Avez-vous encore une chance de voir les Rolling Stones en concert ?
Le groupe mythique de septuagénaires se produit ce soir au Stade de France, près de Paris, devant 80 000 personnes. Un chant du cygne ?
Il n'a fallu que quelques minutes pour remplir les 80 000 places du Stade de France. Vendredi 13 juin, les Rolling Stones ont pris rendez-vous avec leurs fans français (enfin, les plus rapides d'entre eux), pour l'unique date dans l'Hexagone de leur tournée "14 on Fire", lancée en 2012 aux Etats-Unis à l'occasion de leurs 50 ans de carrière. Faut-il craindre que les papys rockers ne signent ici leur dernier show au pays de Johnny ? Si vous les ratez ce soir, avez-vous encore une chance de passer la soirée avec Mick et Keith ?
Non, désolé, car ils se font vraiment vieux…
A part le guitariste Ronnie Wood, jeunot de 67 ans, les Stones ont tous dépassé les 70 printemps (le batteur, Charlie Watts, a eu 73 ans au début du mois). Connu pour son jeu de scène mythique, le jeune arrière-grand-père Mick Jagger a beau bénéficier d'une condition physique exceptionnelle, le show a été raccourci en cours de tournée, de 23 à une vingtaine de titres, relève Libération dans un article qui s'interroge sur un éventuel "chant du cygne".
Du coup, la tournée est particulièrement courue, notamment par les fans soucieux de voir pour la première et sans doute dernière fois le groupe culte. "On pense que ce sera le dernier 'gros concert' en France, explique Joseph de Rambuteau, 25 ans, fondateur d'un fan club parisien. Ils n'auront bientôt plus la force de faire de tels shows. D'autant plus que Keith Richards a de plus en plus d'arthrose. Et ça, pour un guitariste, ça pose plutôt problème." Lors d'un concert chroniqué par Culturebox en 2012, nos confrères indiquaient que le doyen, Charlie Watts, souffrait du dos : ce soir-là, il "est à l'économie, mais émouvant et tellement classe !"
… et même s'ils revenaient, vous risqueriez de ne pas être de la fête
Les concerts dans les stades, les foules en délire, les scènes de 100 mètres de large à parcourir en sautillant... Cette configuration semble de plus en plus difficile à tenir pour les stars britanniques, mais cela ne signifie pas que le groupe est perdu pour la scène. Joseph de Rambuteau s'attend plutôt à les voir revenir "dans de plus petites salles, sur le modèle de ce que fait Johnny, par exemple. Ce sont des concerts plus intimistes, donc plutôt destinés à une poignée de privilégiés", note-t-il.
Dans leur forme, ces shows sont en phase avec la tradition blues qui a marqué le groupe à ses débuts. Dans les cafés-concerts et petites salles parisiennes, il est fréquent de voir des stars du blues bien au-delà de leurs 80 printemps. "Même si les Stones sont un groupe qui vient du blues, ils demeurent avant tout un vrai groupe de rock", tempère Joseph de Rambuteau.
Cette formule, ils l'ont testée avec succès à Paris lors de leur dernier passage dans la capitale, en 2012. Pendant une heure vingt, le groupe a enflammé le Trabendo, une salle d'environ 600 places, avant de donner un concert privé deux jours plus tard au théâtre Mogador. Mais il y a un hic : annoncés à la dernière minute, secrets voire ultraselect, ces concerts ne s'adresseront hélas pas à tout le monde. Adieu les places à moins de 150 euros ? Enfin, un groupe qui remplit 80 000 sièges en vingt minutes ne passe pas à 500 fauteuils sans frustrer quelques fans au passage.
Mais il y a de l'espoir, parce qu'ils ont la forme…
Impossible n'est pas Stones. "On a grandi en voyant des vidéos de live qui datent des années 70, alors en achetant nos places, on s'attendait quand même à ce que le niveau soit un peu en dessous", se souvient Joseph. Mais les récentes images publiées par le groupe l'ont fait changer d'avis. "C'est assez bluffant. On ne s'attendait pas à les voir si en forme." Du coup, sa bande, composée d'une trentaine de jeunes fans de moins de 30 ans, est remontée à bloc pour le concert de vendredi soir.
Même éprouvé par le suicide de la styliste L'Wren Scott, sa compagne depuis onze ans, Mick Jagger a fait preuve lors de ces dernières dates d'une féroce patate, relève cette chronique du Parisien.fr. Le monsieur a de bons gènes, relève Joseph de Rambuteau, qui rappelle que "ce fils de prof de sport a toujours été en forme". Et puis "le rock, c'est comme la moutarde, on l'aime 'à l'ancienne'", plaisante-t-il.
… les Français ont un avantage…
Les Français ont en outre la chance de vivre dans un pays chéri par Mick Jagger et ses comparses. "Mick possède un appartement à Paris et une maison en Touraine, rappelle le jeune fan. Il est très francophile. De plus, le studio dans lequel ils enregistrent se trouve au nord de Paris. Donc, il y a fort à parier qu'ils se reproduiront d'une manière ou d'une autre en France."
… et leur carrière n'est pas terminée
Si tous s'interrogent sur cette éventuelle tournée d'adieu, les fans savent que les Stones n'ont pas l'intention de prendre leur retraite officielle. S'il est impossible de se projeter sur le plan des tournées alors que le groupe parcourra le monde, Pacifique et Moyen-Orient inclus, jusqu'à la fin de l'année, la rumeur d'un prochain album attise leur impatience. En décembre, Keith Richards lui-même indiquait au New Zealand Herald (en anglais) que le groupe pourrait retourner en studio (il joue d'ailleurs deux nouveaux titres sur sa tournée).
Surtout que les Stones, mis en cause depuis trente ans par ceux qui leur reprochent des albums inégaux, ne se sont jamais sentis dépassés. Leurs secrets : "l’innovation, la vision, la prise en compte des contextes", analyse cette chronique sur leur longévité publiée sur le site de la Harvard Business Review (en anglais). Ces "Picasso du rock and roll surfent sur le poids des ans grâce à la remise en question permanente, subie ou osée, similaire à celle du génial peintre espagnol et de ses multiples périodes", s'enflamme l'article.
Le photographe Dominique Tarlé, qui a passé six mois avec les rockers au début des années 70 dans une villa de Villefranche-sur-Mer, décrit dans Le Figaro un groupe "hyperactif", qui joue et compose en permanence. Voilà qui n'a pas dû changer.
De toute façon, s'ils raccrochent, il y a toujours le cinéma
Bon, d'accord, quoi qu'il arrive, ce sera de plus en plus compliqué d'aller quémander un médiator, écrasé contre les barrières d'un stade plein à craquer. Mais les Stones ont déjà pris le virage d'une autre forme de prestation scénique. L'année dernière, leur concert à Hyde Park, à Londres, a été retransmis dans 80 salles de cinéma françaises. En juillet, l'Olympia, la mythique salle parisienne, propose de visionner un live enregistré au Texas en 1974. Certes, ce n'est pas du live, mais pour Joseph, qui a assisté à l'une de ces diffusions, "la musique des Stones se danse. On apprécie même mieux le jeu de Keith Richards si l'on voit Mick Jagger qui s'agite à côté." C'était comment ? "De la folie."
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