Cet article date de plus de six ans.
Académie du Jazz : les chanteuses à l'honneur dans le palmarès 2017
L'Académie du Jazz a livré dimanche soir son palmarès de l'année 2017. Plusieurs voix féminines sont à l'honneur, dont Cécile McLorin Salvant, prix Django Reinhardt. Le pianiste Laurent de Wilde pour son trio monkien et le big band musclé du contrebassiste Christian McBride sont aussi distingués, aux côtés, entre autres, de chanteuses : Susanne Abbuehl, Karin Krog, Thornetta Davis et Como Mamas.
Publié
Mis à jour
Temps de lecture : 9min
Cécile McLorin Salvant, prix Django Reinhardt
C'est donc la chanteuse franco-américaine Cécile McLorin Salvant qui a reçu cette année le trophée le plus prestigieux de l'Académie du Jazz, le prix Django Reinhardt. C'est la première chanteuse à le remporter depuis la création de l'Académie. Une évidence pour cette vocaliste étincelante de 28 ans à la technique sidérante, et qui a sorti cet automne son troisième album sur le label Mack Avenue, un somptueux double live intitulé "Dreams and Daggers". Son précédent disque "For One to Love" a été distingué par un Grammy Award en 2016. Actuellement en tournée, la jeune artiste a fait parvenir à l'Académie un message vidéo, ému, de remerciement.Christian McBride reçoit le Grand Prix de l'Académie
Le Grand Prix de l'Académie du Jazz a été décerné au contrebassiste américain Christian McBride pour "Bringin' it", un album au groove incontestablement efficace, enregistré avec son big band et sorti en septembre 2017 chez Mack Avenue. McBride, 45 ans, natif de Philadelphie, a joué avec des géants du jazz comme Freddie Hubard, Herbie Hancock, Chick Corea, mais aussi des stars de la pop comme Sting. Depuis 2000, il anime un big band qui oscille entre jazz, fusion et funk et qui a accueilli récemment de nouvelles recrues. La chanteuse Melissa Walker, sa compagne, chante "Mr Bojangles" dans l'album "Bringin' it" où alternent compositions originales et standards. Le disque s'ouvre sur une reprise de "Gettin' to it", un morceau de Christian McBride inspiré d'une chanson de James Brown, et qui figurait sur son album éponyme sorti en 1994."Je suis très touché, surpris et honoré", a-t-il déclaré à l'issue de la cérémonie. "J'espère que quand nous viendrons jouer ici en mai, les fans viendront écouter le big band en live ! Écouter la musique en live, c' est une expérience très différente de l'écoute sur disque." On ne peut qu'abonder dans son sens.
Dimanche soir sur la scène du Pan Piper, à Paris, où la cérémonie était organisée, Christian McBride a proposé une improvisation solo "unplugged" avant de rebrancher la contrebasse mise à sa disposition pour accompagner Melissa Walker venue le rejoindre sur scène avec Fred Nardin (piano), Hugo Lippi (guitare) et Lawrence Leathers (batterie).
Laurent de Wilde, prix du Disque français
Le Prix du disque français a sacré le "New Monk Trio" de Laurent de Wilde, un excellent album sorti chez Gazebo en octobre dernier. Le pianiste, personnalité incontournable de la scène jazz française, y rend hommage à l'artiste qui l'inspire et l'émerveille depuis toujours : Thelonious Monk, dont l'année 2017 marquait le centenaire de la naissance. Dans ce disque, Laurent de Wilde, auteur d'une biographie de référence du génie disparu en 1982, revisite sa musique avec sa griffe très personnelle, en trio avec le bassiste Jérôme Regard et le batteur Donald Kontoumanou.Susanne Abbuehl, musicienne jazz européenne de l'année
Susanne Abbuehl, chanteuse suisso-néerlandaise née à Berne en 1970, a débuté sa carrière en 1997 et a sorti son premier disque en 2001 chez ECM. Elle a enregistré trois albums en leader sur ce prestigieux label allemand. En 2017, cette artiste à l'univers très personnel, intimiste, loin du jazz vocal classique, était l'invitée de l'album "Princess" du pianiste français Stephan Oliva, avec qui elle avait déjà travaillé par le passé. Salué par la critique, cet album sorti sur le label Vision Fugitive a reçu le Grand Prix Jazz de l'Académie Charles-Cros.Karin Krog, prix du Jazz vocal
Légende du jazz vocal nordique, Karin Krog, chanteuse norvégienne née à Oslo en 1937, a été distinguée pour son coffret de six CD, "The Many Faces of Karin Krog" (Odin / Outhere). L'artiste y célèbre son 80e anniversaire en explorant une carrière longue et très éclectique, lors de laquelle elle a voyagé entre ragtime, avant-garde, jazz et électro, auprès de nombreux grands musiciens parmi lesquels le saxophoniste anglais John Surnam, devenu son mari.Dimanche soir , profitant de la présence du très monkien Laurent de Wilde, elle a chanté à ses côtés "Pannonica" et "Blue Monk".
Thornetta Davis, prix Blues
La chanteuse Thornetta Davis, 54 ans, native de Detroit, est une battante qui lutte sur plusieurs fronts. Celui de sa carrière entamée il y a plus de vingt avec un premier disque sorti en 1996, et celui de sa ville, Detroit, sinistrée par la crise économique au point d'avoir vu de nombreux habitants la déserter, mais qui a enfin entamé sa convalescence, se réjouit la chanteuse. "Les gens reviennent, ouvrent des commerces. Mais nous avons besoin de plus de musiques, de salles de concerts." Thornetta Davis, qui a assuré les chœurs dans les enregistrements de nombreux artistes tels que Kid Rock, Bob Seager ou Alberta Adams, a arpenté les scènes américaines pendant vingt ans et a sorti en 2016 son troisième album, "Honest Woman" (Daptone / Differ-Ant), qui lui vaut cette distinction de l'Académie du Jazz.Dimanche soir, sur la scène du Pan Piper, une salle à dimension humaine où la blueswoman a interprété deux morceaux - pour lesquels elle a invité Christian McBride à la rejoindre au pied levé -, on sentait que Thornetta Davis contenait la puissance ébouriffante de sa voix, ce qu'elle a confirmé après la cérémonie, un sourire malicieux aux lèvres.
"Ce prix est un immense honneur, je suis si reconnaissante et honorée que les gens de France aient décidé de me récompenser pour quelque chose qui me tient tant à cœur", confie Thornetta Davis. "L'album Honest Woman raconte un voyage de vingt ans de ma vie. Certaines chansons ont été écrites il y a vingt ans, d'autres l'ont été en vue de cet enregistrement. Si vous écoutez le disque, vous savez par quoi je suis passée, et certaines chansons peuvent vous parler."
En ouverture de la soirée, un hommage a été rendu au violoniste, compositeur et musicologue André Hodeir (1921-2011), objet d'un livre primé par l'Académie, "André Hodeir, le jazz et son double" écrit par Pierre Fargeton (éditions Symétrie). Des étudiants du Conservatoire à rayonnement régional (CRR) de Paris ont joué deux pièces du musicien.
Le slideshow des lauréats :
Le palmarès détaillé
Prix Django Reinhardt (musicien français de l’année, avec le soutien de la Fondation BNP Paribas) : Cécile McLorin SalvantFinalistes : Vincent Bourgeyx, Théo Ceccaldi
Grand Prix de l’Académie du Jazz (meilleur disque de l’année) : Christian McBride Big Band : "Bringin’It" (Mack Avenue / Pias)
Finalistes : Martial Solal & Dave Liebman « Masters in Bordeaux » (Sunnyside / Socadisc), Vijay Iyer Sextet « Far From Over » (ECM / Universal)
Prix du Disque Français (meilleur disque enregistré par un musicien français) : Laurent de Wilde « New Monk Trio » (Gazebo / L’Autre Distribution)
Finalistes : André Villéger / Philippe Milanta / Thomas Bramerie « Strictly Strayhorn » (Camille Productions / Socadisc), Hervé Sellin Quartet « Always Too Soon » (Cristal / Sony Music)
Prix du Jazz Vocal : Karin Krog « The Many Faces of Karin Krog, Recordings 1967-2017 » (Odin / Outhere)
Finalistes : Mélanie De Biasio « Lilies » » (Le Label / Pias), Lizz Wright « Grace » (Concord / Universal)
Prix du Musicien Européen (récompensé pour son œuvre ou son actualité récente) : Susanne Abbuehl
Finalistes : Samuel Blaser, Andreas Schaerer
Prix de la Meilleure Réédition ou du Meilleur Inédit : ex-aequo, Thelonious Monk « Les liaisons dangereuses 1960 » (Sam Records - Saga / Pias) & LUCKY THOMPSON « Complete Parisian Small Group Sessions 1956-1959 » (Fresh Sound / Socadisc)
Finalistes : Woody Shaw & Louis Hayes « The Tour Volume Two » (HighNote)
Prix du Jazz Classique : Michel Pastre 5tet Featuring Dany Doriz & Ken Peplowski « Tribute to Lionel Hampton » (Autoproduction)
Finalistes : Pierre Christophe 4tet « Tribute to Erroll Garner » (Camille Productions / Socadisc), Bill Charlap Trio « Uptown, Downtown » (Impulse ! / Universal)
Prix Soul : The Como Mamas « Move Upstairs » (Daptone / Differ-Ant)
Finalistes : Don Bryant « Don’t Give Up On Love » (Fat Possum / Differ-Ant), Daniel Caesar « Freudian » (Golden Child)
Prix Blues : Thornetta Davis « Honest Woman » (Sweet Mama Music)
Finalistes : John Blues Boyd « The Real Deal » (Little Village Foundation), Monster Mike Welch & Mike Ledbetter « Right Place, Right Time » (Delta Groove)
Prix du Livre de Jazz : Pierre Fargeton « André Hodeir, le jazz et son double » (Éditions Symétrie)
Finalistes : Ray Celestin « Mascarade » (Le Cherche Midi), Jacques Ponzio « Abécédaire Thelonious Monk / ABC-Book » (Lenka Lente)
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.