Dalila Kerchouche : "Être une femme dans les services secrets, c'est un véritable atout"
Le livre "Espionnes" sort en librairie mercredi 21 septembre. Son auteure, Dalila Kerchouche, y dresse plusieurs portraits de ces femmes de l'ombre. Elle répond aux questions de franceinfo.
Filatures, écoutes, planques... Pendant une année, la journaliste Dalila Kerchouche a partagé la vie d'espionnes. De cette expérience, cette grand reporter à Madame Figaro publie une galerie de portraits : Espionnes (Flammarion) sort mercredi 21 septembre en librairie.
franceinfo : Qu'est-ce que cela change d'être une femme dans les métiers de l'espionnage ?
Dalila Kerchouche : Cela change surtout dans le fonctionnement des services. On se rend compte que d'avoir des femmes pour composer des faux couples, dans les filatures par exemple, ça donne une plus grande efficacité aux services de renseignement. Être une femme aujourd'hui dans les services secrets, c'est un véritable atout.
Les femmes, aujourd'hui, représentent un agent sur quatre. Mais on revient vraiment de loin. Les pionnières dans les années 1970 et 1980 ont dû réellement jouer des coudes pour s'imposer. Elles ont affronté le machisme de l'espion français qui est assez prégnant et certaines ont eu affaire à des coups bas.
Vous avez rencontré ces femmes pendant un an, notamment en pleine période des attentats de Paris l'année dernière.
J'étais avec elles une semaine après les attentats de Charlie Hebdo, totalement par hasard. Et j'étais également avec elles le jour du 13 novembre (les attentats de Paris, ndlr), avec les espions de la DGSE et de la DGSI. Du coup, elles m'ont raconté quasiment en direct comment elles ont traqué les frères Kouachi et Amedy Coulibaly. Comment elles ont traqué le commando d'Abdelhamid Abaaoud. Encore aujourd'hui, elles déjouent des attentats, elles traquent les terroristes. Elles agissent au cœur des enjeux de sécurité nationale.
Les espionnes font également face au manque de moyens. Il y a une inflation des cibles et les services définissent des priorités. C'est le côté inquiétant ?
À la DGSI, il y a entre 3 000 et 4 000 agents. La moitié est dédiée à la lutte antiterroriste. En face, ils surveillent entre 2 000 et 3 000 cibles. Sachant que pour surveiller une cible, il faut en moyenne 20 agents. Donc évidemment, elles se sont plaintes du manque de moyens et de l'inflation de ce phénomène djihadiste.
Dans votre livre, il y a aussi cette jeune femme qui visionne des vidéos de propagande ou d'attentats toute la journée. Comment font ces femmes pour ne pas être minées par leur métier ?
Oui, c'est Margaux. Elle a 24 ans et toute la journée elle visionne des vidéos de Daech. Elle est confrontée à une violence sans filtre et m'a dit qu'elle avait perdu un peu de son innocence. Les services se sont rendu compte de l'impact psychique de cette violence en image. Du coup ils commencent à mettre en place des soutiens psychologiques et des groupes de parole.
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