Trans Musicales : ST.OL.EN, une pépite post-punk venue de Chine
Ils sont six jeunes hommes timides, s'habillent en noir et leur post punk mâtiné d'électro évoque Joy Division, The Fall et Kraftwerk. Jusqu'ici rien de nouveau aux Trans Musicales de Rennes, sauf que ST.OL.EN ne vient pas de Manchester mais de Chengdu. Devant la scène du Hall 8, il n'était que 22h15, en ce jeudi 1er décembre qui marque la deuxième soirée du festival breton. Mais ceux qui viennent d'assister impressionnés à la performance de ce groupe, composé de cinq musiciens chinois et d'un vidéo-jockey français, ont déjà la certitude d'avoir vécu un des grands moments de cette 38e édition.
Un groupe confidentiel en Chine
"La réaction du public était super", dit à l'AFP le chanteur Liang Yi, une demi-heure après le concert. Un manque de conviction plane pourtant dans ces propos prononcés à voix basse et quelque peu cassée. "C'est juste qu'on n'est pas vraiment habitués à cela. D'habitude, on joue surtout pour nous car en Chine ce que nous faisons est confidentiel."Paraissant fatigué, le groupe au complet peine encore à mesurer l'effet qu'il a laissé sur les spectateurs. Il y a comme un décalage, dont le leader dévoile alors la vraie nature: "c'est la première fois qu'on vient en France, en Europe même. On n'avait encore jamais quitté la Chine."
Reportage : France 3 Bretagne A. Billet / M. Thiebaut / E. Jeandel
Une bande de copains
Hervé Thomas, le vj français qui les accompagne sur scène où il monte en direct les vidéos diffusées à l'écran, raconte leur rencontre : "Elle date de l'université. Ils étaient étudiants au conservatoire de musique de Chengdu et moi j'étais barman. Ils apprenaient le classique, le jazz, mais jouaient dans leur coin du rock. On a très vite parlé musique et voilà."Des corbeaux, des crocs de boucher, des murs de briques délavées... L'imagerie punk, néogothique, industrielle est fidèle à la musique jouée par ST.OL.EN, derrière lequel se cachent trois mots STrange OLd ENtertainment, qu'on pourrait traduire par "étrange et vieux divertissement". "C'est surtout que ça sonne bien, je trouve", sourit Liang Yi.
Pas de politique
Les paroles des chansons du groupe ("Suicide/Emergency/Sickness/For you and me") sont sombres, parfois absconses. "Elles ne reflètent pas nécessairement notre état d'esprit", explique le leader.Surtout, on n'évoque pas la condition sociale, politique de notre pays. Cela ne nous intéresse pas, ça n'a pas sa place dans notre musique".
Une musique, née à Manchester il y a presque 40 ans, mais qui leur est parvenue aux oreilles il y a une dizaine d'années seulement. "À cette époque, il était très difficile en Chine d'avoir accès à ce type de rock, punk, électro. Peu de choses étaient accessibles. Aujourd'hui tout l'est", dit Duan Xuan, clavier du groupe. Les héros de ST.OL.EN se nomment Joy Division, Radiohead, Kraftwerk, Portishead, LCD Soundsystem... "On s'est dit "Whaou ! Il faut qu'on fasse ça !", dit Liang Yi.
Les Trans, "un autre monde"
En 2004, le groupe sort son premier album "Loop", aujourd'hui audible sur les plateformes de streaming comme Spotify ou Bandcamp. Depuis, il incarne la scène alternative chinoise émergente, particulièrement active à Chengdu, la ville principale de la province du Sichuan qui compte 9 millions d'habitants. ST.OL.EN a souvent joué dans plusieurs autres villes du pays, "dans des conditions scéniques pas vraiment professionnelles, quand on compare avec l'organisation des Trans. C'est un autre monde", sourit le batteur Yuan Yufeng. "On est des musiciens professionnels, mais on ne vit pas de notre activité. Les Trans nous ont fait venir à leurs frais, sans quoi on n'aurait pas pu faire le voyage", embraye le guitariste Fang De.La suite pour ST.OL.EN passe par deux concerts à Paris, au Nüba samedi soir, et à Zurich, en début de semaine prochaine. "On aimerait bien qu'un producteur puisse nous repérer. Car on prévoit de sortir un album en 2017", confie Liang Yi.
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