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Jazz sous les pommiers : l’élégance infinie de Fred Hersch

En concert avec son trio jeudi soir à Coutances, le pianiste américain Fred Hersch a enchanté les mélomanes réunis au Théâtre municipal, venus nombreux en ce début de week-end de l’Ascension. L’artiste natif de Cincinnatti a proposé un répertoire de splendides reprises de standards et de compositions personnelles. Le concert était retransmis sur Culturebox, où il reste disponible en replay.
Article rédigé par Annie Yanbekian
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Fred Hersch sur la scène du Théâtre de Coutances (26 mai 2017)
 (Isabelle Laurence)

Qui aurait pu imaginer, en acclamant Fred Hersch au théâtre municipal de Coutances, que le pianiste de 61 ans venait de passer plus de neuf heures sur la route reliant Paris à la capitale normande du jazz ? Ce jeudi 25 mai, les embouteillages d'un début très estival du week-end de l’Ascension, plus une série d’accidents, ont transformé la route de Coutances en calvaire. « Bah, on était en minibus, et Fred a dormi », a tempéré, sourire aux lèvres, l’agent du pianiste après le concert. Ce retard a entraîné l’annulation des interviews prévues avant le spectacle (dont celle avec Culturebox - où l’on peut revoir le concert au bout de ce lien), et n’a laissé que peu de temps au trio de Fred Hersch pour souffler et se mettre en condition.

Le moins que l’on puisse dire, c’est que sur scène, Fred Hersch et ses complices, le contrebassiste John Hebert et le batteur Eric McPherson, n’ont rien laissé paraître de leur fatigue. Au menu de leur concert : des extraits du dernier album en trio du pianiste, un live intitulé « Sunday night at the Vanguard » sorti en 2016, des standards (Sonny Rollins, Thelonious Monk...) et des morceaux plus anciens de Hersch.

Un toucher délicat et intimiste, sans esbroufe

Fred Hersch, c’est un toucher délicat et intimiste au piano, un jeu sans ostentation, sans esbroufe, mais d’une grande richesse de nuances. Une subtilité parfois minimaliste, combinée à un raffinement harmonique enchanteur. Le concert débute avec un thème du regretté Kenny Wheeler, « Everybody’s song but my own », qui figure dans le dernier disque du trio. Un hommage à un très grand mélodiste, dans un arrangement très swing, pour donner le ton. Quand il prend la parole, Fred Hersch s’exprime tantôt en anglais, tantôt dans un français hésitant mais très honorable, mais toujours avec une grande élégance et humilité.

A ses côtés, le contrebassiste John Hebert, penché sur son instrument, et dont on ne devine que la barbiche sous un grand béret gris pâle, démarre à l’unisson du piano le thème « Serpentine », une pièce de Hersch, avant de s’en émanciper par des motifs très rythmiques. La batterie, tenue de mains de maître par un Eric McPherson souvent radieux, les rejoint plus tard. Lors d’une improvisation à deux, la section rythmique s’envole dans un échange par petites touches, presque pointilliste, faisant contraste avec l’écriture pianistique quasiment classique du thème joué quelques instants plus tôt au piano.
John Hebert (contrebasse) et Eric McPherson (batterie) au Théâtre de Coutances (26 mai 2017)
 (Isabelle Laurence)
Le trio de Fred Hersch ne se refuse aucune expérimentation, offrant à profusion une large palette de contrastes rythmiques, mélodiques et harmoniques, et préférant de discrets mais délicieux contrepoints aux grandes envolées virtuoses.

Parmi les moments les plus forts du concert, on se souviendra d’un splendide « For no one », reprise d’une chanson des Beatles signée Paul McCartney, génie pop qui inspire décidément nombre de jazzmen. Ce thème figure dans le dernier album du trio de Hersch. Puis, vers la fin du concert, le pianiste et ses musiciens rendent un hommage étourdissant à Thelonious Monk, né il y a un siècle, enchaînant un « Round Midnight » poignant et intériorisé et « We see », thème plus swingant. Le public, sous le charme, acclame les artistes et sollicite deux rappels. Le concert s’achèvera par un morceau de Fred Hersch, « Valentine », joué seul au piano comme une dernière confidence soufflée à l’oreille.

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