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"Mademoiselle de Joncquières" : Edouard Baer et Cécile de France troublants

La romance, le réalisateur Emmanuel Mouret, il connaît : "Caprice", "Une autre vie", "L’Art d’aimer"… Son ton, régulièrement de comédie, laisse place à l’adaptation d’un grand texte en costumes XVIIIe siècle de Diderot, "Mademoiselle de Joncquières". C’est aussi une première pour Cécile de France et Edouard Baer, dans un film historique, à contre-emploi, ce qui leur va à ravir.
Article rédigé par Jacky Bornet
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
 Cécile de France et Edouard Baer dans "Mademoiselle de Joncquières" d'Emmanuel Mouret
 (Pyramide Disstibution)

Antérieur aux "Liaisons dangereuses"

Cette adaptation, revendiquée "libre", fait spontanément penser par son sujet et son intrigue aux "Liaisons dangereuses" de Choderlos de Laclos, plusieurs fois adapté à l’écran. En fait, le texte de Diderot lui est antérieur. Séduite puis délaissée par le marquis des Arcis (Edouard Baer), Madame de La Pommeraye (Cécile De France), fomente une vengeance en lui mettant dans les bras, avec la complicité de sa mère, Mademoiselle de Joncquières dont il tombe éperdument amoureux, alors qu’elles sont en disgrâce.

A la différence de Madame de Merteuil dans "Les Liaisons", calculatrice et manipulatrice par cruauté, Madame de La Pommeraye est une grande amoureuse qui agit pour avoir été délaissée. Le marquis des Arcis n’est pas non plus le Valmont de Laclos qui tombait dans la machination de Merteuil pour la conquérir. Lui est véritablement amoureux de Mademoiselle de Joncquières et va en subir toutes les conséquences, jusqu’à un dénouement imprévisible.

Des vessies pour des lanternes

Emmanuel Mouret adapte le texte dans une très belle langue que manie à la perfection Edouard Baer, avec sa distinction et son phrasé si particuliers, parfait dans ce rôle de grand libertin pris au jeux de l’amour. Excellente idée par ailleurs de confier Madame de La Pommeraye à Cécile de France, jusqu’ici identifiée à des rôles "sympathiques", alors qu’ici sa blessure la pousse à jouer les manipulatrices implacables.
Edouard Baer et Cécile De France dans "Mademoiselle de Jonquières d'Emmanuel Mouret
 (Pyramide Distribution)
Elle n’en justifie pas moins sa vengeance par une démarche féministe, voulant donner une leçon à ces hommes qui ne cessent de faire prendre des vessies pour des lanternes à la gent féminine de cette société patriarcale française du XVIIIe siècle. Le message a d’autant plus d’impact aujourd’hui, où la question est sur toutes les lèvres.
Edouard Baer et Alice Isaaz dans "Mademoiselle de Joncquières" d'Emmanuel Mouret
 (Pyramide Distribution)
"Mademoiselle de Joncquières" vaut ainsi pour beaucoup par son texte et son interprétation. Car si les costumes de Pierre-Jean Laroque font merveille, la photographie de Laurent Desmet, habitué d’Emmanuel Mouret, est un peu plate, peu changeante et pas toujours heureuse quand elle s’écarte d’une blancheur dominante. On est loin du Philippe Rousselot des "Liaisons dangereuses" de Stephen Frears. Une critique qui vaut pour l'ensemble de la production française quand il s'agit de films historiques, contrairement à la veine britannique toujours remarquable. Mais "Mademoiselle de Joncquières" à bien d’autres atours pour nous séduire : laissez-vous charmer, elle est irrésistible.
"Mademoiselle de Joncquières" : l'affiche
 (Pyramide Distribution)

LA FICHE

Genre : Drame historique
Réalisateur : Emmanuel Mouret
Pays : France
Avec :  Cécile de France, Edouard Baer, Alice Isaaz, Natalia Dontcheva, Laure Calamy
Durée : 1h49
Sortie : 12 septembre 2018

Synopsis : Madame de La Pommeraye, jeune veuve retirée du monde, cède à la cour du marquis des Arcis, libertin notoire. Après quelques années d’un bonheur sans faille, elle découvre que le marquis s’est lassé de leur union. Follement amoureuse et terriblement blessée, elle décide de se venger de lui avec la complicité de Mademoiselle de Joncquières et de sa mère... 

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