Hydrogène vert, menus végétariens et porte-monnaie électronique : les festivals de l'été deviennent de nouveaux terrains d'expérimentation
Les festivals se transforment depuis quelques années en des laboratoires, notamment pour des raisons écologiques, ou pour des motifs plus prosaïques, comme limiter la circulation des espèces.
En juin dernier, le festival eco-responsable We Love Green (Bois de Vincennes à Paris) communiquait sur ses menus 100% végétariens visant à réduire davantage son empreinte carbone. Dans la même optique, les festivals choisissent des sources d'énergie plus propres comme l'hydrogène vert. Autre expérience, qui est devenue une tendance lourde ces dernières années dans les festivals, celle d'un monde sans cash. Une option choisie par Le Cabaret Vert (Charleville-Mézières dans les Ardennes), qui s'est achevé le 20 août, ou encore Rock en Seine (Domaine national de Saint-Cloud), qui ouvre ses portes à la fin du mois d'août.
Exit les espèces
Dans la pratique, le Cabaret Vert a sa monnaie : le bayard. Pour l'utliser, les participants reçoivent un bracelet à l'entrée de l'événement qu'ils rechargent à loisir, en espèces à un stand dédié ou avec leur carte bancaire. Ce porte-monnaie électronique, qui comprend également leur billet d'entrée ou leur éventuel accès au camping, est utilisable sans contact aux différents stands et buvettes. C'est l'une des deux technologies qui se font concurrence dans le domaine du "cashless". Outre l'usage d'un porte-monnaie électronique, souvent matérialisé par une carte ou un bracelet, le festivalier peut choisir une application mobile directement liée à une carte bancaire.
Les deux solutions sont proposées à Rock en Seine. "Votre argent est crédité sur un compte associé à votre bracelet, qui vous sert pour toute transaction", peut-on lire sur le site du festival. Ou encore, "l’application Lyf Pay vous permet de payer partout, en toute sécurité et sans devoir précharger votre compte". Frédéric Leclef, directeur général délégué de Lyf, qui propose cette solution de paiement via une application mobile explique pourquoi ces dispositifs "cashless" séduisent de plus en plus les festivals. Ils permettent de "limiter très fortement la circulation du liquide sur le festival" et d'augmenter la "rapidité d'encaissement", confie-t-il à l'AFP.
Outre la sécurité, ces paiements permettent également un meilleur contrôle de l'organisateur sur les rentrées d'argent des bars et autres foodtrucks présents sur le festival, surtout lorsque ceux-ci sont tenus par des prestataires extérieurs qui ont négocié avec l'organisateur un partage de revenus. Selon Frédéric Leclef, les organisateurs de festival constatent une augmentation de leur chiffre d'affaires d'à peu près 10% lorsqu'une solution "cashless" est mise en place, une combinaison de gain de temps mais aussi de transactions "indolores" pour le festivalier, amené à dépenser davantage quand l'argent n'est pas matérialisé.
De plus, l'option porte-monnaie électronique est souvent payante et rares sont les festivaliers qui utilisent la totalité de la somme chargée. Le remboursement est alors plus ou moins complexe : il n'est ouvert qu'un mois pour le Cabaret Vert, et ne se fait que sur une carte bancaire. La seconde option, via une application, n'est pas non plus parfaite car elle dépend de la batterie des téléphones portables des festivaliers et de l'accès au réseau. L'éviction du cash fait tiquer la vénérable Banque de France, qui rappelait en juin via le Comité national des moyens de paiement que les espèces doivent "être acceptées par les commerçants (...) lors de manifestations telles que des festivals ou des manifestations sportives".
Bienvenue à l'hydrogène vert
Avoir une démarche éco-responsable est aujourd'hui plus consensuelle. Plusieurs rassemblements festifs estivaux adoptent l'hydrogène, au lieu du gazole, pour produire d'énormes quantités de watts et de decibels dans des lieux isolés, loin de tout réseau électrique. Dans les Côtes d'Armor à Hillion, en baie de Saint-Brieuc, le festival "Folies en baie" les 6 et 7 août était équipé de générateurs à hydrogène. "Les Eurockéennes" de Belfort aussi début juillet. Dès l'été 2022, le festival Futur 2 à Hambourg en Allemagne s'était vanté d'être le "premier festival au monde" électrifié grâce à de l'hydrogène venu d'énergie éolienne.
La question d'un approvisionnement énergétique plus écologique est l'un des principaux défis auxquels les festivals sont conftontés. D'autant que les générateurs verts sont "quatre fois plus cher" qu'un générateur diesel, indique Thibault Tallien, directeur marketing de la société Eodev Eneria CAT qui produit des générateurs à hydrogène à Montlhéry, au sud de Paris.
Aujourd'hui, "90% de l'événementiel recourt à des groupes électrogènes, il y en a des milliers partout mais ils polluent énormément en rejetant aussi bien du CO2 que du monoxyde de carbone", indique Jérome Bourdel, directeur commercial de GCK Energy – un fabricant et loueur de matériels électriques mobiles traditionnels mais aussi client d'Eodev.
Ce dernier confie à l'AFP "avoir ramé les deux premières années" pour "prouver l'intérêt du concept" des générateurs à hydrogène vert à ses clients "mais dès qu'ils ont testé, ils adoptent" même si la problématique du coût demeure. De fait, 1 kWh d'électricité à partir d'hydrogène revient à 2 euros, contre 30 centimes seulement pour l'électricité du réseau, et 1 à 1,20 euro à partir d'un groupe électrogène classique au fioul. Ainsi, pour que l'engouement soit durable, "le vrai enjeu reste de faire baisser le coût de l'hydrogène vert", souligne-t-il.
Menu veggie pour tous
En juin dernier, pour sa 13e édition, le festival eco-responsable We Love Green a choisi de miser sur un menu 100% végétarien, une option gastronomique singulière pour un festival de cette taille en Europe. Objectif : réduire davantage l’empreinte carbone du festival, la production de viande étant responsable d’environ 15% des gaz à effet de serre dans le monde.
"A We Love Green, tout le monde mange végétarien cette année, même les techniciens qui montent le festival, même les artistes, même la sécu, c’est un truc total", confiait Marie Sabot à Franceinfo Culture. "La bascule en 100% végétarien a demandé beaucoup de travail mais ça a été super intéressant. (...) On s’est demandé comment la gastronomie française va-t-elle évoluer ? Ce que (les experts consultés) disaient, c’est qu’on ne mange de la viande tous les jours que depuis les années 60 en France. Avant, on mangeait principalement des légumes et des légumineuses et le poulet rôti du dimanche était l’exception, et ce depuis des millénaires. Il faudrait revenir à ça". Ainsi, cinquante restaurateurs ont été réunis pour offrir aux festivaliers une offre gastronomique "inventive et très alléchante".
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