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"Lulu femme nue" : Karin Viard prend la tangente enchantée

D’origine islandaise, Solveig Anspach a un bon nombre de films à son actif, longs, courts et moyens métrages, pour le cinéma comme pour la télévision. Elle avait notamment dirigé Karin Viard dans « Haut les cœurs » (1998), qu’elle retrouve dans « Lulu femme nue », adapté de la bande dessinée éponyme d’Etienne Davodeau.
Article rédigé par Jacky Bornet
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Karin Viard dans "Lule femme nue" de Solveig Anspach
 (Isabelle Razavet/Arturo Mio )

De Solveig Anspach (France), avec : Karin Viard, Bouli Lanners, Claude Gensac, Pascal Demolon, Philippe Rebbot - 1h27 - Sortie : 22 janvier 2014

Synopsis : À la suite d’un entretien d’embauche qui se passe mal, Lulu décide de ne pas rentrer chez elle et part en laissant son mari et ses trois enfants. Elle n’a rien prémédité, ça se passe très simplement. Elle s’octroie quelques jours de liberté, seule, sur la côte, sans autre projet que d’en profiter pleinement et sans culpabilité. En chemin, elle va croiser des gens qui sont, eux aussi, au bord du monde : un drôle d’oiseau couvé par ses frères, une vieille qui s’ennuie à mourir et une employée harcelée par sa patronne… Trois rencontres décisives qui vont aider Lulu à retrouver une ancienne connaissance qu’elle a perdu de vue : elle-même.

De l’ombre à la lumière
« Lulu femme nue » n’est pas sans rappeler le sujet du récent « Elle s’en va » d’Emmanuelle Bercot, où Catherine Deneuve partait en roue libre à travers la France, faisant des rencontres de hasard et renouant des liens avec sa fille et découvrant son petit-fils. Les termes du « lâcher prise » sont toutefois ici quelque peu différents. Prenant conscience de son inconsistance face à un mari violent, son échec à un entretien d’embauche va stigmatiser cette transparence à ses yeux. Elle décide de prendre la tangente, de ne pas rentrer à la maison. C’est cette absence qui va justement la révéler à elle-même et aux autres.
Lulu passe inaperçue, elle n’existe que comme un rouage familiale, au service d’un mari garagiste - qui travaille, lui -, de sa fille adolescente, exigeante, incapable de couper le cordon, et de deux autres enfants. On lui a retiré depuis des lustres jusqu’à son prénom, Lucie (lumière), pour en faire une terne Lulu. Jusqu’ici, docile, résignée, Lulu encaisse, grâce notamment à sa sœur avec laquelle elle se sent proche. Mais c’est toujours la famille, des amis, il n’y en a guère. Vidée, elle se rend en train à la station balnéaire la plus proche. Là, l’aventure commence. Elle qui ne connaît rien d’autre que les corvées, va prendre sa vie en main, retrouver sa lumière.
Bouli Lanners et Karin Viard dans "Lulu femme nue" de Solveig Anspach
 (Isabelle Razavet/Arturo Mio )

Fraîchoux
Lulu rencontre un ex-taulard doux comme un agneau (Bouli Lanners) et ses deux frères qui le couvent comme un poussin. Une vieille dame solitaire (Claude Jeansac) va en faire sa meilleure amie et sa protectrice, alors qu’elle ira au secours d’une jeune serveuse harcelée par sa patronne. Dès lors Lulu existe. Elle ira loin, bien plus loin qu’elle l'envisageait. Karin Viard incarne avec justesse et tact cette femme mûre, trop grande, un peu gauche, maladroite, tout en devenir, qui va sortir de sa chrysalide. Un personnage évolutif sur un parcours initiatique dans lequel l’actrice s’est parfaitement investie.


Est-ce l’origine islandaise de Solveig Anspach qui apporte toutefois autant de froideur au filmage de « Lulu femme nue » ? Si la chaleur est dans les cœurs, les images de Saint-Jean-de-Croix-de-Vie hors saison, lieu de l’action, sont un rien « fraîchoux »… Le parti pris n’est pas inesthétique, loin s’en faut, mais la réalisation manque toute de même de cinématographie. Celle-ci émane seulement des paysages, du cadre, de la lumière hivernale, piqués au vif, sans autre adjuvant. Sans trop d’ostentation, un peu de folie, dans cette histoire de rupture de ban, n’aurait pas fait de mal. « Lulu femme nue » n’en reste pas moins à la vision agréable, même si quelques excentricités à la Kerven/ Delépine ou Yolande Moreau ne l’auraient pas dépareillée.

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