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Interview
Alain Rey : "La langue française est menacée par le californisme"
Le linguiste Alain Rey propose une nouvelle édition de son Dictionnaire Historique de la Langue Française. Il était ce mercredi l’invité du 13h de France 2. Cet amoureux de la langue française part une nouvelle fois en guerre contre le "californisme".
Article rédigé par franceinfo
- franceinfo Culture (avec AFP)
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Temps de lecture : 3min
"Le français est menacé de l'intérieur par l'invasion du "californisme", version moderne de l'anglicisme!". Quand il s'agit de défendre la langue française, le lexicographe Alain Rey qui publie une nouvelle édition de son Dictionnaire historique de la langue française, est toujours aussi virulent. A 88 ans, le linguiste aux longs cheveux blancs n'a rien perdu de sa fougue. Les mots empruntés à l'anglais comme "spoiler" ou "burn out" ne font pas le poids face à l'érudition et à l'humour qu'Alain Rey déploie dans ce dictionnaire historique et étymologique, en deux volumes, publié par Le Robert.
Une nouvelle édition qui montre l'inutilité de l'anglicisme
Ce dictionnaire qui compte près de 3.000 pages se lit (presque) comme un roman. Publié une première fois en 1992, il a été profondément remanié, avec 200 pages supplémentaires et 10.000 mots nouveaux dont pas mal d'anglicismes qu'Alain Rey se fait un plaisir d'"écrapoutir", mot hélas peu usité qui signifie "mettre en bouillie". Ainsi le mot "spoiler". Le linguiste lui règle son compte en quelques lignes. "En technique, rappelle-t-il, le nom désigne la surface mobile diminuant la portance d'une aile d'un avion, le dispositif ralentisseur des pâles d'éolienne et un aileron sur une voiture automobile". Pour le reste,"l'abondance des synonymes français disponibles souligne l'inutilité de cet anglicisme", tranche-t-il. D'ailleurs rappelle Alain Rey, l'anglais "to spoil" est un emprunt à l'ancien français"espoillier", du latin "spoliare". En feuilletant son dictionnaire, on apprend aussi que le mot "hashtag" (qu'un francophone pourrait aisément remplacer par "mot-dièse", "mot-clic" ou "croisillon") a pour origine l'ancien français "haché". De là à dire que les anglophones ont pillé le français...
Le français a encore un avenir
Le linguiste polyglotte (il parle l'anglais, l'italien et l'espagnol) sait bien qu'une langue est faite d'emprunts à d'autres langues mais il déplore que cela se fasse aujourd'hui dans un seul sens au profit de l'anglo-américain."Ce n'est pas la seule langue", insiste-t-il avant de rappeler avec jubilation,"qu'il n'y aura jamais autant d'anglicismes en français qu'il n'y a de mots d'origine latine et française en anglais". D'ailleurs Alain Rey n'est pas vraiment inquiet de l'avenir du français. Avec son regard d'historien des mots, il note qu'"il y a eu des temps où le français fut spontanément une langue d'exportation et des temps de rétraction, comme celui que nous vivons". "Mais l'espoir demeure de développer la langue française" grâce à la vigueur de la francophonie notamment en Afrique. "Il y a plus de présence du français qu'on ne le dit", soutient-il. "Le français reste une langue d'expression mondiale".
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