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"Avec la couture, tu écris ton histoire" : Christophe Josse décrypte son défilé couture automne-hiver 2019-20

Créateur d’une esthétique à la délicate élégance, sensuelle et aérienne, Christophe Josse prône une simplicité étudiée. Les contrastes de matières définissent son style à la silhouette féminine et romantique. 

Article rédigé par Corinne Jeammet
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 7min
Le couturier Christophe Josse dans son atelier parisien le 14 juin 2019 (CORINNE JEAMMET)

Moins de 15 jours avant son défilé couture automne-hiver 2019, nous avons rencontré Christophe Josse dans son atelier parisien. Serein, ce chantre de l'élégance poétique a évoqué sa collection qui a défilé au premier jour de la semaine de la haute couture parisienne, le 30 juin 2019. 

Après des études d’histoire de l’art, il rejoint le studio de la maison Torrente, qu’il quitte après une collaboration de quinze années. En 2005, il présente sa première collection couture et crée l'année suivante sa maison. Membre permanent de la chambre syndicale de la haute couture dès 2011, il enrichit, ensuite, son univers d’une ligne de prêt-à-porter. En 2018, il réintègre la semaine de la haute couture qu'il avait quitté en 2014 et y défile depuis en tant que membre invité.

Franceinfo Culture : Dans quel état d'esprit êtes-vous à quinze jours du défilé ?

Christophe Josse : Je suis serein, avec une envie de parfaire, une quête d'absolu et d'excellence. Une collection, c'est à chaque fois une aventure nouvelle, une vibration intérieure. Tu es vivant ! La couture, rien n'est écrit à l'avance. Tu écris ton histoire. 

Le couturier Christophe Josse dans son atelier parisien le 14 juin 2019 (CORINNE JEAMMET)

Quel est le thème de la collection automne-hiver 2019-20 ?

Pour moi le luxe, c'est prendre le temps d'aller jusqu'au bout. C'est aussi un besoin de s'évader, d'aborder des rivages oniriques pour des robes dans lesquelles les femmes peuvent s'incarner. C'est une respiration autre que celle de la rueCette envie de séduction, ca dynamise. C'est un besoin de construire une histoire avec les artisans, paruriers, plumassiers, toutes ces personnes qui subliment la haute couture. J'enrichis mon propos et mon savoir grâce à eux. Sans eux c'est difficile de faire de la haute couture ! 

"Avec la couture, tu écris ton histoire" : rencontre avec Christophe Josse et explications de son défilé couture hiver 2019 (FRANCOIS GUILLOT / AFP)

A quels artisans avez-vous fait appel ?

J'ai besoin du travail avec les artisans pour construire une histoire. C'est une évidence, j'ai besoin d'eux pour traduire ce que j'ai à raconter. Leur savoir est précieux pour moi. Pour cette collection, j'ai travaillé avec des brodeurs qui ont des savoir-faire propres, des particularités. Les travaux de broderie sont réalisés avec Cécile Henri Atelier et Corinne Bizet, les tricots avec Marie-Noëlle Bayard, les bonnets en feutre avec Mariam Partskhaladze, les peintures sur tissus sont de Petra Tlapova, le travail de la plume sur les sandales est d'Eric Charles-Donatien, les boutons et les bijoux sont réalisés Maktar et Brigitte Bonave. C'est elle qui a soufflé le verre des boucles d'oreilles. 

Sandales réalisées pour le défilé couture de Christophe Josse automne-hiver 2019 à Paris avec le travail de plumes signés Eric Charles-Donatien (CORINNE JEAMMET)

D'où vient votre inspiration ? 

Elle vient d'une pinacothèque que j'ai dans la tête : j'y puise, de saisons en saisons, des références qui me touchent et qui sont récurrentes. Mes inspirations sont multiples : elles proviennent, par exemple, d'un tableau vu dans une salle de ventes aux enchères, du détail d'un miroir qui m'emporte vers l'idée d'une broderie, d'une photo d'une page de magazine, d'une rencontre avec une matière que je vais détourner.... C'est un acquis culturel de ce que je suis : je me raconte dans ma collection à travers ma sensibilité. Au fils du temps, l'oeil perçoit les choses différemment et la construction de la collection évolue pour aboutir à une sorte de roman, dont chaque collection est un chapitre. Le chapitre de l'automne-hiver 2019 s'inscrit dans la continuité de celle de la saison précédente... avec plus de légèreté, plus de notes aériennes, arachnéennes, plus de volupté aussi !

Défilé Christophe Josse couture automne-hiver 2019-20 lors de la semaine de la mode parisienne, le 30 juin 2019 (IAN LANGSDON / EPA)

Combien de silhouettes défilent ?

C'est un puzzle d'inspirations différentes qui font un tout. Les silhouettes sont inspirées de quelque chose d'authentique, elles sont épurées sans être minimalistes. L'utilisation de matériaux plus rustiques, apportant une perception plus dense, est contrebalancée par des matériaux plus légers comme les organdis. Mais parfois une matière brute cache une préciosité... de loin on ne se rend pas compte qu'en réalité, c'est de la soie ! Mes silhouettes sont dynamiques, empreintes d'un certain romantisme. Les robes sont travaillées avec des broderies. Il n'y pas besoin de surenchère du côté des accessoires. Je propose uniquement des chaussures, un bonnet et des bijoux. 

Défilé Christophe Josse couture automne-hiver 2019-20 lors de la semaine de la mode parisienne, le 30 juin 2019 (GENEVIEVE FRADET/JEAN LOUIS COULOMBEL)

Il y a une quinzaine de modèles : robe en voile de laine, caban en velours, sweat à capuche brodée de plumes, jupe paysanne en résille de lin... Pour le final du show, il n'y a pas de mariée : pendant de nombreuses années j'ai fait défiler une robe de mariée mais là je n'en ressentais pas l'envie. Certaines robes de la collection peuvent s'envisager comme une robe de mariée simplement en changeant des petites choses car les filles d'aujourd'hui cherchent des robes de mariées différentes. 

Défilé Christophe Josse couture automne-hiver 2019-20 lors de la semaine de la mode parisienne, le 30 juin 2019 (GENEVIEVE FRADET/JEAN LOUIS COULOMBEL)

Poursuivez-vous votre exploration des blancs ?

Oui, la palette est composée d'ivoire, de blanc, de beige mais aussi de vert bouteille profond, de beige mordoré, de chocolat ébène dense et d'or vieilli. Il n'y a pas de noir. Les contrastes de blancs offrent une palette infinie avec laquelle on peut jouer de la même façon qu'avec les noirs. La sérénité de ces blancs, cela devient comme une évidence, de l'ordre de quelque chose qui n'a rien d'ordinaire : on ne porte pas de la même façon un vêtement de couleur blanche qu'un vêtement d'une autre couleur. Il y a dans le blanc quelque chose de lumineux, de féminin, plus en retenue, plus raffiné. La gamme naturelle donne une force accrue.

Défilé Christophe Josse couture automne-hiver 2019-20 lors de la semaine de la mode parisienne, le 30 juin 2019 (IAN LANGSDON / EPA)

Quelles matières privilégiez-vous ?

C'est un travail autour de la broderie, de la résille et d'un tressage aérien et léger. Les matières sont rebrodées avec de la laine, pour donner de la grâce et de la fragilité à la silhouette qui semble comme un peu floutée. J'adore aussi le satin cuir glacé ainsi qu'une espèce de nid d'abeille organdi crêponné qui offre gonflant et légèreté.

Détail d'un travail de broderie pour la collection couture automnhe-hiver 2019 de Christophe Josse, à Paris, le 14 juin 2019  (CORINNE JEAMMET)

J'aime faire appel à des matières qui ont déjà été portées, qui ont un vécu : c'est le cas des dentelles... une espèce de vie intérieure leur donne un supplément d'âme. Il y a des mains qui les ont travaillé : on retrouve dans les dentelles anciennes un travail que tu ne retrouves plus aujourd'hui : ce sont des points uniques. C'est ça la couture, quelque chose d'unique !  

Détail d'un travail de broderie pour la collection couture automnhe-hiver 2019 de Christophe Josse, à Paris, le 14 juin 2019  (CORINNE JEAMMET)

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