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"Delirium" de Philippe Druillet, itinéraire d'un enfant de collabos devenu star de la BD
Philippe Druillet est un dessinateur culte qui a bouleversé la bande dessinée dans les années 70 avec son univers de science-fiction. Mais si son nom revient en librairie, c’est parce qu’il publie « Delirium » (Ed. Les Arênes), un récit autobiographique où il révèle que ses parents étaient des collabos, fascistes convaincus jusqu’à leurs dernières heures.
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Temps de lecture : 4min
Reportage : F. Griffond, F. Faure, E. Metge – Images : « El meu nome es Druillet – Televisio de Catalunya »
Philippe Druillet est né le 28 juin 1944, le jour même où celui qu’on surnommait « le Goebbels français », à savoir Philippe Henriot, le chef de la Milice, a été assassiné. Et c’est pour rendre hommage à cet homme que Victor Druillet, alors haut responsable de la Milice, prénomma son fils Philipe. De tels débuts pouvaient augurer du pire pour le petit Druillet qui vécut donc jusqu’à ses 15 ans dans un mensonge permanent avant de découvrir la « vérité ».
Commence alors l’autre vie de Philippe Druillet, qui en aura plusieurs, plutôt rock’n’roll d’ailleurs comme il le raconte dans Delirium ». Car le livre n’évoque pas seulement son enfance mais aussi son parcours de dessinateur.
Un pur autodidacte
Le monde de Druillet se construit dès l’enfance, lors des vacances d’été passées dans le Gers où il observe les griffes des moissonneuses-lieuses, les ciels étoilés, puis ce sera la découverte des « Gustave », Doré et Moreau… Autant de visions et de références qui vont construire son imaginaire et son univers, très personnels. Mais si le petit Philippe dessine depuis l’enfance, son premier métier sera pourtant photographe.
Il travaillera pour plusieurs revues tournées vers le cinéma et le fantastique (Midi-Minuit-Fantastique, Famous Monsters). En 1966, il publie « Lone Sloane : le Mystère des Abîmes» chez Losfeld, qui édite alors « Barberella » de Jean-Claude Forest ( un album « déclencheur » pour Druillet). Son héros, un Néo-terrien aux yeux rouges, deviendra un personnage culte de la BD par la suite. Mais le grand tournant pour Druillet fut son arrivée à Pilote en 1968. Le patron alors, c’est Goscinny qui lui dira: «Je ne comprends pas très bien votre travail, mais je sens qu’il y a quelque chose, qu’il y a une valeur». Le graphisme de Philippe Druillet, sa façon de déstructurer les cases et la narration, tout cela va faire de lui le chef de file d’une nouvelle BD, plus « adulte » et tournée vers la science-fiction.
Si bien qu’en 1974, il fonde avec Moebius et Jean-Pierre Dionnet, le magazine Metal-Hurlant et la maison d’édition Les Humanoïdes associés. « Une période de folie » comme la qualifie Druillet, où la création est un « joyeux bordel » où la drogue circule. Philippe Druillet connaîtra une période très noire, à partir de 1975 avec la mort de son épouse, emportée par un cancer. Une douleur qui fera naître « La Nuit », histoire d’une horde sauvage à moto qui a marqué des générations de lecteurs. Il touche le fond, drogues, alcool, tout en s’enfermant pour dessiner. Son univers inspire alors les réalisateurs de cinéma qui le sollicitent mais il passe «complètement à côté ». Il dessinera néanmoins des affiches (notamment « La Guerre du feu » et « Le Nom de la Rose » de JJ Annaud), des machines et des décors pour le 7e art. Mais il créera aussi des opéras, des séries d’animation pour la télé (« Bleu l’Enfant de la Terre » en 1986), des clips (« Excalibur » pour William Sheller). Designer et plasticien, Philippe Druillet a fait partie des tous premiers auteurs de Bande dessinée à avoir une cote dans le monde de l’art.
Alors, s’il a pu ne pas aimer son prénom, Druillet c’est sûr, a su se faire un nom. « Je voulais être un prince ou un mécène. Je suis né fils de collabo ».écrit-il. Certes, mais il a fait mieux que ça : il es devenu une légende vivante du 9e art.
"Delirium" de Philippe Druillet (avec David Alliot) - Editions Les Arênes - 304 pages - 17 euros
Commence alors l’autre vie de Philippe Druillet, qui en aura plusieurs, plutôt rock’n’roll d’ailleurs comme il le raconte dans Delirium ». Car le livre n’évoque pas seulement son enfance mais aussi son parcours de dessinateur.
Un pur autodidacte
Le monde de Druillet se construit dès l’enfance, lors des vacances d’été passées dans le Gers où il observe les griffes des moissonneuses-lieuses, les ciels étoilés, puis ce sera la découverte des « Gustave », Doré et Moreau… Autant de visions et de références qui vont construire son imaginaire et son univers, très personnels. Mais si le petit Philippe dessine depuis l’enfance, son premier métier sera pourtant photographe.
Il travaillera pour plusieurs revues tournées vers le cinéma et le fantastique (Midi-Minuit-Fantastique, Famous Monsters). En 1966, il publie « Lone Sloane : le Mystère des Abîmes» chez Losfeld, qui édite alors « Barberella » de Jean-Claude Forest ( un album « déclencheur » pour Druillet). Son héros, un Néo-terrien aux yeux rouges, deviendra un personnage culte de la BD par la suite. Mais le grand tournant pour Druillet fut son arrivée à Pilote en 1968. Le patron alors, c’est Goscinny qui lui dira: «Je ne comprends pas très bien votre travail, mais je sens qu’il y a quelque chose, qu’il y a une valeur». Le graphisme de Philippe Druillet, sa façon de déstructurer les cases et la narration, tout cela va faire de lui le chef de file d’une nouvelle BD, plus « adulte » et tournée vers la science-fiction.
Si bien qu’en 1974, il fonde avec Moebius et Jean-Pierre Dionnet, le magazine Metal-Hurlant et la maison d’édition Les Humanoïdes associés. « Une période de folie » comme la qualifie Druillet, où la création est un « joyeux bordel » où la drogue circule. Philippe Druillet connaîtra une période très noire, à partir de 1975 avec la mort de son épouse, emportée par un cancer. Une douleur qui fera naître « La Nuit », histoire d’une horde sauvage à moto qui a marqué des générations de lecteurs. Il touche le fond, drogues, alcool, tout en s’enfermant pour dessiner. Son univers inspire alors les réalisateurs de cinéma qui le sollicitent mais il passe «complètement à côté ». Il dessinera néanmoins des affiches (notamment « La Guerre du feu » et « Le Nom de la Rose » de JJ Annaud), des machines et des décors pour le 7e art. Mais il créera aussi des opéras, des séries d’animation pour la télé (« Bleu l’Enfant de la Terre » en 1986), des clips (« Excalibur » pour William Sheller). Designer et plasticien, Philippe Druillet a fait partie des tous premiers auteurs de Bande dessinée à avoir une cote dans le monde de l’art.
Alors, s’il a pu ne pas aimer son prénom, Druillet c’est sûr, a su se faire un nom. « Je voulais être un prince ou un mécène. Je suis né fils de collabo ».écrit-il. Certes, mais il a fait mieux que ça : il es devenu une légende vivante du 9e art.
"Delirium" de Philippe Druillet (avec David Alliot) - Editions Les Arênes - 304 pages - 17 euros
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