays, l’Angola. De son vrai nom José Adelino Barceló de Carvalho, Bonga, également appelé Bonga Kuenda (Celui qui se lève et qui marche) était un athlète de haut niveau avant d’embrasser une carrière artistique. Né en 1942 en Angola, qui était alors sous colonisation portugaise, il bat le record du Portugal du 400 mètres en 1968 et s’aligne l’année suivante sur sa discipline préférée et sur 200 mètres aux Championnats d’Europe d’athlétisme à Athènes. Indépendantiste convaincu, il passe clandestinement des messages pour la résistance angolaise. Son nom de guerre : Bonga Kuenda. Par peur d’être arrêté après avoir été repéré, il quitte précipitamment le Portugal. Fortement encouragé à chanter en raison de son timbre de voix unique, il enregistre Angola 72. Succès immédiat dans son pays d’origine et… au Portugal. Il abandonne définitivement l’athlétisme pour la chanson. "Mon premier concert en France, c’était à la Salle Pleyel à Paris. J’assurais la première d’un grand artiste, Charles Aznavour", se souvient, ému, Bonga. Et de fredonner le début d’une chanson. "Je ne sais pas si vous allez reconnaître la chanson…"
Les bonnes chaussures
Dès la première note, Jean se lève et se met à danser. Il a reconnu la chanson, sa femme aussi, comme la grande majorité du public : c'est Mariquinha. "Je n’ai pas les bonnes chaussures !", répète Jean, devant les compliments de ses voisins, admirant ses pas de danse. "Comme il pleuvait beaucoup, j’ai pris ces chaussures non adaptées à la danse", se croit-il obligé de préciser. "Je suis fan de Bonga depuis plus de quarante ans ! Il est unique ", s’enthousiasme Jean, venu d’Amiens spécialement pour ce concert. "Y a-t-il des Angolais dans la salle ? Des Portugais ? Des Brésiliens ? Des Réunionnais, des Martiniquais ? Des Cap-Verdiens ? Connaissez-vous la semba ?", demande, sur scène, Bonga avec un sourire malicieux. Le semba est cette musique venue de Luanda et qui a essaimé dans le monde lusophone, avant d’être popularisée dans le monde entier par Bonga lui-même.
Deux heures durant, le jeune homme de presque 81 ans, excellent joueur de dikanza et de congas, a régalé son public de sa bonne humeur, de son talent et de sa voix si originale, aussi bien dans les aigus que dans les graves. Un timbre sensible et éraillé. Bonga, une légende vivante.
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