Un documentaire sur Gainsbourg à la première personne
"J'ai imaginé le film comme un journal intime qu'il aurait écrit, je l'ai envisagé comme une sorte de carnet de croquis", explique le réalisateur Pierre Henry-Salfati. "Le carnet d'un peintre mais aussi d'un poète, un carnet de notes éparses qu'on oublie dans un tiroir, où des impressions sans chronologies apparentes de succèdent les unes aux autres. L'ensemble construisant ce portrait du dedans".
Une âme slave
"Mon vrai prénom c'est Lucien. Je me suis permis de m'appeler Serge par nostalgie de la Russie (dont étaient originaires ses parents ndlr)", commence Gainsbourg, de sa tessiture de fumeur invétéré. Et on se laisse embarquer dans cette balade introspective. A bord de la psyché d'un type qui "veut la gloire et que la gloire détruit", d'un gars qui "veut pas qu'on l'aime mais veut quand même".
Il y a le p'tit Lulu terrorisé par son père pianiste dont la grosse voix et les raclées à coups de ceinture lui donnent des airs de cosaque. Un père qu'il aura toujours craint de décevoir. Un petit Ginzburg à l'étoile jaune qui échappe in extremis aux miliciens durant l'occupation, mais qui faillit ne pas naître, aussi, comme il nous l'apprend ici. Déterminée à avorter, sa mère s'était présentée chez le faiseur d'anges, avant de renoncer devant la chambre glauque du truand...
Peindre ou faire l'amour
Sa première passion, la peinture, est largement évoquée ainsi que les raisons de son abandon au profit de la musique. Reste que "de par ma formation picturale, je vis par l'oeil, avant le coeur ou l'esprit", analyse Gainsbourg.
Les femmes, l'autre grande passion de l'auteur de "Je t'aime moi non plus", donne lieu à une belle page de lucidité. "J'étais la misogynie même. A cause de ma gueule, j'attaque, je ne veux pas me faire attaquer", confie-t-il. Le passage où il évoque sa liaison avec Brigitte Bardot est poignante. "C'est un connard qui a balancé à un canard vautour", lâche-t-il, encore dégoûté. Et d'avouer avoir pensé alors "à se flinguer".
Le peintre, le chanteur, le musicien, l'acteur, l'amant, le père, toutes les facettes se mêlent sans hiérarchie mais avec fluidité et composent un portrait fin et jamais lassant de Gainsbourg, de Ginzburg à Gainsbarre.
Seul souci : l'aspect cinématographique. Dans une tentative un peu désespérée de donner autant à voir qu'à entendre, ce film dont on perçoit toutes les coutures se contente de trop d'images prétextes. La matière sonore étant en revanche tout à fait riche, rare et précieuse, un documentaire radiophonique ou télévisé aurait semblé plus approprié.
La bande annonce de "Je suis venu vous dire..."
"Je suis venu vous dire... " de Pierre-Henry Salfati. Sortie le 15 février 2012
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