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Festival Off d’Avignon 2023 : "Dracula - Lucy’s Dream", variante autour du prince des ténèbres, onirique et féministe

Comme "Alice Versus Caroll", sur "Alice au Pays des merveilles", était dans le In en 2019, ce "Lucy’s Dream", aurait mérité de s'y trouver cette année.
Article rédigé par Jacky Bornet
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
"Dracula Lucy's Dream", de de la compagnie Plexus Solaire, mis en scène par Yngvild Aspeli (2023). (CHRISTOPHE REYNAUD DE LAGE)

Dracula - Lucy’s Dream, de la compagnie Plexus polaire, mis en scène par Yngvild Aspeli, est une pure merveille visuelle et narrative. Consacré à Lucy Westenra, première victime britannique dans le roman de Bram Stoker Dracula, la jeune femme passe de personnage secondaire a celui de premier rôle.

Marionnettiste, Yngvild Aspeli invente et anime des créatures fascinantes, dans un ballet macabre, gothique, sadique et sensuel, au cœur d’un espace multidimensionnel hypnotique. Cette merveille du Off se joue à La Manufacture Patinoire, jusqu’au 24 juillet.

Lucy délivrée

Dans un espace noir se dessine un réseau de lignes blanches mouvantes psychédéliques qui suggèrent une ville gothique, expressionniste. Côté jardin surgit une jeune femme rousse, paniquée, poursuivie et méfiante. Bientôt, elle se mire dans un miroir, où comme l’Alice de Carroll, elle se dédouble, indépendante, puis une troisième les rejoint. Comme les fiancées du conte vampire dans le château carpatique du roman, Lucy est triple. Elle va se soumettre et être la proie d’un Dracula sauvage et possessif, dans un combat lascif et violent jusqu’à un retournement de situation inattendu.

Yngvild Aspeli s’approprie le personnage de Lucy qui, dans le roman, succombe à Dracula dès que le vampire débarque à Whitby, sur la côte orientale britannique. Une fois vampirisée, elle est transpercée d’un pieu et décapitée par le professeur Van Helsing pour libérer son âme. La marionnettiste et autrice va lui réserver un tout autre sort.

Modernité

Lucy est triple : jeunesse, beauté, sexe. On peut y ajouter l’aristocratie, étant représentante d’une haute lignée anglaise. Ce qui la rapproche du conte. En 1897, à la sortie du roman, Lucy est un fantasme. Dracula est un roman qui dénonce le puritanisme hypocrite de la société anglaise victorienne. La mise en scène des rencontres nocturnes avec le vampire, où les costumes et un lit tiennent de décor sont d’une inventivité qui ravive la figure vampirique. Le conte rappelle le Christopher Lee des productions Hammer. Comme Lucy, il a ses clones démultipliés qui décuplent sa soif de sang. Les vampirisations visualisées avec des fils rouges allant de la victime au prédateur sont une des belles trouvailles du spectacle.

Sous le coup de violences faites aux femmes, Lucy devient emblématique de ce sujet sociétal majeur en France et dans le monde. Yngvild Aspeli est fidèle à Stoker et perpétue la modernité d’un roman qui a donné lieu au plus grand nombre d’adaptations, au théâtre, au cinéma et à la télévision, après Sherlock-Holmes. Impossible de révéler le coup de théâtre final qui s’émancipe du roman, ce qui participe d’une des réussites majeures de ce Off 2023.   

Dracula - Lucy’s Dream
De Yngvild Aspeli et la compagnie Plexus Solaire
Interprètes : Yejin Choi, Marina Simonova, Kyra Vandenenden, Sebastian Moya, Dominique Cattani
Du 7 au 24 juillet, 9h30 
La Manufacture
2 bis, rue des écoles, 84000 – Avignon
Salle : Manufacture PATINOIRE
Rendez-vous au 2 rue des Écoles pour un accompagnement jusqu’au départ des navettes, Porte Thiers. L’horaire du spectacle correspond à l’horaire de départ des navettes. La durée du spectacle (2h00) tient compte du transport. La navette est gratuite sur présentation du billet de spectacle.

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