"La Mante religieuse" : sulfureux, religieux, dérangeant, intéressant...
3 / 5 ★★★☆☆
De Natalie Saracco (France), avec : Mylène Jampanoï, Marc Ruchmann, Mathilde Bisson - 1h28 - Sortie : 4 juin 2014
Synopsis : Jézabel, jeune femme séductrice, libre et rebelle a soif de tout vivre à l'extrême, jusqu'à toucher le fond. Elle refuse de croire en l’homme et surtout en elle-même. Véritable Marie-Madeleine des temps modernes, elle cache sa fragilité et sa peur d’aimer en repoussant toujours plus loin les limites de la transgression. Jusqu’au jour où son chemin croise celui de David, un jeune prêtre…
Un sentiment carné
Ce qui frappe d’emblée dès les premières scènes de "La Mante religieuse", c’est le professionnalisme de la réalisation de Natalie Saracco. La qualité du cadrage, de la lumière, des décors, des costumes… une esthétique non esthétisante, une véritable patte, rarement détectable dans un premier long métrage. Une exigence qui se retrouve dans le choix des acteurs. Mylène Jampanoï, beauté troublante, sulfureuse qui se définit comme "pro de la vie en 3D" (Dope-Destroy-Dégoût). Face à elle, Marc Ruchmann campe un très convaincant jeune prêtre à la foi communicative, pétri de modernité.
La cinéaste signe également un scénario original dont une grande partie repose sur la définition de personnages complexes et évolutifs. Jézabel (Mylène Jampanoï) est peintre. Ses toiles monumentales, impressionnent par leur caractère carné, dont le graphisme évoque une personnalité en mal avec elle-même, lâchant sur le monde sa vision violente d’une humanité torturée qui n’est pas sans rappeler un Francis Bacon. Cette vision du monde, Jézabel la reproduit dans son comportement en se lançant le défi de séduire le Père David. Ce qu’elle veut : détruire sa foi. Lui, droit dans sa mission de prêtre, distille un message d’amour qui va faire vaciller la jeune femme. Cela ne se terminera pas forcément comme on l’attendrait…
Portrait de femme
Natalie Saracco traite du sujet risqué de la foi, sans pour autant faire du prosélytisme. Elle aborde plus un sentiment qu’un dictat. Sa cinématographie est dans ce sens paradoxalement libertaire, ne se fixant aucun tabou, notamment dans des scènes de sexe explicites, sans gratuité aucune, qui reflètent la nature des personnages. "La Mante religieuse" est de fait en partie un portrait de femme mise face à elle-même, faisant comme un bilan de sa vie, de son positionnement dans l’ordre du monde. De manipulatrice elle va devenir manipulée par l’abnégation du père David.
Natalie Saracco réussit son récit initiatique en évitant d’être simpliste, ce qui n’était pas gagné d’avance. Il y a bien quelques scories, comme parfois une direction d’acteurs un peu lâche, imputable à la réalisation d’un premier long métrage. Mais l’ambition du sujet et la beauté formelle du film, l’excellente prestation de Marc Ruchmann, la belle musique d’Ernest Saint-Laurent rattrapent des erreurs de jeunesse, avec la sincérité communicative d’une cinéaste prometteuse.
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