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Des caricaturistes dénoncent l'utilisation de leurs dessins dans un livre de Christine Boutin

Ils ont eu la surprise de découvrir leurs œuvres dans le dernier ouvrage de l'ancienne ministre, paru le 25 février.

Article rédigé par franceinfo
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Christine Boutin, le 5 septembre 2015 à La Baule (Loire-Atlantique).  (JEAN-SEBASTIEN EVRARD / AFP)

"Devant ma télé, je bouillonnais, et immédiatement, mon téléphone s'est enflammé." Le dessinateur Nawak est passablement amer et en colère, lundi 29 février, lorsqu'il évoque le moment où il a découvert, dans le "Grand journal" de Canal+, que l'une de ses caricatures était utilisée pour illustrer Les insolences de Christine Boutin, le dernier livre de l'ancienne ministre. Un ouvrage d'autodérision dans lequel la fondatrice du Parti chrétien-démocrate illustre ses différents billets d'humeur avec des dessins satiriques. Sur le plateau, l'actuelle conseillère générale des Yvelines remercie les caricaturistes "qui ont eu le courage, entre guillemets, d'être dans ce livre". 

Visiblement, tous ne sont pas de cet avis, bien au contraire. D'abord, ils se plaignent de n'avoir pas été payés. Mais plus grave, ils estiment avoir été lésés. Au moins quatre auteurs comme Nawak affirment ne pas avoir été clairement informés par l'éditeur de la finalité du projet lorsqu'ils ont cédé leurs droits, ou même réalisé des dessins spécialement pour cet ouvrage. Sur son blog, l'illustratrice Catoune, dont un des dessins est en couverture, dénonce "Christine Boutin et ses éditeurs (...) qui grillent [sa] crédibilité en tant que dessinatrice indépendante". Sur Twitter, le dessinateur Baudry a posté sa réaction en découvrant l'ouvrage.

"On ne m'a jamais parlé d'un livre signé Boutin"

"On nous a présenté ce projet comme un recueil de caricatures, mais on ne m'a jamais parlé d'un livre signé par Christine Boutin elle-même avec nos dessins servant à étayer ses propos. Si on m'avait présenté les choses de cette manière, j'aurais dit non", déplore lui aussi le caricaturiste Gil, contacté par francetv info.

Même version pour Nawak, qui estime avoir été manipulé par l'éditeur Jacques-Marie Laffont. "Etant jeune dessinateur, j'ai été flatté d'avoir été repéré. Comme j'ai pas mal dessiné durant le débat sur le mariage pour tous pour me moquer de la Manif pour tous, je pensais qu'il s'agissait d'un livre humoristique sur Christine Boutin, pas qu'elle le signerait. Avec ce livre, je suis associé à elle et je passe pour un Mickey." Pour prouver sa bonne foi, il nous a transmis les échanges d'e-mails avec l'éditeur. Le 8 juillet 2015, on lui demande dans un premier temps le tarif pour reprendre une de ses caricatures "dans le cadre d'une publication sur un livre politique illustré". L'auteur demande alors davantage de détails. Dans sa réponse, l'éditeur lui explique qu'il s'agira "d'un recueil de billets d'humeur insolents à propos des politiques en général", sans préciser que le livre sera signé par l'ancienne ministre. 

"Nous n'avons forcé personne"

Contacté par francetv info, l'éditeur Jacques-Marie Laffont estime que tout a été fait dans les règles... ou presque. Concernant le paiement des dessins, il reconnaît bien un retard. "Je leur fais parvenir un versement tout de suite", s'excuse-t-il, rappelant que "la loi impose de payer les dessinateurs avant le jour de la mise en vente" (le 25 février). Sur ce point, Jacques-Marie Laffont conçoit donc que ces auteurs puissent s'énerver.

En revanche, sur le reste, il reste droit dans ses bottes. "Il était bien spécifié dans les documents envoyés qu'il s'agissait d'un livre titré 'Les insolences de Christine Boutin'. Oui, ils étaient au courant de la teneur du livre." Pour lui, "ce qui les gêne, c'est que le livre soit signé de Christine Boutin. Mais nous n'avons forcé personne ! Je persiste et signe : ils n'ont pas été grugés", martèle-t-il, précisant que les documents fournis aux auteurs étaient clairs. Des documents qu'il se dit prêt à nous communiquer, mais dont nous n'avons pas, au moment la publication de cet article, pris connaissance.

Christine Boutin n'était "pas au courant"

L'ancienne ministre et auteure de ce livre était-elle au courant ? Interrogée par Le Figaro dimanche 28 février, elle s'est étonnée de cette polémique, affirmant ne pas "être au courant". Selon elle, "c’est l’éditeur qui s’est chargé de contacter les dessinateurs".

Une version crédible aux yeux des auteurs en colère. "Je pense de plus en plus qu'elle n'est effectivement pas responsable, estime Gil. Même si je n'aime pas ses idées, elle se fait aujourd'hui traiter de voleuse sur les réseaux sociaux, alors qu'elle pensait que nous étions au courant." 

Face à l'ampleur de la polémique, cinq des auteurs envisagent de publier un texte pour dénoncer ce qu'ils considèrent comme une manipulation. Mais pour autant, ils ne veulent pas en faire des tonnes pour rapidement fermer cette parenthèse. "Ce bouquin n'en vaut vraiment pas la peine", conclut Nawak. 

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