"L'Œil de la perdrix" : le vibrant roman de Christian Astolfi sur la sororité entre une Corse et une Algérienne

Christian Astolfi livre un roman d'une humanité précieuse, une histoire poignante sur l'amitié entre Rose et Farida, deux femmes déracinées qui apprendront à se connaître, à se rapprocher. Bouleversant.
Article rédigé par Mohamed Berkani
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié
Temps de lecture : 2min
Portrait de l'écrivain Christian Astolfi, auteur de "L'Œil de la perdrix". (GEOFFROY MATHIEU)

Les gens normaux sont exceptionnels. Rose et Farida sont des personnages qui habiteront cette rentrée littéraire. Deux femmes, deux déracinées, deux exilées. Rose, mère à 16 ans, a quitté sa Corse natale pour Toulon, à la recherche d'une vie meilleure. Farida a rejoint son mari, laissant derrière elle Ghardaïa.

Nous sommes dans les années 1950. La Seconde Guerre mondiale commence à s'éloigner, remplacée par la guerre d'Algérie, pudiquement appelée "les événements". Rien ne prédestinait Rose et Farida à se rapprocher, tant elles sont séparées par leurs origines géographiques, leurs appartenances sociales (la première vit dans une petite maison, la seconde dans un bidonville insalubre) et leurs différences culturelles. "Les premiers mois, Farida refusait que je pénètre dans le bidonville. Elle s'en défendait maladroitement : 'Il n'y a rien de bon pour toi là-dedans'. Écartait toute discussion. Comme si elle voulait me préserver de je ne sais quelle maladie transmissible."

Jamais sans ma sœur

Tous les obstacles volent en éclats, dynamités par une amitié naissante. Le lien précieux, rare, qui unit ces deux femmes est d'une force tranquille incroyable. Toutes deux cherchent à s'émanciper, à déjouer la fatalité. Une détermination à faire plier le destin pour qu'il réponde à leurs désirs de liberté. Grâce à une écriture simple, sans fioritures, l'auteur de De notre monde emporté narre une histoire bouleversante.

On voit Rose et Farida évoluer, rire, s'affirmer, devenir complices jusqu'à partager un langage sans mots. Car tous les mots ne sont pas dits, Christian Astolfi sait instaurer des silences éloquents dans sa narration. "Nous rentrons alors en silence, l'une derrière l'autre, jusqu'à ce que la mer nous tourne soudain le dos, au bout du sentier, retrouver nos existences intactes – Farida dans une vie d'exilée entre ses murs de carton-pâte, et moi cet entre-soi mâtiné de gris avec Paul-Dominique."

Quelque part, l'œil de la perdrix, tatouage en forme de losange "dont chaque extrémité renflée ressemblait à une croix", veillait sur ces dames au grand cœur qui ont tout affronté sans jamais se résigner. L'Œil de la perdrix, un roman bouleversant sur l'altérité, la sororité et l'émancipation. Un roman plein d'humanité sur deux héroïnes extraordinairement ordinaires.

"L'Œil de la perdrix", Christian Astolfi, éditions Le Bruit du monde, 21 euros

Couverture du livre "L'Œil de la perdrix" de Christian Astolfi. (LE BRUIT DU MONDE)

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