Label "fait maison" : six plats passés au crash test
Pour pouvoir apposer ce logo, les restaurateurs devront cuisiner ce qu'ils servent sur place à partir d'ingrédients bruts, non transformés. Pourtant, de nombreuses exceptions existent.
Un petit logo noir et blanc, facilement traçable en un coup de craie sur une ardoise. Le label "fait maison" entre en vigueur, mardi 15 juillet, pour indiquer au consommateur les plats qui ont été confectionnés dans l'établissement dans lequel il s'apprête à se restaurer. Les cuisiniers qui utilisent des aliments et plats déjà transformés ne pourront pas y prétendre.
Mais le décret met en place de nombreuses exceptions. Les légumes pourront être surgelés ou conditionnés sous vide. Les viandes et poissons, congelés ou fumés. Autant de dérogations qui jettent le flou sur l'appellation. "S'il s'agit d'ajouter seulement trois feuilles de ciboulette à un produit reçu en amont surgelé pour avoir l'autorisation d'apposer le label 'fait maison' sur un plat, ce n'est pas normal", explique Laurence Valentin, responsable du restaurant Le Faubourg 34, dans le 9e arrondissement de Paris. Francetv info sort les couverts, et dissèque six classiques de la restauration pour découvrir s'ils pourront facilement obtenir le label.
La bavette frites, sauce béarnaise : non
Un classique de brasserie qui pourrait bien ne pas passer le test. Même si le morceau de bœuf sort tout juste de chez le boucher, c'est du côté de l'accompagnement que les choses risquent de bloquer. Le décret est particulièrement strict sur les plats à base de pommes de terre, qui doivent arriver totalement brutes dans les mains du restaurateur.
Contrairement aux légumes, les pommes de terre épluchées, prédécoupées ou surgelées n'entrent pas dans la case du "fait maison". Les frites surgelées sont donc formellement bannies. "L'idée est d'empêcher que la restauration rapide puisse obtenir le label", explique Hubert Jan, le président de l'Union des métiers et des industries de l'hôtellerie (Umih)-restauration.
Autre limite pour une bavette frites : la sauce béarnaise. Nombreuses sont les brasseries qui servent des sauces industrielles à cause de la complexité des recettes : une heure en moyenne de préparation et une difficile conservation. "Il s'agit d'une émulsion instable comme la vinaigrette, elle ne se garde pas longtemps, estime Hubert Jan. C'est une sauce compliquée, mais elle doit être faite maison, c'est indiscutable."
Les tagliatelles au saumon : oui
Pas besoin que les pâtes soient confectionnées par le restaurateur pour qu'elles soient estampillées "fait maison". Seule règle : elles doivent tout de même être cuites sur place. Le label ne fait donc pas la différence entre le chef qui met les mains dans la farine et celui qui achète ses pâtes toutes faites par sacs de 20 kg.
Le décret prévoit aussi des exceptions pour les produits laitiers et les fromages. La crème fraîche et le parmesan peuvent venir de l'agroalimentaire. Enfin, pour le saumon, le restaurateur peut parfaitement utiliser du poisson fumé industriel. Les chaînes de restauration rapide spécialisées dans les pâtes devraient donc pouvoir prétendre au label.
La quiche lorraine : oui
Là encore, le décret comporte une faille : la pâte feuilletée utilisée dans la quiche peut venir de l'agroalimentaire, contrairement à la pâte brisée. Les deux variantes sont utilisées selon les recettes, mais les adeptes de la deuxième option devront mettre la main à la pâte.
Pas besoin non plus de casser ses œufs soi-même. Le label tolère l'utilisation d'œufs battus vendus en brique. Reste à ajouter les lardons - qui peuvent être surgelés - et à mélanger les différents ingrédients pour estampiller sa quiche "fait maison".
La pizza : oui, sauf si...
Le pizzaïolo doit pétrir sa pâte lui-même. Pour la garniture, le label n'est pas très contraignant. Poivrons, champignons, cœurs d'artichaut en boîtes ou surgelés sont tolérés. De même pour les merguez, pepperoni...
Nota bene : le pizzaïolo ne doit pas utiliser de sauce tomate toute faite, qu'elle soit industrielle ou cuisinée par une grand-mère italienne. Pour confectionner sa sauce, le cuisinier pourra tout de même s'appuyer sur des tomates en conserve, ou en coulis, qui sont prises en compte dans les exceptions.
La crème brûlée : pas sûr
"Beaucoup de restaurateurs utilisaient des préparations toutes faites pour les crèmes brûlées, qu'ils mélangeaient simplement avec du lait", s'indigne Hubert Jan, le président de l'Umih-restauration. Si les poudres minute ne passent pas comme des desserts faits maison, le chef cuisinier peut là aussi utiliser dans sa préparation des jaunes d'œufs pasteurisés vendus en bouteille.
Reste à ajouter le lait, la crème et le sucre. Pas besoin non plus de râper soi-même sa gousse de vanille. Le décret crée une exception pour les épices. L'arôme de vanille rentre donc dans l'appellation.
Les profiteroles au chocolat : non
Cet autre grand classique de la pâtisserie française passera difficilement le test. Pour qu'elles soient considérées comme des profiteroles faites maison, le restaurateur doit faire ses choux, mais surtout faire lui-même sa glace. Un critère assez sévère quand on considère que la confection de la glace est un métier à part entière.
S'il ne le fait pas, le restaurant devra nommer l'origine des boules vanille sur sa carte. "Il y a des artisans glaciers réputés : indiquer la provenance de la glace peut être valorisant, estime Hubert Jan. Par contre, pour ceux qui utilisent des glaces industrielles, ça l'est moins."
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