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Décès de Jon Hendricks, légende du jazz vocal

Le chanteur américain Jon Hendricks, monstre du jazz vocal, s'est éteint mercredi à New York, dans un hôpital de Manhattan, à l'âge de 96 ans, a annoncé sa fille Michele Hendricks sur Facebook. Il s'était rendu célèbre dans les années 1950 avec le légendaire trio Lambert, Hendricks & Ross et était connu pour avoir mis des paroles sur les plus grands standards de jazz instrumentaux.
Article rédigé par franceinfo - Valérie Oddos et Annie Yanbékian
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Jon Hendricks à Paris, devant le Duc des Lombards, en 2004
 (C Stefan / Ouest France / PhotoPQR / MaxPPP)

C'est par un court message sur Facebook que sa fille Michele Hendricks, elle-même chanteuse de jazz et pédagogue, a annoncé la nouvelle du décès de son père : "Bonjour tout le monde. Une triste nouvelle à annoncer. Papa est décédé aujourd'hui à 15h12. Il laisse un énorme vide. Mais il laisse aussi un incroyable héritage. L'un des authentiques géants du jazz nous a quittés. Je suis plus triste que l'on peut imaginer. Repose en paix, papa. Je t'aime et tu me manques terriblement."

Jon Hendricks, scatteur de génie, avait popularisé la pratique du "vocalese", la mise en voix et en parole des solos instrumentaux de jazz, un style dont la paternité est attribuée au chanteur Eddie Jefferson (1918-1979). Hendricks a côtoyé et inspiré des générations de chanteurs de jazz, de Mark Murphy à Kurt Elling en passant par Al Jarreau ou, en France, André Minvielle.

Jon Hendricks est né à Newark, dans l'Ohio, le 16 septembre 1921, dans la famille nombreuse d'un pasteur. Les Hendricks s'installent à Toledo, où Jon chante dans le chœur de l'église, puis avec le pianiste Art Tatum avec qui il se produit à la radio.

Le succès avec Lambert, Hendricks & Ross

Jon Hendricks commence des études de droit tout en continuant à faire de la musique. Engagé pendant la Seconde Guerre mondiale, il participe au débarquement en Normandie le 12 juin 1944,
 
Encouragé par Charlie Parker qui l'avait repéré deux ans plus tôt à Toledo, il se rend à New York où il commence véritablement sa carrière de chanteur. Il y fonde son trio légendaire avec Dave Lambert et Annie Ross et leur premier album, "Sing a Song of Basie", sorti en 1957, sur des paroles de Jon Hendricks, est un succès.
Le trio effectue ensuite des arrangements vocaux d'une virtuosité époustouflante des grands du jazz, de Charlie Parker à Miles Davis ou Duke Ellington. Ils inventent une façon de chanter qui va influencer des groupes comme le groupe Manhattan Transfer ou, en France, les Double Six.

Une carrière solo

Jon Hendricks a aussi écrit des paroles sur des thèmes de Thelonious Monk comme "In Walked Bud" qu'il a chanté sur l'album du pianiste "Underground" en 1968. 
Après la séparation de son trio en 1964 (où Annie Ross avait été remplacée par Yolande Bavan en 1962), Jon Hendricks a poursuivi une carrière solo. Il a vécu à Londres avec sa famille quelques années avant de retourner aux États-Unis où il a continué à se produire jusqu'à récemment.
En mai 2013, Jon Hendricks avait clôturé le festival Jazz sous les Pommiers à Coutances et avait chanté sur la scène du Duc des Lombards.

Les deux filles de Jon Hendricks, Aria Hendricks et Michele Hendricks, sont chanteuses.

Hommages

Alex Dutilh, producteur et animateur de l'émission Open Jazz sur France Musique, a exprimé sa tristesse sur Facebook dans la nuit de mercredi à vendredi. Open Jazz doit rendre hommage à Jon Hendricks ce jeudi à partir de 18h, suivi de l'émission Banzzai de Nathalie Piolé à 19h.

Le chanteur de jazz américain Kurt Elling a également rendu hommage à Jon Hendricks sur sa page Facebook : "Sois enfin pleinement en paix, Jon Hendricks, génie de 96 ans. Artiste, poète, chanteur, père, professeur, ami. Merci. Que mon travail puisse t'honorer."

La chanteuse de jazz Laura Littardi, formidable improvisatrice, a salué de son côté "une force de vie, une joie de chanter" et a ajouté : "Nous avons tant appris de vous."

Le chanteur américain Jamie Cullum a salué la "dextérité" et la "joie" de Jon Hendricks sur Twitter : "Adieu à ce grand homme, M. Jon Hendricks, à 96 ans, l'un des chanteurs les plus agiles et joyeux qui aient marché sur la planète Terre. Les concerts auxquels j'ai assisté demeurent parmi mes souvenirs musicaux préférés et les plus formateurs."
https://twitter.com/jamiecullum/status/933609249879592961
Le chanteur de jazz belge David Linx a écrit sur son compte Facebook : "Repose en paix, légendaire et stellaire Jon Hendricks. Tu as laissé ton empreinte sur chacun d'entre nous."

Le chanteur de jazz Bob Stoloff, pédagogue du scat, a écrit un long hommage sur Facebook, illustré par la chanson "Poppity-Pop" : "Reposez en paix, Maître Jon Hendricks. C'est le thème qui a tout changé pour moi, dans les années 60. Ça m'a mené à une carrière d'enseignant en improvisation vocale, quelque chose à quoi je n'avais jamais pensé à l'époque où je siégeais dans les sections de trompettes (...) ou quand je jouais de la flûte dans des quintettes à vent. Cette version de "Poppity-Pop" est incroyablement brillante et drôle (Lambert est hilarant). Écoutez le solo de Jon a cappella, dans lequel il chante au fond du temps (quelqu'un reconnaît-il cette mélodie ?)..."

"Merci Jon Hendricks !", a simplement tweeté Loïs Le Van, représentant d'une prometteuse nouvelle génération de chanteurs de jazz français.
https://twitter.com/levanlois/status/933635310075961344
Joe Farmer (L'Épopée, sur RFI) a salué sur Twitter "l'un des grands maestros de l'art vocal".
https://twitter.com/RFI_EPOPEE/status/933619715846606849

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