Cet article date de plus d'onze ans.

Metallica et Lou Reed : c'était pour rire !

Quand la nouvelle d'un mariage des rois du Metal avec le mythe intouchable du Velvet Underground a été annoncée cet été, l'incrédulité a d'abord dominé. Puis les attaques sous l'angle "vendus!" ou "gâchis!", ont fusé depuis les deux camps. Une fois les couteaux rangés, certains ont voulu croire que cet attelage improbable allait finalement, produire un album acceptable. Pas de la dentelle, mais du lourd, assurément. En fait, personne n'avait vu venir le coup: en ces temps de crise, Lou Reed et Metallica n'avaient pas d'autre projet que de nous dérider. Démonstration en 10 rounds.
Article rédigé par franceinfo - Laure Narlian
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 4min
Lou Reed entouré de Metallica
 (Anton Corbijn (WB))

Round 1 -  Dès le mois de juin, la première fanfaronnade de Lou Reed à Vulture en dit long: "La musique que j'ai composé avec Metallica pour "Lulu" est extrêmement inspirante. C'est peut-être la meilleure chose qui ait été jamais faite par quiconque. Cela pourrait créer un nouveau système planétaire. Je ne plaisante pas, et je ne suis pas égocentrique". Morts de rire.

Round 2 - Au mois d'août, alors que le buzz monte, on en apprend une bonne : Lou Reed a réussi à faire chialer deux durs à cuir de Metallica ! C'est Kirk Hammet qui le raconte dans Contact Music. La scène se passe en studio, lors de l'enregistrement du titre "Junior Dad". Les paroles de la chanson remuent des choses chez Hammet. "Je venais juste de perdre mon père, trois ou quatre semaines plus tôt. J'ai dû quitter précipitamment le studio et je me suis retrouvé dans la cuisine en train de sangloter", se souvient-il. Il est bientôt rejoint par Hetfield dont le père a abandonné sa famille lorsqu'il était encore ado. "James est arrivé dans la cuisine dans le même état. Il sanglotait lui aussi. C'était dément". Interdit de ricaner. 

Round 3 : En septembre, des extraits de morceaux commencent à filtrer. Pas franchement prometteurs.  Un magma épique, chaotique et inaudible où ça braille et défouraille à tout va. La voix de Lou Reed que l'on a tant aimée n'y change rien. Et la stupeur gagne en découvrant que la majorité des morceaux de "Lulu" sont longs de 8 à 11 minutes. Le record ?  19 minutes et des brouettes pour "Junior Dad", pourtant le seul morceau qu'on sauvera du massacre.

Round 4 - Le fou rire gagne lorsque la chanson "The View" est dévoilée dans son intégralité fin septembre. Les rugissement d'Hetfield sont une véritable catastrophe. On atteint l'acmé du rire quand il hurle sans aucune retenue ni aucune raison "I am the Tablet !" (Je suis la Tablette!). Alerte, il s'est pris pour un iPad !

Round 5: Hélas, il faut que Lou Reed se ridiculise lui aussi. On ne peut se retenir de glousser lorsqu'il scande, à 70 ans sonnés: "The hair on your shoulders/The smell of your armpit/The taste of your vulva and everything on it" (sur "Dragons"). (Les cheveux sur tes épaules/L'odeur de tes aisselles/Le goût de ta vulve et tout ce qu'il y a dessus"). Et sur "Little Dog" : "Ecoute-le aboyer/Ecoute-le appeler/Petit chien n'a pas grand chose/Un corps chétif et une minuscule bite/Un petit chien peut vous rendre malade". Lou Reed aussi, apparemment.

Round 6 - Dans un entretien à une radio argentine, cité par Spin à la mi-octobre, James Hetfield assure que Metallica et Lou Reed "adoreraient" monter sur scène pour défendre "Lulu". " Certains prient depuis pour que cela n'arrive jamais. Mais ils iront sans doute jeter un oeil sur la prestation télévisée qui a eu lieu le 8 novembre au Jool's Holland show de la BBC. Et sur le premier clip vidéo que prépare Darren Aronofsky ("Black Swan", "The Wrestler") pour "Iced Honey" attendu en fin de mois. Pour se poiler, bien sûr.

Round 7 - Vous l'avez compris, cet album sorti le jour d'Halloween est une aubaine pour dérider les lecteurs. Aux USA, la presse ose qualifier le disque de "repoussant" quand il ne s'agit pas d'un mixe de "schizophrénie et de migraine, en moins mélodique". Dans le NME, Alice Cooper compare cet attelage à une greffe entre Iggy Pop et Abba. "Les paroles de Lou Reed sont aussi noires qu'on peut l'être et Metallica est ce gigantesque groupe de Metal stéroïdé. Comment ça peut coller?", se demande-t-il. On se gondole.

Round 8 -  Face à la controverse, le batteur de Metallica, Lars Ulrich, souligne bien qu'il ne s'agit en aucun cas d'un nouvel album de Metallica mais d'un simple "challenge". Dans un entretien le 1er novembre à USA Today, il défend ce "disque fantastique" et minimise la déception des fans. "En 1984, quand les fans hardcore de Metallica ont entendu des guitares acoustiques dans "Fade to Black", il y a eu une fission nucléaire dans la communauté heavy-metal. Il y en a eu beaucoup d'autres depuis". Quel boute-en-train ce Lars ! 

Round 9 - Dans le même entretien, Lou Reed affirme que les fans de Metallica "menacent de le tuer et "joue le dingo perdu pour la science. "Personne ne veut "Lulu Part 2", mais sur Radio Lou, dans ma tête, là où j'entends ces chansons, j'en veux encore". Puis il lâche, blasé. "Je n'ai plus de fans. Après "Metal Machine Music" (album de 1975), ils se sont envolés. Qui s'en soucie ? Je suis essentiellement dans ce projet pour le fun". Vous voyez ? Le FUN, il a dit. Que vous faut-il encore comme preuve ?

Round 10 - "Lulu" est à l'écoute en streaming sur ce site dédié. Vous comprendrez.

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.