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L'artiste Anish Kapoor s'offre le noir le plus intense du monde

Anish Kapoor n'est pas partageur. L'artiste britannique a acheté la couleur Vantablack, le noir censé être le plus noir du monde, ce qui lui confère le monopole de son utilisation. Une nouvelle qui fait grincer des dents dans le monde de l'art.
Article rédigé par Anne Lamotte
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
  (L'artiste britannique Anish Kapoor détient maintenant le brevet du Vantablack © Benoit Tessier/Reuters)

On connaissait le bleu Klein. Il y a désormais le noir Kapoor. La grande différence c’est qu’Yves Klein n'a jamais empêché personne de servir du bleu qu’il a créé. L'artiste britannique Anish Kapoor n’est pas habité par le même esprit de partage. Cet habitué des polémiques a acheté le brevet du Vantablack, le noir réputé le plus dense du monde.

Le trou noir, sans ombres ni reliefs

On peut le voir sur le site de Surrey NanoSystems, la société britannique qui l’a inventé et qui le produit depuis deux ans. Ce n’est pas seulement un noir super noir. Cette couleur-là, nous explique-t-on, absorbe 99,96% de la lumière. Résultat : quand on peint une surface avec le Vantablack, fini les ombres, les reliefs, les aspérités, ou encore la 3D. On a l'impression de ne rien voir, le trou noir en quelque sorte.

 

C'est dans le domaine de l'astronomie et de la défense qu'on trouve les premiers clients. Pratique en effet pour camoufler par exemple un avion de chasse. Sauf que dès le départ un certain Anish Kapoor s'intéresse aussi vivement à cette découverte. A l'époque sur la chaîne britannique BBC, l'artiste adepte de la désorientation, s'explique : "Imaginez un espace si sombre qu'en y pénétrant vous pouvez perdre toute idée de qui vous êtes, d'où vous êtes et la conscience du temps ". Il est tellement fasciné que c'est désormais lui qui a le monopole de ce noir intense. 

S'agit-il d'une provocation de plus de l'auteur du vagin de la reine à Versailles? "Je ne pense pas que ça soit fait pour faire parler de lui ", estime Fabrice Bousteau, le directeur de la rédaction de Beaux Arts Magazine . "Il l'a acheté, je pense vraiment, dans l'optique de créer une  œuvre  monumentale ."

"Pas pour faire parler de lui', Fabrice Bousteau, directeur de la rédaction de Beaux Arts Magazine

"Pas juste qu'il appartienne à un seul homme"

Ce n’est pas normal s'insurgent certains de ses collègues, comme Christian Furr, autre artiste britannique, qui avait justement prévu de se servir du fameux Vantablack. "Turner, Manet, Goya… les plus grands ont tous été fascinés par le noir pur ", explique-t-il dans le Daily Mail . "Et ce noir, le Vantablack c'est de la dynamite dans le monde de l'art. Nous devrions tous être en mesure de l'utiliser. Ce n'est pas juste qu'il appartienne à un seul homme. "

Oui mais c'est dans l'ère du temps juge Fabrice Bousteau. "L'art est en phase parfaite avec la société. Les grandes sociétés achètent des brevets à tour de bras pour les insuffler dans leurs créations ." Pour se distinguer, les artistes n'auraient plus d'autre choix selon lui que d'utiliser des innovations tel que le Vantablack, qui parfois peuvent leur coûter très cher. 

"L'art est en phase avec la société", Fabrice Bousteau, directeur de la rédaction de Beaux Arts Magazine
 

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