Le patrimoine syrien menacé par la guerre
Dans un pays regorgeant de trésors antiques, où la corruption et le trafic de pièces archéologiques était chronique, la généralisation des affrontements, le vide de pouvoir dans certaines régions et le contrôle d'autres par des groupes armés ont provoqué une explosion des pillages et des fouilles illicites.
A Reyhanli, petite ville turque frontalière avec la Syrie, un réfugié syrien récemment arrivé de la fameuse ville antique de Palmyre a affirmé à l'AFP que le musée avait été pillé et que des vols à grande échelle étaient perpétrés sur le site. L'armée syrienne est régulièrement accusée de procéder elle-même aux pillages ou de tolérer ces activités menées par des civils, souvent des bandes de trafiquants bien organisés.
Une vidéo amateur mise en ligne le 17 août montre sept ou huit sculptures, des bustes, entassés à l'arrière d'un pick-up, tandis que des militaires discutent autour du véhicule.
Des soldats de l'armée syrienne dans les ruines de Palmyre :
"Nous avons fait étudier ce qu'ils disent par des Syriens travaillant avec nous: il s'agit bien de soldats et tout nous porte à penser que l'armée vole ou laisse voler des antiquités à Palmyre et ailleurs", assure l'archéologue espagnol Rodrigo Martin.
Ce dernier est le porte-parole d'une équipe d'archéologues syriens et étrangers qui a formé un groupe, "Patrimoine syrien en danger", dont le but est de tenter de surveiller, grâce à un réseau d'informateurs, ce qui se passe sur les sites archéologiques.
Dommages colatéraux et pillages des deux bords
"Des batailles ont eu lieu sur des sites, d'autres sont pillés, ailleurs des permis de creuser sont donnés par l'armée à des bandes en échange de leur complicité dans le conflit", ajoute Rodrigo Martin. "Mais même si nous avons de nombreux contacts, il est difficile de savoir ce qui se passe vraiment. Nous ne découvrirons l'ampleur des dommages qu'après la guerre".
Son organisation a également recueilli des témoignages accusant les groupes rebelles d'avoir recours aux trafics pour se financer. "Nous avons des échos, des rumeurs, mais c'est très difficile à vérifier", dit-il. Dans un article du London Times le 12 septembre, un trafiquant d'antiquités libanais se faisant appeler "Abou Khaled" assurait que les rebelles avaient monté des groupes de fouilleurs clandestins pour financer leur combat. "Les rebelles ont besoin d'armes et les antiquités sont un bon moyen de les acheter", affirmait-il.
Pour l'archéologue britannique Emma Cunliffe, le désastre irakien de 2003 est en train de se répéter: "Regardez les prix des belles pièces aux enchères chez Christie's et Sotheby's. C'est ridicule tellement c'est élevé. Tant qu'il existera une telle demande sur le marché international, les pillages continueront".
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