Cet article date de plus de huit ans.

Patrice Caratini, une soirée de gala pour fêter 50 ans de carrière

Contrebassiste, compositeur et arrangeur renommé de la scène jazz, Patrice Caratini avait envie de réunir les amis dont il a croisé la route au cours de sa carrière. Des amis du jazz comme Martial Solal, mais aussi de la chanson comme Maxime Le Forestier. Lundi soir à Paris, au Théâtre du Châtelet, ils seront là, avec quelques dizaines d'autres, pour un concert de prestige. Rencontre.
Article rédigé par Annie Yanbekian
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 22min
Patrice Caratini
 (Nathalie Mazéas)

Patrice Caratini est né le 11 juillet 1946 à Neuilly-sur-Seine, dans une famille baignée de culture et de musique. Fils d'un universitaire encyclopédiste, petit-fils d'une pianiste amateure à l'esprit pédagogue, il pratique vite différents instruments. Après Mai 68, il renonce à un métier de libraire et opte définitivement pour la musique.

S'il débute en tant que sideman, son talent et son penchant pour l'écriture musicale et l'orchestration lui permettront bientôt de se diversifier. En dehors d'incursions dans la variété qui l'amènent à participer, notamment, aux débuts retentissants de Maxime Le Forestier, Patrice Caratini jouera avec Stéphane Grappelli, Martial Solal ou Marcel Azzola. Il formera un duo basse-guitare avec Marc Fosset, fera du tango moderne avec des musiciens argentins. Acteur du renouveau du jazz français, il créera de grands orchestres, du Onztet au Caratini Jazz Ensemble, qui porteront des projets variés et ambitieux, et il fera chanter Sara Lazarus et Hildegarde Wanzlawe.

Artiste engagé dans la vie artistique de son pays, il milite en faveur d'une politique de soutien à la création, et plus particulièrement pour les grands ensembles de jazz. Il a cofondé l'association Grands Formats en 2003. À l'occasion du concert d'anniversaire organisé ce lundi au Châtelet, il livre des souvenirs qui feraient rêver plus d'un jeune diplômé d'une des écoles de jazz qui ont vu le jour depuis 40 ans.


- Culturebox : Vous datez vos débuts de jazzman à un soir d'hiver 1965 où vous aviez remplacé le contrebassiste d'un groupe à une soirée...
- Patrice Caratini : Avec François Lacharme, qui programme le jazz au Châtelet, on parlait régulièrement d'organiser un concert. Je me suis rappelé que j'avais loué une contrebasse pour la première fois en 1965 pour faire un gig (concert, ndlr). Le thème des 50 ans de carrière constituait une bonne occasion de développer quelque chose et d'inviter du monde. En 1996, j'avais donné un concert au Trianon avec beaucoup d'invités et zéro moyen pour fêter mon 50e anniversaire. Après, peut-on parler de "carrière" ? Je ne le sais pas. C'est juste la première fois que je suis allé louer une basse pour jouer et être payé en retour. À l'époque, je n'envisageais pas d'être musicien. C'est seulement au milieu de l'année 1968, alors que je travaillais aux Presses universitaires de France, place de la Sorbonne, que j'ai décidé de faire de la musique mon métier. C'était surtout une question de mode de vie, je voulais gagner ma vie en faisant quelque chose d'amusant, sans être dépendant de quiconque, sans patron ni horaires fixes. Depuis cette époque, je suis resté dans le même état d'esprit.

- À l'époque, vous pratiquiez divers instruments, parmi lesquels le piano, dont jouaient votre père et surtout votre grand-mère. Pourquoi la contrebasse ?
- C'est le hasard des circonstances. Quand j'étais ado, je jouais de l'harmonica, de la guitare, il y avait un piano à la maison donc j'en jouais, j'avais loué un saxophone... Je jouais avec des copains, je prenais tantôt un instrument, tantôt l'autre. J'aimais bien la contrebasse, il y en avait une chez un copain et je la prenais de temps en temps. Il se trouve que j'ai fait ce fameux gig qui en a entraîné d'autres. J'ai réalisé que cet instrument me permettait de travailler. Alors j'ai continué. Il faut dire que j'adorais Charles Mingus, Ray Brown. J'écoutais aussi Pierre Michelot, j'avais l'album d'"Ascenseur pour l'échafaud" de Miles Davis (Michelot joue sur le disque, ndlr). C'était les années 60. Ce n'était pas très compliqué de jouer le rôle minimal de la contrebasse en orchestre de jazz. On apprend ça assez vite. En tout cas, c'était le cas à l'époque, il n'en est sans doute plus de même aujourd'hui.

À la fin des années 70, j'ai enseigné à l'école de jazz du CIM, lancée par Alain Guerrini avec des musiciens de l'époque car il n'y avait pas d'enseignement de cette musique en France. Pierre Michelot m'avait proposé de reprendre la classe de contrebasse dont il ne pouvait plus s'occuper. J'avais mis une espèce de méthode au point. En résumé, quelqu'un qui avait un bout de technique pouvait jouer dans un orchestre en trois mois. Dans un certain style de jazz, mainstream, ce n'est pas très difficile. Si on veut aller plus loin, ça se complique. En fait, sans m'en apercevoir, dans ma petite enfance, j'ai reçu une formation musicale qui venait de la famille et surtout de ma grand-mère qui était la figure dominante.


- Avez-vous quand même fait des études musicales ?
- Pas beaucoup. Tardivement. Ma grand-mère nous apprenait (à Patrice Caratini et sa fratrie, ndlr) à reconnaître les notes, à chanter, elle nous faisait faire du solfège, du piano, elle nous a donné les bases de la musique. Plus tard, je me suis intéressé au jazz, j'ai écouté plein de disques, j'ai écouté la radio, j'ai essayé de reproduire ce que j'entendais. Comme beaucoup de gens, j'ai appris par imitation. Quand j'ai voulu en faire mon métier, je suis allé voir des profs, j'ai consulté des livres, j'ai étudié tout ça de façon plus sérieuse. Et j'ai appris avec les gens avec qui je travaillais. Il faut toujours jouer avec des gens qui sont un peu plus forts que vous, car ça vous emmène plus loin. Pas trop, car sinon, vous n'êtes plus au niveau et ce n'est pas bon. J'ai beaucoup fonctionné comme ça, même plus tard. Comme je suis un peu fainéant, ça m'obligeait à travailler !

- Quelles sont les rencontres musicales les plus marquantes de votre vie ?
- Les rencontres déterminantes, c'est les gens avec qui vous faites un bout de chemin. À mes débuts, entre la fin des années 60 et le début des années 70, j'ai longtemps travaillé dans le trio de Michel Roques, un saxophoniste et flûtiste aveugle, et dans lequel jouait le batteur italien Franco Manzecchi. C'était une musique difficile à jouer, ça demandait plus de connaissances que lors de mes premiers pas, il n'y avait pas de piano, il fallait maîtriser le discours musical. J'ai beaucoup appris. À la même époque, j'ai joué avec le tromboniste américain Slide Hampton au sein d'un quartet magnifique qui incluait André Ceccarelli. Hampton, très bon arrangeur, avait aussi un orchestre d'une dizaine de musiciens avec qui j'ai tourné en Italie. J'ai beaucoup appris au sein de cet orchestre en observant comment il fonctionnait.

Ensuite, il y a des gens avec qui j'ai monté des groupes. À la fin des années 70 et au début des années 80, j'ai joué en duo avec le guitariste Marc Fosset. Il y a eu l'accordéoniste Marcel Azzola (il a rejoint le duo Caratini-Fosset, ndlr) qui est resté un ami très proche. Au début des années 80, j'ai formé un trio avec des musiciens argentins, le bandonéoniste Juan José Mosalini et le pianiste Gustavo Beytelmann. On a travaillé une dizaine d'années ensemble. On jouait un tango très moderne dont il reste plusieurs albums.


- Vous avez aussi travaillé avec Stéphane Grappelli, Martial Solal et le chanteur Maxime Le Forestier...
Avec Stéphane Grappelli, j'ai vécu une expérience formidable. Je suis parti aux États-Unis pendant trois mois, on a fait le tour du monde, j'ai eu pas mal de chance... Bien sûr, il y a eu Maxime Le Forestier. C'était le hasard, on est de la même génération et on s'est retrouvé à jouer ensemble. Il venait de faire son premier disque (qui a connu un énorme succès en 1972, ndlr), je suis parti sur les routes avec lui. Par la suite, il m'a confié des orchestrations. Récemment, on a retravaillé ensemble. Il sera au Châtelet, bien sûr. Martial Solal, c'est quelqu'un que j'admirais et que j'ai rencontré dans les années 70. Vous vivez des moments magnifiques quand vous rencontrez des gens que vous avez entendus sur des albums qui vous ont marqué, et avec qui, tout d'un coup, vous commencez à jouer !


Mais le premier musicien qui m'ait beaucoup marqué, c'est le pianiste américain Mal Waldron. Il est venu en France à la fin des années 60. Alors que je jouais de temps en temps au Gill's Club, dans le Marais, j'ai eu l'opportunité de l'y accompagner. C'était un homme charmant, formidable, qui avait été l'accompagnateur de Billie Holiday, et qui avait joué avec Coltrane, Mingus et dont j'avais des albums à la maison. Dans ce club, la cave était vraiment moche, le piano pourri mais il se passait des choses ! À côté de Mal Waldron, j'étais un jeunot de 23 ans mais j'ai enregistré deux albums avec lui. Ces moments vous marquent quand vous démarrez et avez plein de choses à apprendre, et que vous rencontrez, puis travaillez avec des gens qui ont un parcours lié à l'histoire du jazz. Des gens dont je me suis nourri - au-delà de l'admiration à leur égard – et qui ont été des inventeurs au cœur du chaudron... Quand on joue avec des morceaux d'histoire, c'est toujours particulier.

- Il y a enfin toute votre expérience à la tête d'orchestres de jazz...
- Oui, il y a les gens avec qui j'ai fait un bout de chemin en grande formation, et qui ont accepté de travailler avec moi quand j'ai monté des ensembles : les musiciens du premier orchestre, le Onztet, puis ceux du dernier en date, avec qui je travaille toujours (le Caratini Jazz Ensemble, ndlr) et qui a une vingtaine d'années. On répète près de chez moi, tout le monde mange à la maison, les musiciens qui viennent de province dorment sur place. Ce sont des choses qui jalonnent mon existence musicale et personnelle. Ça amène beaucoup à la musique. Le travail sur la durée apporte énormément.

- Qu'est-ce qui vous a amené à former des grands ensembles de jazz et à écrire et arranger pour orchestre ?
- D'abord, j'ai toujours écrit de la musique. À 18 ans, j'écrivais déjà des choses, j'en relevais aussi, je prenais des partitions du lycée que j'essayais de comprendre et de transposer. J'avais toujours eu un piano à la maison. La musique est rentrée dans la famille par le piano et le chant. Chez moi, il n'y a pas eu de radio, de télé, ni d'électrophone avant mes dix ans. Il y avait une familiarité avec la musique. Il y avait plein de partitions, tout Bach, Mozart, et mon père achetait aussi du Brassens. J'avais une curiosité vis-à-vis de tout ça. Plus tard, ayant été ainsi imprégné et ayant l'oreille, quand je jouais avec des orchestres amateurs, les choses relatives à l'harmonie m'étaient familières. C'est toujours resté. Quand je travaillais avec Maxime Le Forestier, il a eu besoin d'un arrangement pour un disque. Je lui ai proposé un quatuor à cordes alors que je n'avais jamais écrit pour ce type de structure, il m'a dit : "Vas-y." En gros, j'écrivais de la musique pour les gens ou les ensembles avec qui je travaillais. J'aimais ça.


- Créer vos propres orchestres a dû s'imposer comme une évidence.
- J'ai joué dans pas mal de big bands, chez Claude Bolling, Claude Cagnasso avec qui j'ai fait des séances d'enregistrement pour la variété. On rentrait dans un studio où il y avait quarante musiciens. À la fin des années 70, je travaillais beaucoup dans les studios d'enregistrement. C'est l'époque où les gens disaient que le duo avec Marc Fosset marquait un "renouveau du jazz français". Du coup, on avait beaucoup de boulot, en duo surtout. Dans les studios, des musiciens me disaient : "Puisque tu écris, il faudrait qu'on fasse un orchestre !" J'ai fini par me lancer. J'ai monté le Onztet qui mélangeait des musiciens de studio de l'époque, trompettes, trombones, de très bons lecteurs (de partitions, ndlr) et des jazzmen comme Marc Fosset ou Éric Le Lann qui arrivait dans le métier. Notre premier album, "Endeka", sorti en 1982, a eu un énorme écho, j'en étais le premier surpris. Cet orchestre a fini par s'arrêter à cause de problèmes d'argent, puis de bisbilles sans gravité.

En 1985, j'ai monté un autre ensemble. Je savais le faire, j'avais toujours aimé ça. À l'époque, la mairie de Paris donnait une subvention annuelle à un orchestre. Vers 1983, 84, je reçois un appel de la mairie : "On a une subvention pour vous." Je n'avais rien demandé ! Ça venait d'André Francis qui patronnait le jazz à la radio et qui œuvrait aussi à la mairie. Mon orchestre précédent venait de s'arrêter, alors j'en ai monté un nouveau ! Il a joué pendant six, sept ans. C'était un peu différent, il intégrait mes amis argentins, l'instrumentation était moins classique, plus mélangée. Faute de concerts, il s'est arrêté au début des années 90. J'ai alors fait d'autres choses puis, fin 1996, j'ai décidé de lancer un nouvel orchestre qui existe toujours. Entre-temps, j'avais accumulé de l'expérience associative pour monter des projets, chercher des financements. J'ai repris le travail que je faisais avec le Onztet. On a pu débuter avec l'appui d'une scène nationale car j'avais été invité à devenir artiste-associé au Théâtre des Gémeaux, à Sceaux.

- Quel plaisir particulier procure le travail pour grand orchestre de jazz par rapport à une petite structure ?
- En petite formation, on fait un travail que j'aime beaucoup, très libre, proche de la musique de chambre. Quand on écrit pour un grand ensemble, avec de nombreux musiciens, on est comme un peintre avec des couleurs, un cuisinier avec des saveurs. Après, cela comporte plus de contraintes car il faut toujours réunir douze à quinze personnes, trouver des locaux et avoir un minimum de moyens financiers. Mais c'est passionnant. Je suis heureux avec cet ensemble qui comporte quasiment les mêmes musiciens depuis une vingtaine d'années. Un son d'orchestre s'est créé avec le temps. Quand je compose pour cet ensemble, j'entends les gens pour qui j'écris. Mais ce qui est intéressant, c'est l'aller-retour entre les différentes activités. Si je ne faisais qu'écrire de la musique, il me manquerait quelque chose. J'ai besoin de jouer, comme tous les musiciens. Quand on joue, on se sent bien, la musique vous remplit. Si je ne joue pas pendant un certain temps, je me sens vide.

- Quels sont les disques dont vous êtes le plus fier ?
- J'ai pu commencer une discographie dans la mesure où en tant que contrebassiste, j'ai accompagné plein de gens : c'est l'avantage de cet instrument. Dans la musique, il y a toujours une guitare basse ou une contrebasse. J'ai donc pu me balader dans plein de genres musicaux. Parmi les disques importants, il y a ceux qui ont marqué une histoire. Il y a le premier album avec Marc Fosset, "Boîte à musique" (1977, ndlr), c'est le premier disque d'une séquence. Il y a le travail que j'ai fait avec Mosalini et Beytelmann. Avec le recul, je le trouve vraiment formidable. On a fait trois albums, le premier s'appelle "La Bordona". Il y a évidemment le premier disque du Onztet, "Endeka" (1982) dont le retentissement m'a surpris. Je parle bien sûr de succès d'estime, on vend très peu de disques !


Je citerais aussi la plupart des albums que j'ai faits avec le dernier orchestre. En dehors du jazz, il y a celui que j'ai enregistré avec Maxime Le Forestier ("Hymne à sept temps", 1976). Et pour la première fois, en 1975, on m'avait confié la responsabilité d'orchestrer un album entier, celui du chanteur Yvan Dautin, dans lequel il y avait la chanson "La Malmariée". Je suis allé chercher des instruments que je ne connaissais pas, car on est toujours en train d'apprendre. Cela dit, j'ai plus la mémoire de certains concerts...

- Quels concerts, par exemple ?
- Quand j'ai lancé l'orchestre, le pianiste guadeloupéen Alain Jean-Marie m'a proposé de faire un travail sur la biguine avec son trio. En 2001, j'ai monté ce projet ("Chofé Biguine", ndlr) qui a été créé en Martinique par le Jazz Ensemble et le trio Biguine Reflections. C'était un concert absolument incroyable. J'ai récupéré la bande de ce concert de création qui est sorti chez Universal il y a 5 ans environ. Ensuite, il y a les souvenirs qui remontent aux années 70 avec des chanteurs. Je me rappelle d'un concert avec Maxime Le Forestier à la Fête de l'Humanité devant 50.000 personnes. Quand on vit des moments comme ça, on se dit : "Qu'est-ce qui m'arrive ?"

Je me rappelle de certains concerts avec Grappelli aux États-Unis, on a joué dans des salles incroyables. Je me souvient aussi d'une tournée avec Mosalini et Beytelmann. On jouait beaucoup en Allemagne. On a joué à la Philharmonie de Berlin. On s'est retrouvés sur cet espace incroyable, chargé d'histoire, à jouer avec d'autres ensembles. Mais la musique, ça emmène dans tous les univers, aussi bien à la Philharmonie de Berlin qu'au bar d'un bateau grec ou au Club Méditerranée. C'est le côté saltimbanque. On peut se retrouver dans toutes les couches de la société, des plus démunies aux plus richissimes. J'ai joué dans de grandes soirées où je me suis senti un peu décalé. Et on peut aussi se retrouver sur un trottoir d'une ville allemande à 2 heures du matin, ne sachant pas où on va dormir après avoir joué dans une boîte infâme. Ça remet souvent les pendules à l'heure.


- Comment avez-vous vu le jazz évoluer au fil du temps ?
- Cette musique s'est construite à un moment donné de l'histoire. Au moment où je débute, on est au bout de cette histoire. Le jazz est né dans les années 20, puis il y a eu les moments extraordinaires des années 40, 50, 60. Ensuite, il se passera d'autres choses, passionnantes. Mais je suis d'une génération qui est arrivée juste après cette époque et qui a pu en côtoyer des acteurs historiques, y compris ceux qui habitaient en France, comme Kenny Clarke. Cette musique était en rapport avec la société de son époque. C'était une construction du monde, comme la littérature, la peinture. Aujourd'hui, on se trouve dans un après, d'abord d'un point de vue historique, sur le jazz lui-même, sur le langage musical. Des gens en ont pris des bribes et en ont fait d'autres choses. Il se passe un tas de choses dans tous les sens, ça donne une musique moins identifiable. Ensuite, on se trouve dans un moment, au-delà de la musique, qui est celui de la globalisation de tout, de la numérisation de tout, où tout est dans tout et réciproquement, et où on a du mal à trier. La société ne fonctionne pas de la même façon, le rapport à la musique passe par plein de choses, on a largement dépassé l'histoire du disque.

Socialement, on vit une période très différente de celle de mes débuts. J'ai appris la musique parce qu'on pouvait rester deux semaines, un mois, deux mois, dans un endroit avec le même ensemble, à jouer pour gagner sa vie, à travailler, à progresser. Aujourd'hui, en France, mais pas seulement, les musiciens qui ont 25, 30 ans, sont beaucoup plus nombreux et ne trouvent plus les mêmes conditions. On est obligé de devenir son propre entrepreneur de spectacles, et c'est encore plus vrai quand on a un grand groupe à gérer. Ça fonctionne comme les compagnies théâtrales. Les gens du théâtre ont quelques siècles d'avance sur nous, car Molière et Shakespeare leur ont montré la voie...


Carte blanche à Patrice Caratini
Théâtre du Châtelet
Lundi 21 mars 2016, 20H
1, place du Châtelet, Paris 1er
01 40 28 28 40

Le Caratini Jazz Ensemble : André Villéger (saxophones, clarinette), Matthieu Donarier (saxophones, clarinettes), Rémi Sciuto (saxophones), Clément Caratini (clarinette), Claude Egea (trompette) Pierre Drevet (trompette), Denis Leloup (trombone), François Bonhomme (cor), François Thuillier (tuba), David Chevallier (guitares), Alain Jean-Marie (piano), Manuel Rocheman (piano), Thomas Grimmonprez (batterie), Sebastian Quezada ( percussions), Patrice Caratini (contrebasse et direction).

Les invités : Maxime Le Forestier dans "Le fantôme de Pierrot", Martial Solal (piano), Marcel Azzola (accordéon), Lina Bossatti (piano), Thierry Caens (trompette), Gustavo Beytelmann (piano), Sara Lazarus (chant), Hildegarde Wanzlawe (chant), Leonardo Sanchez (guitare), Maryll Abbas (accordéon), Inor Sotolongo (percussions cubaines), Abraham Mansfarroll (percussions cubaines), Roger Raspail (djembé).
Avec la participation exceptionnelle de l'Orchestre Régional de Normandie.

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.