Décès de l'historienne Suzanne Citron, auteure du "Mythe national"
Le décès de l'historienne a été confirmé par l'historienne proche de Suzanne Citron, Laurence de Cock, sur le site du collectif Aggiornamento histoire-géographie qui rassemble des historiens prônant un renouvellement de l'enseignement de l'histoire et de la géographie du Primaire à l'Université. "Je poserai des mots sur ta disparition quand le temps de la douleur aura laissé un peu de place à celui du souvenir. En attendant, reçois ces mille mercis comme autant de signaux d'impuissance à traduire l'immense perte que représente ton départ, mais aussi l'inestimable richesse que tu laisses à la pensée sur l'histoire et sur l'école", a écrit Laurence de Cock en hommage à son amie.
Née Suzanne Grumbach en 1922, élevée dans le culte de la France dreyfusarde et dans la mémoire de la Grande guerre, elle subit comme un affront la débâcle de juin 1940. Arrêtée par la Gestapo à Lyon, elle est internée à Drancy le 4 juillet 1944 échappant de justesse à la déportation. Elle a raconté cette expérience dans son livre "Mes lignes de démarcation". À la Libération elle fréquentera les milieux chrétiens de gauche autour de Paul Ricoeur et s'intéressa particulièrement à l'anticolonialisme tout en défendant l'Appel de Stockholm contre l'armement atomique.
Suzanne Citron y dénonçait le "repli frileux et craintif d'une identité figée sur un passé légendaire et prétendu unique"
La guerre d'Algérie agira comme un révélateur. L'historienne se met à questionner l'histoire de France telle qu'elle est traditionnellement enseignée depuis la IIIe République. Elle s'interroge sur la façon dont l'histoire de France s'est construite et a été transmise.Ses réflexions aboutiront en 1987 dans son essai "Le mythe national. L'histoire de France revisitée". Ce livre maintes fois réédité peut se lire comme l'anti Ernest Lavisse (le manuel d'histoire de France longtemps en vigueur dans les écoles). Suzanne Citron y dénonçait le "repli frileux et craintif d'une identité figée sur un passé légendaire et prétendu unique".
Durant la dernière campagne présidentielle, Laurence de Cock, invitée à un débat télévisé avec François Fillon, avait offert le livre de Suzanne Citron au candidat de droite qui proposait de privilégier l'enseignement du "récit national" à l'école s'il était élu. Ce geste avait propulsé "Le mythe national" parmi les meilleures ventes.
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