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"Tanna", d'un amour passionnel à une guerre tribale

Premier film d’un duo prometteur australien, Bentley Dean et Martin Butler, "Tanna" marque la première incursion du Vanuatu, archipel indonésien, dans le cinéma. Une coproduction avec l’Australie, inspirée d’une histoire vraie remontant à 1984. Prix du Public à la dernière Mostra de Venise, "Tanna" représentera l’Australie lors des prochains Oscars. Une reconnaissance méritée.
Article rédigé par Jacky Bornet
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Marie Wawa et Mungau Dain dans "Tanna" de Bentley Dean et Martin Butler
 (PHILIPPE PENEL)

Tabou

"Tanna" fait penser à "Tabou", premier film américain et dernière réalisation de Friedrich Wilhelm Murneau de 1931, avant sa mort précoce dans un accident de voiture la même année. Situé à Bora Bora, il mettait déjà en scène l’amour interdit entre deux amants d’une tribu insulaire, avec des conséquences tragiques. La différence émane de la source véritable sur laquelle repose "Tanna",et des comédiens, personnages réels qui jouent leur propre rôle au sein de la tribu qui vécut cette aventure.

Un tel sujet se prêtait spontanément à un documentaire - registre d’où viennent les deux réalisateurs -, ou à un filmage idoine, comme c’est souvent le cas pour une thématique ethnographique. Si Bentley Dean et Martin Butler sont partis d’un documentaire réalisé sur l’île de Tanna pour la télévision, ils ont fait appel aux habitants pour écrire une reconstitution fictionnelle de ce fait divers qui bouleversa les us et coutumes de l’île. Dans la continuité, leur film recèle une force romanesque peu commune, sur une intrigue toute shakespearienne, et une image somptueuse, sans pour autant tomber dans l’élégie sirupeuse.

Fraîcheur

Romanesque, photogénique, "Tanna" n’en recèle pas moins une sincérité tant dans sa réalisation que ses acteurs. Car cette histoire a bouleversé les lois de ceux qui l’on vécue et qui l’interprètent. En même temps ce mariage arrangé qui déclenche toute l’affaire, dans la plus pure tradition tribale aux fins fonds des antipodes, trouve écho sous nos latitudes dans une actualité récurrente dans les médias. Si les populations issues de l’immigration sont souvent stigmatisées de ce point de vue, le récent "Mal de pierre" de Nicole Garcia rappelle que les mêmes arrangements peuvent être pratiqués dans de vieilles familles françaises.
Marie Wawa et Mungau Dain dans "Tanna" de  Bentley Dean et Martin Butler
 (PHILIPPE PENEL)

La puissance du récit, variante sur un thème de toujours, et la beauté des images - d’une jungle luxuriante aux flancs d’un volcan déifié - ; la force des personnages et de leurs interprètes, font de "Tanna" un film à part. Le fruit d’une fusion alchimique. Une première expérience de cinéma, pour les réalisateurs et les acteurs, qui révèle une fraîcheur revigorante dans un paysage cinématographique trop souvent déduit de recettes ou de calculs plus industriels qu’artistiques. "Tanna" démontre que créativité et accessibilité ne sont pas forcément les deux fractions d’un mariage forcé.

Tanna : l'affiche
 (Urban Distribution)

LA FICHE

Drame de Bentley Dean et Martin Butler (Vanuatu/Australie) - Avec  Mungau Dain, Marie Wawa, Marceline Rofit, Chef Charlie Kahla, Albi Nangia - Durée : 1h44 - Sortie : 16 novembre 2016

Synopsis : Dans l'une des dernières tribus traditionnelles du monde, une jeune fille rompt son mariage arrangé pour s'enfuir avec l'homme qu'elle aime. Les amoureux déclenchent ainsi une guerre qui menace leur clan. Tanna est l’histoire vraie qui bouleversa la vie des habitants d’une petite île du Pacifique et fit réviser la constitution d'un pays.

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