Trois dates-clés de la librairie La Hune, symbole de Saint-Germain-des-Prés vendu par Flammarion
Dans ce quartier du 6e arrondissement de Paris, un symbole culturel va-t-il s'éteindre ? Le groupe Madrigall (Gallimard-Flammarion) cède la librairie La Hune.
Une page se tourne. Mardi 17 février, le jour où la loi Macron mettait l'Assemblée en ébullition, on apprenait qu'un magasin culturel emblématique, ouvert tous les dimanches et situé au cœur du quartier touristique de Saint-Germain-des-Prés, était menacé de fermeture.
Entre Le Flore et Les Deux Magots, la librairie La Hune, fondée en 1949, a longtemps été une halte obligée pour les amoureux des livres, dans le 6e arrondissement. Son déménagement en 2012 rue de l'Abbaye, derrière l'église Saint-Germain-des-Prés, lui a-t-il été fatal ? La Hune fermera ses portes en 2015, affirme Livres Hebdo, tandis que Flammarion annonce être entré en négociation avec des repreneurs qui y maintiendraient "une activité de librairie-galerie".Francetv info revient sur l'histoire d'une librairie mythique.
11950 : le rendez-vous des surréalistes
En 1949, un ancien élève de Gaston Bachelard, Bernard Gheerbrandt, fonde, juste en face du café de Flore fréquenté par Sartre et les existentialistes, la librairie de La Hune au 170, boulevard Saint-Germain.
On trouve sur deux étages, dans la boutique de cet amoureux de littérature contemporaine (et notamment d'Antonin Artaud) décédé en 2010, les romans les plus récents, mais aussi des essais philosophiques élitistes, une belle place faite aux livres d'art et un rayon de poésie fourni. Car La Hune, dans les années 1950, est un des endroits de prédilection du surréaliste André Breton, du dadaïste Tristan Tzara ou de l'inclassable Henri Michaux.
Un lieu privilégié, aussi, par les auteurs du Nouveau roman : à la fin des années 1950 et au début des années 1960, le romancier Alain Robbe-Grillet y réunit le jury du prix de Mai, qui a récompensé en 1958 le Moderato Cantabile de Marguerite Duras. En 1976, Flammarion rachète La Hune. Pour les clients, les conséquences de ce rachat ne se font sentir que plus tard. Jusqu'au déménagement de la librairie en 2012, on y croise des écrivains venus des maisons d'édition toutes proches, Gallimard, Grasset, Minuit ou Le Seuil.
22012 : un déménagement fatal
Il y a trois ans, comme l'indiquait le site ActuaLitté, le groupe Madrigall (né du rachat de Flammarion par Gallimard en 2012), propriétaire de La Hune, cédait ses locaux au 170, boulevard Saint-Germain à Louis Vuitton. Mais, assurait Flammarion, la librairie ne perdrait rien en se déplaçant cent mètres plus loin au 18, rue de l'Abbaye. La maison d'édition évoquait alors "un investissement important", par lequel elle souhaitait redonner un nouvel "élan à la librairie, développer son chiffre d'affaires et sa rentabilité, redevenir la librairie en référence de Saint-Germain-des-Prés".
Ces dizaines de mètres semblent pourtant lui avoir été fatals. En retrait de la foule passante du boulevard, la librairie n'a plus jamais retrouvé sa clientèle. Marianne notait d'ailleurs en 2013 qu'en raison du prix de l'immobilier "le luxe gagne, librairie par librairie, les beaux emplacements".
32015 : la fermeture annoncée
"Lors d’un comité d’entreprise extraordinaire tenu le 13 février, les salariés de La Hune ont été informés de la fermeture de leur librairie courant 2015", indique Livres Hebdo. Le magazine professionnel des libraires ajoute que la librairie devrait être remplacée par un magasin de la chaîne Yellow Corner (vente de photos). Selon l'AFP, les salariés seraient intégrés dans une autre librairie du groupe au Centre Pompidou.
Joint par francetv info, Olivier Place, directeur des librairies chez Flammarion, confirme que le magasin, qui emploie actuellement une dizaine de salariés, fermera en 2015. Pour le reste, il "n'a pas de commentaires à faire".
Flammarion a indiqué mercredi dans un communiqué que "le groupe Madrigall est entré dans une phase de négociation exclusive avec une société d'édition dans le but de céder la librairie La Hune. Le projet des repreneurs est de maintenir une activité de librairie-galerie, en conservant notamment le nom 'La Hune' qui en a fait son identité depuis 1949, et de développer un projet culturel unique en son genre." Pas d'autres précisions pour l'instant.
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