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Cristóbal Balenciaga : une passion pour l'élégante dentelle

Article rédigé par Corinne Jeammet
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
La Cité de la dentelle et de la mode à Calais consacre une exposition à Cristóbal Balenciaga pour les 120 ans de sa naissance. Elle aborde un sujet inédit : son oeuvre en dentelle. Avec 75 tenues, des accessoires (chapeaux, gants, souliers) ainsi que des photographies et des croquis d’atelier, elle offre un panorama de la création du couturier espagnol. A découvrir à partir du 18 avril 2015.

Henry Clarke / Corbis Modèle conservé à la Cité de la dentelle et de la mode à Calais

Exposition "Balenciaga, magicien de la dentelle" du 18 avril au 31 août 2015. Cité de la dentelle et de la mode. 135, quai du Commerce. 62100 Calais. Tous les jours, sauf le mardi, de 10h a 18h. www.cite-dentelle.fr
 (Henry Clarke / Corbis Modèle conservé à la Cité de la dentelle et de la mode à Calais)
Aux créations parisiennes s’ajoutent des tenues faites dans ses maisons de couture en Espagne dont les toiles étaient choisies par Balenciaga (1895-1972) dans sa production parisienne. La Cité de la dentelle et de la mode a acquis certaines de ces pièces, fait rare pour un musée français. Montrer cette exposition à Calais, ville dans laquelle a été fabriqué bon nombre des dentelles mécaniques utilisées par le couturier, est pour le musée une façon de rendre hommage à l’industrie dentellière.
 (Henry Clarke / Corbis Modèle conservé à la Cité de la dentelle et de la mode à Calais)
Sont aussi exposés des documents papiers : commandes, factures, croquis d’atelier, ainsi que des fiches destinées aux clientes auxquelles s’ajoutent des photographies de dépôts de modèle, destinées à protéger la création de la contrefaçon. Cet ensemble permet de comprendre le fonctionnement quotidien de la maison de couture. On découvre aussi des tenues faites en Espagne mais dont les prototypes ont été conçus pour les collections parisiennes
 (Henry Clarke / Corbis Modèle conservé à la Cité de la dentelle et de la mode à Calais)
La dentelle, Cristobal Balenciaga l’appréciait. Il l’employa aussi bien en ornementation qu’en textile. Jouant sur les motifs, les couleurs mais aussi sur les utilisations, il a exploré toutes les manières d’employer la dentelle et en a magnifié les caractéristiques. Des blouses aux robes de cocktail, des tuniques aux accessoires, la dentelle est toujours présente dans ses créations, témoignant de l’originalité stylistique du couturier, qui fut aussi souvent à l’origine de l’évolution de la mode au cours des années 1950/1960.
 (Gyenes / Fonds Gyenes / Biblioteca Nacional de España)
Comme l’illustrent des spectaculaires robes du soir, les créations de Balenciaga évoquent le souvenir des robes des Espagnoles peintes par Goya et par Zuolaga ou encore celui des saintes de Zurbaran. Par des vêtements ou accessoires en dentelle comme les écharpes, étoles, capes, boléros, tubes, mantilles et gants-manches, Balenciaga exacerbait la féminité que confèrent toujours les tenues en dentelle.
 (Archives Balenciaga, Paris Modèle conservé à la Cité de la dentelle et de la mode à Calais )
Cette exposition rappelle aussi le nom des fabricants de dentelle tels Marescot, Dognin, Brivet et permet de redécouvrir des matériaux oubliés comme la dentelle de laine ou des techniques telles les crêponnées. Comme le montrent aussi des échantillons de dentelle, les motifs étaient peints a la main, ou rebrodes par des maisons telles que Lesage et Rebe. Quant aux tulles, dentelles sans motifs, ils pouvaient être brodes, imitant les points d’Angleterre, ou ornés de rubans de gazar simulant les dessins de la dentelle.
 (Photo et modèle conservés dans les Archives Balenciaga à Paris )
Tout au long de sa carrière, le couturier manifeste une grande passion pour ce matériau. Réunissant des vêtements de haute couture, cette exposition propose trois niveaux de lecture : le premier est en relation avec l’histoire sociale, le second avec la mode et le dernier avec les techniques de création tant de la dentelle que de la maison de couture. Née à la Renaissance en Italie ainsi que dans les Flandres, la dentelle s’est répandue dans toute l’Europe au cours des XVIe et XVIIe siecles. Apres s’être mécanisée puis démocratisée au XIXe siècle, la dentelle et le tulle connaissent un grand succès après la Seconde Guerre mondiale auprès des grands couturiers et de Balenciaga.
 (Archives Balenciaga, Paris Modèle conservé à la Cité de la dentelle et de la mode à Calais)
A une époque ou les exigences sociales scandent la vie des classes fortunées mais commencent néanmoins à se brouiller, sont précisés les tenues ornées de dentelle portées selon les heures du jour et les occasions qui, tel le mariage, incitent a s’en revêtir. Présente du matin au soir, elle est discrète sur un tailleur du matin et spectaculaire sur les robes du soir. C’est à partir de la fin de l’après-midi et en particulier le cocktail que la dentelle se taille une place de choix. Sont exposés des ensembles, robes/manteaux, robes/capes, robes/vestes ou la robe est la pièce maitresse. On en voit en dentelle de couleurs, alors que d’autres sont noires. Le soir, triomphent les robes courtes ou longues. Balenciaga, se souvenant des tenues à transformation des années 1920, en imagine de nouvelles dont celle dont l’écharpe cache le décolleté, alors adaptée au cocktail puis, l’écharpe ôtée, la robe, dénudant les épaules, répond aux exigences du soir. Retenons aussi une tenue du soir courte : sa sur-jupe devient cape permettant à l’élégante de sortir dans le froid. Le grand soir est représenté par des robes de gala comme celle en tulle dont la broderie est si compacte que le réseau disparait sous l’amoncellement du jais.
 (Photo et modèle conservés dans les Archives Balenciaga à Paris)
Avant la révolution des années 1960, la production de Balenciaga est d’une grande modernité. Il offre des 1957 à sa clientèle internationale des modèles traduits en dentelle comme les robes sac et baby doll, qui répondent à ce nouveau besoin : paraitre jeune. Couturier européen, anglais par sa formation de tailleur puis français grâce à sa connaissance de la haute couture parisienne, il a assimilé l’essence de chaque mode qu’elle soit européenne ou exotique, contemporaine ou ancienne sans oublier les portraits anciens. Ici, deux sources sont mises en valeur, l’espagnole et la française. Des portraits de Goya, Balenciaga reprend le léger dépassement de la dentelle en bordure des tenues ou encore les ceintures roses à demi cachées par les manteaux et de Zurbaran, les jupes sculptées des représentations de saintes. Il traduit cet effet en gazar qu’il taille pour des robes à taille basculée. Son originalité tient aussi à la façon dont il souligne la transparence et la légèreté de la dentelle. Ainsi manches et plastrons jouent avec la peau. Cousus sous les volants des jupes, des rubans de crin rigidifiant les volants les détachent du fond en un volume gracieux. Parfois au contraire, il emploie une dentelle à larges motifs rebrodés, qui, en perdant sa transparence, rappelle la dentelle dite Duchesse prisée a la fin du XIXe siècle. Le couturier accompagne souvent ses robes d’écharpes en dentelle, qui cachent à demi les épaules de ses clientes ; cependant, pour libérer leurs mains, il les coud au corsage de la robe.
 (Photo et modèle conservés dans les Archives Balenciaga à Paris  )
C’est à Calais, Lyon et Caudry que se fournissent les couturiers actifs à Paris. Balenciaga utilise la dentelle pour sa production tant à Paris qu’à Saint-Sébastien, Madrid et Barcelone. Pendant plus de 20 ans, de l’après guerre à la fermeture de ses maisons en 1968, les clientes, Parisiennes mais aussi Européennes et Américaines, sont revêtues de dentelle de Calais. Les matériaux fournis alors par les dentelliers se sont renouvelés mais bien plus dans leurs fils, artificiels ou synthétiques - la soie est rare - que dans leurs motifs souvent traditionnels. Les XVIIIe et XIXe siècles ont fourni des modèles comme les pivoines et les grenades mais aussi les roses inspirées des dentelles Chantilly. Au cours des années 1950, les dentelles sont peintes a la main, brodées de fils de couleur, de cordonnets ou de fins rubans, de strass et de perles, et parfois de paille et de raphia. Au cours de la décennie suivante, les éléments en plastique de couleurs vives se multiplient. Quant aux tulles, Balenciaga aime les orner de rubans d’organza qui leur confèrent un effet mousseux
 (Florian Kleinefenn. Modèle conservé à la Cité de la dentelle et de la mode à Calais)

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