Combien de temps la marque Dior peut-elle se passer d'un couturier ?
Fin septembre 2011, lors de la Fashion Week, le PDG de Dior Couture plaidait la patience. La quête du successeur "se fait à un rythme normal", expliquait Sidney Toledano, même si c'est difficile à entendre dans "une société qui veut des choses immédiates". En octobre 2011, le groupe annonçait un C.A. de 705 millions d'euros sur les neuf premiers mois de 2011, soit 21% de plus que la même période en 2010. Et les ventes au détail progressaient de 27%.
La vidéo montrant le couturier attablé ivre mort dans un café et invectivant ses voisins, qui a fait le tour du monde sur internet, n'est pas parvenue à éclabousser la marque. La mise à distance rapide -condamnation de ses propos et mise à pied- aura limité les dégâts.
Depuis Bill Gaytten assure le relais
Depuis bientôt un an, ce sont les équipes de création, menées par Bill Gaytten, l'ancien assistant du Britannique, qui se chargent des différentes collections, en insistant sur les "codes" identitaires de la maison. Galliano n'est certes plus là mais il reste encore "tout ce qu'il a insufflé et mis en place en termes de produits, d'image, de direction artistique générale", fait valoir l'historienne de la mode Lydia Kamitsis, interrogée par l'AFP.
Selon plusieurs experts, la nécessité d'un D.A, surtout pour une maison qui fait de la haute couture, ne va tarder pas à se faire sentir. En témoigne l'exemple de Chanel, qui a fait du surplace, tout en continuant à très bien vendre ses tailleurs, entre la mort de Mademoiselle en 1971 et l'arrivée de Karl Lagerfeld 12 ans plus tard. "L'absence d'un créateur peut ne pas peser pendant une saison ou deux. Mais la limite, c'est qu'il faut qu'une marque soit régulièrement remise au goût du jour, actualisée", commente le spécialiste du luxe Serge Carreira, maître de conférences à Sciences-Po. Pour le moment, si Dior s'en tire si bien, selon lui, c'est que la maison récolte "les fruits d'un repositionnement considérable depuis le milieu des années 2000", en valorisant son patrimoine et en se développant considérablement à l'international, notamment en Chine. "Une dynamique enclenchée bien avant le départ de Galliano", insiste-t-il. Le succès du sac Lady Dior et du parfum J'adore, l'un des plus vendus au monde, "montre que la marque a un moteur", juge-t-il.
Les égéries font parler de la marque Dior
Patricia Romatet, de l'Institut français de la mode, estime que la force de Dior tient aussi à sa multiplicité, citant la "somme de ses égéries" : Charlize Theron qui campe "l'ultra-féminité glamour", Natalie Portman une "féminité plus consensuelle", Marion Cotillard "la Française sophistiquée, très classe" ou la jeunesse avec l'Américaine Mila Kunis. Cette multiciplité, qui se reflète dans l'offre, révèle, en l'absence d'un couturier, le talent de nombreux "créateurs de l'ombre, très pros, qui assurent une belle activité à l'entreprise", ajoute Patricia Romatet.
Quel successeur ?
L'intérim actuel renforce paradoxalement la marque. "Cet espace de respiration pourrait même lui permettre de rebondir sur un autre axe, de partir d'une page plus banche", suggère-t-elle.
Actuellement, c'est le Belge Raf Simons, connu pour une mode exigeante, volontiers avant-gardiste, qui est favori pour succéder à John Galliano, indiquait la presse spécialisée en décembre 2011. Mais à la rentrée 2011, une autre rumeur courrait sur l'Américain Marc Jacobs, actuellement à la tête de sa propre griffe et de Vuitton (LVMH). Un effet d'annonce est espéré le 23 janvier 2012, jour du défilé haute couture de la maison Dior.
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