Mort de Jean-Louis Murat : pourquoi l'artiste était un inclassable rebelle de la chanson française
Jean-Louis Murat s'est éteint ce jeudi à l'âge de 71 ans à son domicile en Auvergne. Des artistes comme Christine and the Queens ont salué le "poète" en lui, Benjamin Biolay s'est affiché sur Instagram le coeur brisé. L'oeuvre de Murat, dont le label indépendant Pias sortira ce vendredi 27 mai un best-of qui était déjà programmé, a marqué des générations de fans. Inclassable, l'artiste était prolifique mais fuyait les conventions et une forme de médiatisation. Singulier, rebelle.
Chanteur du terroir
"Une part de l'Auvergne part avec lui". Le maire de Clermont-Ferrand, Olivier Bianchi, fut l'un des premiers à réagir sur twitter au décès de l'artiste, saluant "la beauté du texte, la franchise du mot, la sincérité du chant". Jean-Louis Murat, né Jean-Louis Bergheaud le 28 janvier 1952, avait fait d'un village de sa région natale, Murat-le-Quaire (Puy-de-Dôme), son nom d'artiste. Il s'est éteint à son domicile, dans sa région de coeur.
Parti pris musical
Artiste intransigeant et engagé, ses partis pris musicaux parfois radicaux pouvaient susciter une forme d'incompréhension. Il avait dérouté avec l'ovni Travaux sur la N89 (2017), qui faisait le pari de la déconstruction, en délaissant guitares et mélodies pour mieux se réinventer sur la base de sons synthétiques et électroniques.
"La mélodie à la française, c'est un peu comme l'addiction au sucre. Je voulais absolument m'en écarter et repartir de zéro. Ça a donné N89 et je n'étais pas sûr que ça fasse un disque. Mais finalement il a été assez réussi pour moi, parce que ça m'a redonné de l'énergie et je me suis de nouveau considéré en devenir", assurait-il à l'AFP en 2018.
Poésie et humour noir pour "déstabiliser" le public
Quand il montait sur scène, regard bleu acier, voix de séducteur lancinante avec son groove si particulier, ce n'était "pas pour faire plaisir aux gens" mais pour les "déstabiliser", voire " les dégoûter", disait-il à l'AFP en 2014. Les charmer, aussi, passant volontiers de l'anecdote pleine d'humour noir à la plus forte des poésies, et mélange d'influences du terroir auvergnat autant que des nuits américaines.
Dans l'album La vraie vie de Buck John (2020), titre d'une BD de sa jeunesse, il avait signé un autoportrait en clair-obscur : baladin perdu dans son époque, toujours fasciné par le groove du sud des Etats-Unis.
Ambivalence sur le succès
"Moi, je n'ai pas de caillasse (d'argent, NDLR), je n'ai pas de succès, mais au moins, je ne pense pas faire de la chanson démagogique", confiait-il lors de ce même entretien, avec son habituel franc-parler.
Certains de ses morceaux comme Sentiment Nouveau, Fort Alamo et Si je devais manquer de toi, son premier tube commercial, comptent parmi les plus connus d'une carrière prolifique, avec 24 albums en trois décennies. Le chanteur a connu les sommets des hit-parades en 1991 à la faveur d'un duo avec Mylène Farmer ( Regrets) mais assure avoir toujours vécu le tube comme "un enfermement". "Ce que j'aime, c'est la chanson qui devient un tube, pas la chanson qui est déjà tube avant que le gens ne l'aient entendue", disait-il.
Provocation et scandale
Volontiers provocateur, Jean-Louis Murat avait fait scandale à ses débuts dans les années 80, avec Suicidez-vous le peuple est mort. Certains médias craignant que ce titre soit une incitation au suicide. La pochette était signée par le photographe des stars Jean-Baptiste Mondino.
L'artiste, tout au long de sa riche carrière, s'est régulièrement illustré en interview avec son ton provocateur et ses critiques acerbes et pessimistes de la société et de nombreuses personnalités. Des coups de gueule parfois sepctaculaires devenus la marque de fabrique du chanteur au regard bleu perçant.
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