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Manish Arora ou la mondialisation heureuse

Assister, en profane de la mode, à un défilé de prêt-à-porter féminin, au Palais de Tokyo, à Paris. Et pas n’importe quel défilé : celui du créateur indien Manish Arora, des plus inventifs et colorés. Une expérience. L’avant-scène : l’attente interminable mais indispensable. Et le défilé, blitz-show qui tient ses promesses : guerre à la grisaille et au temps qui passe. Top chrono. Récit.
Article rédigé par Lorenzo Ciavarini Azzi
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Manish Arora p-à-p ah 2014-2015, à Paris
 (Lorenzo Ciavarini Azzi/Culturebox)

Journée de pluie parisienne. Monumental, le Palais de Tokyo et ses façades gris clair, tristes. Pas mieux à l’intérieur, gris foncé. Être en avance est conseillé, le défilé est couru et les places sont chères. Très vite, séparation obligatoire, d’un côté les spectateurs qui seront assis, avec places numérotées, aussitôt invités à entrer, presse spécialisée et gens du métier. Look : sans ostentation, simplicité sombre, de préférence.

Un défilé, ça se mérite

De l’autre, les « standing » (qui restent debout), la foule, de plus en plus compacte. Tous invités, quelques têtes connues, carton à la main, mais ce n’est pas le même. L’attente, c’est ce qui fait la différence. L’avant-show est interminable mais indispensable pour goûter au spectacle. L’apparence est plus recherchée, pour faire comme si, le profil est très jeune, chez les femmes le très haut talon aiguille sur tiges longilignes généralisé. Une heure passera au total, le défilé lui, ne durera pas dix minutes. Les spectateurs debout ont néanmoins l’avantage d’une vue sur l’ensemble du parcours, ce que n’ont pas les privilégiés (mais qui voient de très près les vêtements) assis cuisse contre cuisse, cantonnés à un virage ou à un autre segment du circuit. Et tels les bolides de F1, les mannequins tracent. Le temps file.

Manish Arora p-à-p ah 2014-2015
 (Lorenzo Ciavarini Azzi/Culturebox)
Bonbons acidulés

La musique la première annonce le départ : grosse caisse et rythmique ethnique, mélodies géographiquement non identifiées d’un groupe de fusion électro de qualité, pourtant clairement indien : Tapan Raj. Défilent enfin les silhouettes de la collection automne-hiver 2014-2015 de Manish Arora, droites et dignes, portant sur leurs épaules, et jusqu’à leur peau, la mondialisation heureuse : visages occidentaux ou asiatiques, motifs andins, indiens, imprimés fantaisie, bijoux ethniques sur coiffe ou ornant les mains ; invitation au voyage et au bonheur, au diable la crise de notre vieille Europe !
Manish Arora p-à-p ah 2014-2015. 
 (Lorenzo Ciavarini Azzi/Culturebox)
Les flashes crépitent, cela va de soi, et ajoutent à la magie d’un moment de gaîté. D’ailleurs, la gravité des visages des mannequins contraste fortement avec le ton hyper ludique de la collection et du spectacle : gourmandises assumées et affichées sur les imprimés – cupcakes, crèmes glacées, sucettes et autres bonbons acidulés. Et ces curiosités particulièrement appréciées, en guise de couvre-chefs : des capuches, des protège-oreilles, des couronnes, des chapeaux ornés de lunes (ou croissants) ou de pompons à leur tour ponctués d’une feuille penchée. La débauche de couleurs (le rose et la rayure rouge et blanc ayant la palme) et de propositions stylistiques en tout genre est un vrai défi à l’imagination.

Fourmis

Mais le bonheur est de courte durée. Au même rythme effréné, après deux derniers tours de piste des mannequins multicolores (l’un éclairé, l’autre dans le noir de manière à voir les LED cousus dans les vêtements !), la vie normale reprend ses droits. Fourmis, les invités de première classe et les standing libèrent le bel espace du Palais de Tokyo. C’est fini. Ainsi va le rythme des collections.
Le défilé est terminé.
 (Lorenzo Ciavarini Azzi/Culturebox)

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