Lescop, petit prince de la nouvelle "variété punk" française
Mathieu Lescop n'est pas un inconnu au rayon rock français. Il officiait déjà au micro du groupe rochelais Asyl au début des années 2000 avant de s'en détacher. Pour développer ses textes plus personnels qui débordaient le cadre du groupe, Lescop déménage en banlieue parisienne et se rapproche de John (du duo John & Jehn), exilé à Londres, responsable de la production de ce premier album sans faute.
Lescop "Tokyo La Nuit"
Contaminé très tôt par la new-wave
Bien qu'il s'en défende - "je ne suis pas tourné vers le passé" - Lescop en solo reprend largement les codes de la new wave pop des "jeunes gens modernes" des années 80, Taxi Girl, Marquis de Sade, Elie & Jacno, Etienne Daho, Indochine. Avec Joy Division et son chanteur Ian Curtis en modèle indépassable puisque trépassé à l'orée de la gloire.
Né en 1979, Lescop avoue dans Libé/Next avoir attrappé le virus précocement. J'ai "reçu cette musique en pleine face tout gamin. Daho, Darc et les autres, je les voyais à la télé, forcément, ça imprime". Les symptômes: textes romantiques et tourmentés, voix atone, sur une musique minimaliste et synthétique aux basses entêtantes (à la Peter Hook) et aux riffs de guitare nets et cinglants. Mais il y ajoute une touche moderne, en phase avec le climat délétère de l'époque.
"La new-wave, en fait, c'est une méthode: mettre des paroles compliquées sur une musique simple. C'est ça que je reprends", dit-il. "Ce qui m'intéresse, c'est le trouble. Après, c'est tout un champ lexical que je vais trouver par le cinéma, un bouquin, des conversations que je peux entendre", ajoute-t-il.
Lescop "La Forêt"
Des textes oniriques et imagés
Dans ses textes (en français, il faut le préciser), accrocheurs et cinématiques, Lescop s'adresse souvent à un tiers (homme ou femme) à la deuxième personne du singulier. Il y est beaucoup question de villes, expérimentées ou fantasmées - Los Angeles, Tokyo la nuit, Paris s'endort, Ljubljana - de la nuit et de ses songes, diurnes ou nocturnes.
Avec lui, l'auditeur évolue toujours sur un fil trouble et ténu, jamais convenu, les frontières entre songe et réalité se brouillant à chaque pas. Comme avec "La forêt", une chanson à double-détente où "un rendez-vous improvisé sous la Lune" avec une belle, se transforme en rendez-vous inquiétant mais presque orgasmique avec la mort - "Je sens ton souffle qui me frôle le cou/Un pistolet chargé me caresse la joue (...) Dans la foret la première détonation résonne/Un coup de feu puis deux, mon corps qui frissonne/Puis doucement s'écroule".
Lescop "Marlene"
Ambition : "faire de la variété punk"
Si Mishima et Shakespeare figurent au premier rang de son inspiration, il cite aussi les films noirs de Jean-Pierre Melville et "sa façon troublante de faire parler les gangsters, non pas dans l'argot de l'époque, mais dans un français châtié".
"Beaucoup de gens disent que le français ne marche pas avec la pop ou le rock, parce qu'on a cette culture très bavarde, alors que les Anglo-saxons disent plus de choses en moins de mots", analyse-t-il. "Mais tu peux aussi avoir ça en français, ça demande juste un peu plus de travail".
"Ce que j'ai envie de faire, c'est de la variété punk", tranche-t-il dans Libé. Indochine, qu'il avait déjà cotoyé en compagnie d'Asyl, a flairé là le petit prince du "novö" spleen que les jeunes vont s'arracher. Il est d'ores et déjà invité sur leur prochain album.
Lescop "Lescop" (Pop noire/Mercury) est sorti le 1er octobre 2012. Lescop est en concert le 26 octobre au Divan du Monde (Paris), puis au festival des Inrocks le 5 novembre.
Lescop à "Ce Soir ou Jamais" (France 3) chante "La Forêt" pour sa première apparition télé (janvier 2012)
Les deux premiers EP de Lescop sont en écoute sur Deezer
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