"Je suis : Céline Dion" : comment la star de la chanson compose avec le syndrome de la personne raide ?
"Si je ne peux pas courir, je marcherai, si je ne peux pas marcher, je ramperai, mais je n'arrêterai jamais." Déterminée : voilà comment la célèbre chanteuse québécoise souhaite apparaître dans le documentaire qui lui est consacré. Intitulé, Je suis : Céline Dion, réalisé par Irène Taylor et diffusé à partir du 25 juin sur la plateforme Amazon Prime Video, le film s'est plongé, plusieurs mois durant, au cœur de son intimité, en 2022. La star aux plus de 200 millions de disques vendus dans le monde selon le magazine américain Billboard, livre sans fard son combat contre une maladie auto-immune très rare : le syndrome de la personne raide (SPR). Une pathologie diagnostiquée fin 2022 chez l'interprète de Pour que tu m'aimes encore, et qui provoque, au plus fort de ses crises, la rigidité de ses muscles, en commençant par le tronc, l'abdomen, puis l'ensemble de son corps.
Des souffrances qui l'ont contrainte à annuler ses spectacles en résidence à Las Vegas en 2020, ainsi que sa tournée internationale prévue en 2023. La maladie rendant impossibles ses performances sur scène, amoindrissant, entre autres, sévèrement ses capacités vocales. Si les médecins ont pu mettre un diagnostic, il y a deux ans, sur les troubles de la chanteuse, cela fait plusieurs années que son corps est sujet à des douleurs aiguës, comme elle l'explique dans le documentaire.
Un syndrome difficile à déceler
"Il y a 17 ans, j'ai commencé à avoir des spasmes aux cordes vocales. Un matin, je me suis levée, après le petit-déjeuner, ma voix était plus aiguë et ça m'avait fait flipper. (...) Je ne savais pas quoi faire", confie l'artiste de 56 ans, les larmes aux yeux. Pendant des années, elle assure avoir ingéré des anti-inflammatoires à hautes doses afin de calmer ses souffrances. A l'époque, elle ignore les causes de son mal. Mais au fil du temps, les crises deviennent de plus en plus aiguës. "J'en étais arrivée à un point où je ne pouvais plus marcher, je perdais l'équilibre", confie Céline Dion dans le documentaire. Elle fait tout pour "ne rien laisser paraître" et se trouve obligée de cacher la vérité. En concert, elle invente des subterfuges : elle tourne le micro vers le public pour ne pas avoir à chanter, ou tapote dessus, feignant un problème technique, évoque des problèmes de sinus...
Si elle a attendu aussi longtemps avant d'être fixée sur son état de santé, cela s'explique par la difficulté de diagnostiquer cette maladie. "Cela prend en moyenne cinq ans, car elle est invisible sur tous les examens complémentaires, confirme à franceinfo le docteur Dimitri Psimaras, neuro-oncologue à la Pitié-Salpêtrière à Paris et spécialiste des maladies auto-immunes. Si on fait un IRM cérébral ou un électromyogramme classique [un examen qui analyse le fonctionnement électrique des nerfs et des muscles] pour étudier le système nerveux, les résultats seront normaux. D'autre part, les symptômes peuvent ressembler à des choses assez banales comme de simples douleurs de dos, des crampes ou une hernie discale quand ça touche un seul membre. Les patients vont alors juste aller voir leur généraliste."
Pour détecter cette maladie rare, qui touche une personne sur un million, selon Orphanet, un portail d'informations dépendant de l'Inserm dédié aux maladies rares, "il faut savoir ce que l'on cherche", explique Dimitri Psimaras. Le médecin précise qu'il faut également prendre en compte une composante psychologique importante : "Il y a souvent de l'anxiété et de la dépression ce qui fait que ces patients peuvent être facilement pris pour des gens qui simulent, caractérisés alors psychogènes. Toutes ces raisons expliquent qu'il y a une grande errance [avant le] diagnostic pour ces malades."
Une pathologie complexe à soigner
Dans une des scènes fortes du documentaire, la star est étreinte par une crise d'une quarantaine de minutes durant un rendez-vous avec son kinésithérapeute qui est intégralement filmé. Céline Dion est soudain prise de spasmes musculaires. Son corps se raidit, ses mains se tordent, ses jambes se tendent à l'excès. Impossible pour elle de contrôler le moindre mouvement. Le patricien l'allonge sur le côté et dévoile alors le visage de la chanteuse, figé dans un rictus de douleur, le regard vide. Elle gémit, impuissante, laissant apparaître un torrent de larmes. Le médecin finit par lui administrer un spray nasal afin de ralentir sa fréquence cardiaque et calmer la crise.
Cette pathologie, qui se déclenche souvent autour de la quarantaine et qui touche davantage les femmes, selon Dimitri Psimaras, est aussi difficile à traiter malgré les nombreuses thérapies expérimentales. "C'est une maladie auto-immune et inflammatoire, précise le médecin. Le traitement est d’abord symptomatique et repose sur les benzodiazépines qui agissent sur les contractures. Il faut toujours y associer un traitement immunomodulateur ou immunosuppresseur dès le début de la maladie. Il y a des traitements standards bien connu, sinon des approches plus expérimentales comme des traitements contre le cancer comme l'immunothérapie (CART) ou l'autogreffe, les médecins canadiens sont d'ailleurs en pointe dans ce domaine pour ces affections auto-immunes. C'est un traitement souvent au long cours, mais les récidives sont possibles." Rien, cependant, qui ne puissent entamer la détermination de Céline Dion. La chanteuse travaille d'arrache-pied afin de revenir dès que possible sur scène.
Le documentaire Je suis : Céline Dion, réalisé par Irène Taylor est diffusé à partir du 25 juin sur la plateforme Amazon Prime Video.
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