Murakami : les lecteurs japonais se jettent sur ses dernières nouvelles
Ils se sont levés tôt pour être les premiers à acheter "Onna no inai otokotachi" (Les hommes qui n'ont pas de femmes), le dernier recueil du romancier star japonais Haruki Murakami. "Beaucoup de clients sont venus dès ce matin, avant d'aller au bureau ou en prenant une pause", assure un reponsable de la librairie Book 1st du quartier commerçant de Ginza à Tokyo. "Je vais moi aussi bien sûr l'acheter dès aujourd'hui", renchérit une de ses collègues.
Bénéficiant d'un premier tirage de 300.000 exemplaires et d'une place de premier choix dans toutes les librairies, cette nouvelle compilation d'histoires courtes intitulée "Onna no inai otokotachi" (les hommes qui n'ont pas de femme) était aussi attendue qu'un nouveau roman. Régulièrement, les vendeurs rappellent l'événement au micro: "aujourd'hui est sorti le nouvel ouvrage de Haruki Murakami, son premier recueil de nouvelles en neuf ans".
Même s'il n'est pas totalement inédit puisque cinq des six nouvelles qu'il contient ont déjà été publiées en feuilleton dans des revues, les lecteurs fidèles étaient au rendez-vous. Certains avaient réservé leur exemplaire depuis mi-mars. Des enseignes ont ouvert spécialement à minuit. "C'est tellement rare que les gens fassent la queue pour un livre, j'étais impatiente de voir cela", s'est réjouie une acheteuse de la première heure, Yuka Sugimoto.
Tout nouveau titre de Murakami se hisse généralement en tête des ventes dans l'archipel. Ce fut le cas pour son dernier gros roman, "L'incolore Tazaki Tsukuru et ses années de pèlerinage", sorti il y a un an et qui a été n°1 des ventes de livres en 2013, selon le palmarès établi par la société Oricon. "Murakami est plus connu pour ses romans-fleuves, mais lire ses nouvelles offre un plaisir différent", témoigne Yoichi Shindo, un concepteur de sites Web qui a été l'un des premiers à acheter l'ouvrage.
De la subtilité du titre
Murakami occupe une place à part dans la littérature japonaise. On lui trouve volontiers des liens de parenté avec feu le romancier colombien Gabriel Garcia Marquez, un de ceux que le Japonais cite lorsqu'il analyse sa propre oeuvre. Il est digne du même prix Nobel que son aîné, insistent ses aficionados, une distinction pour laquelle il est pressenti depuis plusieurs années.
Ses oeuvres, où l'absurde le dispute au malaise social de Japonais hors normes, ont été traduites dans une quarantaine de langues. La traduction, justement, elle se joue dès les premiers mots et est une des préoccupations de Murakami. Il le dit dans sa préface. "En entendant le titre de mon livre, beaucoup vont penser à la magnifique nouvelle d'Ernest Hemingway 'Men without Women' (hommes sans femmes)".
Mais le romancier japonais explique ne pas parler d'un monde d'hommes sans femmes, mais d'histoires d'hommes quittés par une femme ou sur le point de l'être. "A partir du moment où j'ai écrit la nouvelle intitulée 'Drive my Car', je ne sais pourquoi j'avais ces mots en tête, 'les hommes qui n'ont pas de femme'. Cette phrase ne me sortait pas de l'esprit, comme une musique dont on n'arrive pas à se défaire".
C'est devenu le titre du recueil, et la raison pour laquelle la nouvelle "Drive my car" (conduire ma voiture) ouvre ce nouvel ouvrage, là encore par une phrase où il est question de la gent féminine: "jusque-là, je suis monté je ne sais combien de fois dans une voiture conduite par une femme..." La suite s'étend sur un peu moins de 300 pages.
Le dernier roman d'Haruki Murakami, "L'incolore Tazaki Tsukuru et ses années de pèlerinage", sorti il y a un peu moins d'un an au Japon classé numéro un des ventes de livres en 2013, sortira en France le 4 septembre aux éditions Belfond.
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