Cet article date de plus de quatre ans.

"Voir les films dans le cadre d'un festival est irremplaçable", selon Jean-Pierre Rehm, à la tête du Festival international de cinéma de Marseille qui ouvre aujourd'hui

Du 22 au 26 juillet, le Festival international de cinéma de Marseille (FID), l'un des premiers depuis le déconfinement, présentera cinquante films en compétition dans les salles de la cité phocéenne. Entretien avec son délégué général Jean-Pierre Rehm. 

Article rédigé par franceinfo Culture - Lola Scandella
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 14min
"J'ai aimé vivre là", de Régis Sauder, concourt dans la section française de la compétition.  (SHELLAC FILM)

La 31e édition du Festival international de cinéma de Marseille (FID) a bien failli passer à la trappe, balayé, comme beaucoup d'autres manifestations culturelles, par la pandémie de coronavirus et ses conséquences économiques sans précédent notamment pour le 7e art. L'équipe du FID est finalement parvenue à maintenir le festival en présentiel et à en faire l'un des premiers de l'été post-confinement. Cinquante films sont en compétition pour cette 31e édition qui inaugure cette année une nouvelle section et affiche une sélection strictement paritaire. Nous en avons discuté avec le délégué général du FID, Jean-Pierre Rehm, pour qui le visionnage des films en salle reste, malgré la possibilité de les voir en ligne, fondamental pour le cinéma. 

franceinfo Culture : Vous êtes l’un des premiers festivals de cinéma post-confinement. Le FID Marseille a frôlé l’annulation, pourquoi avez-vous finalement décidé de le maintenir ?

Jean-Pierre Rehm : Nous étions en plein processus de sélection des films en compétition lorsque le confinement s’est imposé mais nous avons continué de parcourir les propositions, près de 3 000, envoyées par les cinéastes et les maisons de productions. A ce moment-là on ne savait pas du tout ce que réservait l’avenir et nous avons traversé une période de réflexion assez agitée où nous oscillions la décision d’annuler le festival et de le maintenir, mais en ligne. Nous avions à l’origine opté pour la mise en ligne et c’est ce qui nous a amenés à finaliser notre travail de sélection. Et puis, fin mai, l’annonce gouvernementale a été faite d’une réouverture des salles de cinéma le 22 juin et nous avons donc décidé in extremis de maintenir le festival mais dans des formes un peu modifiées. Nous avons reculé de deux semaines les dates initialement prévues et une partie de l’activité du festival, le FIDLab, une plateforme dédiée à la coproduction, s’est, elle, tenue en ligne du 6 au 10 juillet.

Comment vous êtes-vous adapté aux mesures sanitaires nécessaires à la tenue du festival ?

Il a fallu en très peu de temps travailler sur des aspects logistiques, dans le souci des préconisations sanitaires. Nous présentons un peu moins de films que les années précédentes, cinquante, et nous avons un plus petit nombre de salles à notre disposition, avec une chute de jauge d’environ 30%. Le port du masque sera obligatoire comme dans tous les lieux clos et nous avons également pris des mesures de distanciations sociales. Mais la qualité et l’intensité des films présentés sont restées identiques. Nous espérons que le public partagera notre sentiment.

Un festival est une des rares fois où un film n’est pas seul. Il est vu par le public et accompagné par ceux qui l’ont fabriqué, mais il est aussi visible aux côtés d’autres films réunis dans une certaine idée du cinéma.

Jean-Pierre Rehm

Délégué général du FIDMarseille

Pourquoi est-ce important qu’un festival de cinéma se maintienne en présentiel, avec des projections en salle, alors que les films auraient également pu se visionner uniquement en ligne ?

Il y a plusieurs raisons. La première, c’est qu’un film a été pensé pour un certain type de présentation : un certain format dans l’espace, un certain type de noir dans la salle et une certaine qualité de son. Un vrai film dans une vraie salle, c’est la même chose par exemple qu’un tableau dans un musée, qu’on peut admirer au bon format. L’expérience du cinéma, c’est d’abord l’expérience d’une façon d’être face à des images dans une salle. Ensuite, les films que nous présentons sont pour la plupart des premières mondiales, ils n’ont encore jamais été montrés, ou des premières internationales, ils n’ont été vus que dans leurs pays d’origine. Cela veut dire que les réalisateurs, réalisatrices, acteurs, actrices, producteurs et productrices qui accompagnent les films seraient, sans la tenue d’un festival en présentiel, privés de l’expérience de la première fois où leur travail est dévoilé. Un festival est enfin l’une des rares fois dans l’existence d’un film où l’œuvre n’est pas seule. Le film est bien sûr vu par le public et accompagné par ceux qui l’ont fabriqué, mais il est aussi vu avec d’autres films qui ont été réunis dans une certaine idée du cinéma. La plupart du temps, quand vous allez voir un film, même s’il est présenté par son équipe, vous le voyez, vous sortez de la salle, et vous avez passé avec lui une soirée. Dans le cadre d’un festival, un spectateur ou une spectatrice va pouvoir traverser un ensemble de films et tout cela va faire résonner autrement chacun des films présentés. La réalité filmique festivalière est pour moi irremplaçable.

Vous inaugurez cette année une nouvelle catégorie, "Flash", dédiée au court et au moyen métrage, pourquoi ce nouveau couloir de compétition ?

Jusqu’ici nous refusions de distinguer court, moyen et long métrage. Cela dit, les années passant, nous nous sommes rendu compte qu’il y avait beaucoup de courts et moyens métrage de grande qualité et que nous ne pouvions pas tous les intégrer dans les autres sections. Nous avons donc proposé d’initier cette nouvelle catégorie mais qui reste aussi, comme c’est le cas pour le reste de la compétition, transversale. Vous pouvez ainsi avoir des films qui sont en compétition dans la section "Internationale" du festival par exemple, et également dans cette nouvelle section "Flash".

Vous présentez le festival comme un "gisement de nouvelles cinématographies", que voulez-vous dire ?

D’abord, c’est parce que nous montrons, et cela sans forcément le vouloir,  beaucoup de premiers films et le travail de jeunes cinéastes. Par "nouvelles cinématographies" nous entendons donc les œuvres de cinéastes émergents mais aussi de nouvelles façons d’imaginer des formes que peut prendre le cinéma, de nouvelles manière de raconter des histoires, de faire des images… nous sommes convaincus que c’est un reflet des réalités du monde, d’où notre caractère très international. Même les documentaires sélectionnés explorent le genre d’une manière particulière. Nous ne faisons jamais attention aux thématiques dans la sélection, les films ne sont pas des boîtes à contenus. Ils sont une expérience qui vous traversent et que vous traversez, c’est un double mouvement. Le cinéma que nous nous réjouissons de défendre est en tous cas un cinéma qui ne résout pas à refaire des choses qui ont déjà été faites plusieurs fois mais qui essaie d’être à la hauteur de ce qui pour nous est encore un art.

La sélection des films en compétition respecte strictement la parité entre réalisateur et réalisatrices. Est-ce une volonté ?

C’est vrai, il y a 26 femmes et 26 hommes. Ce n’est pas une volonté, mais plutôt une attention, une attention réelle, aux travaux réalisés par les femmes, du fait que la production féminine est de par le monde très importante et réjouissante. Nous avons toujours été attentifs aux productions féminines. Cependant, nous n’avons jamais eu de pratique de quota, ni cette année ni celles d’avant. Cette année nous avons une parité parfaite, mais nous n’avons pas compté en sélectionnant.

Deux personnalités sont mises cette année à l’honneur par le festival : le comédien français Michel Piccoli, sous la forme d’un hommage à sa filmographie, et la cinéaste allemande Angela Shanelec, qui recevra un Grand Prix d’Honneur. Pourquoi avoir choisi ces deux artistes ?

L’hommage à Michel Piccoli n’était pas prévu, nous avons été surpris par son décès. C’est quelqu’un dont la filmographie m’a toujours stupéfié, il a tourné environ 240 films et a travaillé avec un très grand nombre de cinéastes importants. J’ai toujours été stupéfait par sa manière de marquer les films mais sans jamais imposer sa place, cabotiner, ou en quelque sorte "faire son cinéma". En hommage, nous avons décidé, modestement, de montrer cinq de ses films durant le festival. Quant à Angela Schanelec, j’ai découvert son travail avec Marseille, un film que j’avais trouvé très singulier. Je l’avais invité une année à être membre du jury du FID. Et puis j’ai découvert son dernier film, qui était à la dernière Berlinale et pour lequel elle a remporté l’Ours d’argent. Il s’appelle J’étais à la maison, mais... un titre qui reprend en quelque sorte une formule d’Ozu. Je l’avais trouvé renversant. C’est un chef-d’œuvre, qui parvient à réunir dans une grande économie des regards portés sur la vie, sur ce que c’est que d’être une femme, une mère, une amante, une femme en deuil… Je me suis dit que c’était le bon moment pour remontrer son travail. En France, seulement deux de ces longs-métrage sont sortis en salle, Marseille, et Orly.

Plusieurs structures du secteur culturel s’inquiètent pour leur survie. Retrouvera-t-on le FID Marseille l’an prochain pour une 32e édition? 

Pourquoi pas ? Je suis déjà en train de travailler à l’édition prochaine !

Les films en compétition lors de la 31e édition du FID Marseille

Compétition française

- Barrage d'arrêt fixe et fermé au niveau du carrefour Hamdalaye, Thomas Bauer
Bas choeur, Sarah Klingemann
C'est paris aussi, Lech Kowalski
Come il bianco, Alessandra Celesia
Forensickness, Chloé Galibert-Laîné
J'ai aimé vivre là, Régis Sauder
- Kitâb al-isfâr : book of the journey, Baba Hillman
- La cellule, Samir Ramdani
Légendes, Julie Chaffort
Les graines que l'on sème, Nathan Nicholovitch
Little president, Christophe Clavert 
Un chat rêve du Nord, Diogo Oliveira
Un musée dort, Camille de Chenay

Compétition internationale

A dança do Cipreste, Mariana Calo, Francisco Queimada
Domovine, Jelena Maksimovic
Explaining the Law to Kwame, Roee Rosen 
Gli appunti di Anna Azzori / Uno specchio che viaggia nel tempo, Constanze Ruhm
- Goodbye Mister Wong, Kiyé Simon Luang
Gyres 1-3, Ellie Ga
N.P, Lisa Spilliaert 
- Northern Range, Olivier Derousseau 
-Pajeù, Pedro Diogenes 
- Rio Turbio, Tatiana Mazu Gonzalez
- Se escuchan aullidos, Julio Hernandez Cordon
- Toda la luz que podemos ver, Pablo Escoto Luna
- Todo que se olvida en un instante, Richard Spuntoff
- Two stones, Wendelien Van Oldenborgh
- Vision Nocturna, Carolina Moscoso
- YEUX / YEUX / YEUX / YEUX, Albert Garcia-Alzorriz
- Zaho Zay, Maeva Ranaïvojaona, Georg Tiller

Compétition Premier film

- A potentiality, Dana Berman Duff 
Amor Omnia, Yohei Yamakado
Barrage d'arrêt fixe et fermé au niveau du carrefour Hamdalaye, Thomas Bauer
Bas choeur, Sarah Klingemann
Deja que las luces se alejen, Javier Favot
Domovine, Jelena Maksimovic
Explaining the Law to Kwame, Roee Rosen 
Forensickness, Chloé Galibert-Laîné
Green Thoughts, William Hong-xiao Wei
Gyres 1-3, Ellie Ga
Heliconia, Paula Rodriguez Polanco 
- La cellule, Samir Ramdani
Légendes, Julie Chaffort
- Les épisodes - printemps 2018, Mathilde Girard 
Point and Line to Plane, Sofia Bohdanowicz
Soon It Will Be Dark, Isabell Heimerdinger
Sweat, Elsa Brès
The Sun and the Looking Glass - for one easily forgets but the tree remembers, Milena Desse
- Two stones, Wendelien Van Oldenborgh
Un chat rêve du Nord, Diogo Oliveira
Un musée dort, Camille de Chenay
- Vision Nocturna, Carolina Moscoso
- YEUX / YEUX / YEUX / YEUX, Albert Garcia-Alzorriz
- Voin, Gaëlle Boucand

Compétion Flash

A dança do Cipreste, Mariana Calo, Francisco Queimada
- A potentiality, Dana Berman Duff 
Come il bianco, Alessandra Celesia
De Vez Em Quando Eu Ardo, Carlos Segundo
- Dolce, Lucie Pannetrat
- El Renacer del Carare, Andrés Jurado
Explaining the Law to Kwame, Roee Rosen
Green Thoughts, William Hong-xiao Wei
Hâte-toi, Camille de Chenay
Heliconia, Paula Rodriguez Polanco 
Incidences, Victor Oozeer
Les épisodes - printemps 2018, Mathilde Girard 
No weight whatsoever, Mauricio Arango
Point and Line to Plane, Sofia Bohdanowicz
Soon It Will Be Dark, Isabell Heimerdinger
Sweat, Elsa Brès
The Sun and the Looking Glass - for one easily forgets but the tree remembers, Milena Desse
Salle obscure, Maxime Le Moing
- YEUX / YEUX / YEUX / YEUX, Albert Garcia-Alzorriz
- Voin, Gaëlle Boucand
A peaceful divorce, Sidi Wang
See you in my dreams, Shun Ikezoe

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.