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"Irréprochable" : inquiétante Marina Foïs dans un thriller social implacable

Venu du roman, de l’animation et du roman graphique, Sébastien Marnier réalise son premier long métrage, après trois courts, avec "Irréprochable", d’après son propre scénario. Il fait appel à un beau quatuor d’acteurs : Marina Foïs, Jérémie Elkaïm, Joséphine Japy et Benjamin Biolay, dans un étrange suspense qui sort des sentiers battus de la comédie dramatique française.
Article rédigé par Jacky Bornet
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Marina Foïs dans "Irréprochable" de Sébastien Marnier
 (Memento Films Distribution)

Fracture

Quatre étoiles pour Marina Foïs dans un contre-emploi qui la sort du répertoire comique, où elle excelle par ailleurs. Elle était déjà étonnante dans le rôle dramatique de "Darling" de Christine Carrière en 2007. Mais dans "Irréprochable", elle intègre un film de genre, rare en France, et rarement réussi comme ici. C’est en partie en raison du contexte social dans lequel s’inscrit cette histoire de manipulation, de mensonges, d’obsession à partir d’une perte d’emploi, qui va révéler le côté sombre d’un personnage déchu.

Si l’on ne sait pas grand-chose du passé de Constance (Marina Foïs), les quelques indices cernent une personnalité floue, solitaire et narcissique, à la sexualité pulsionnelle, sinon brutale. La perte de son emploi, depuis un an, à 40 ans, alors qu’elle est "montée" à Paris pour réussir dans sa profession d’agent immobilier, est un échec cuisant. À la rue, sans avenir, seule, cette situation crée chez elle une fracture qui la fait basculer, par manque de reconnaissance. Constance ne cherche pas l’amour, elle n’y croit pas, mais veut être aimée. 

Marnie

La force du sujet émane de ce portrait de femme déstabilisée, monomaniaque, emportée par ses fantasmes nombrilistes, à la frontière d’une folie franchie pas à pas, dans un processus paranoïde et schizophrène qui l’engloutit. Constance veut tout maîtriser, mais c’est le tout qui la maîtrise. N’ayant prise sur rien, elle se crée, pour elle-même et son entourage, une réalité tissée de mensonges. Sa construction est vacillante, fragile. Tout le suspense repose sur sa pérennité ou son effondrement. Sous une apparente fin ouverte, Sébastien Marnier a choisi son camp et le laisse deviner.

Benjamin Biolay et Marina Foïs dans "Irréprochable" de Sébastien Marnier
 (Memento Films Distribution)

Constance est comme une héritière de Marnie, le personnage de "Pas de printemps pour Marnie" (1964) d’Hitchcock qui aurait troqué l'introversion pour l'extraversion. Sébastien Marnier n’a toutefois pas encore la dextérité cinématographique du maître du suspense et n’y prétend aucunement. Mais si "Irréprochable" repose sur un bon script et une interprétation sans faille, sa mise en scène manque de relief, en se bornant à capter les actes d’un naufrage auquel il manque un brin de folie. Par trop de constance. 

Reportage  : P. Deschamps / S. Gorny / Y. Bodin / G. Le Goff / J-F Lons / J-C Lambard

"Irréprochable" : l'affiche
 (Memento Films Distribution)

LA FICHE

Thriller de Sébastien Marnier (France) - Durée : 1h43 - Sortie : 6 juillet 2016
Synopsis : Sans emploi depuis un an, Constance revient dans sa ville natale quand elle apprend qu’un poste se libère dans l’agence immobilière où elle a démarré sa carrière. Mais son ancien patron lui préfère une candidate travaillant en freelance plus jeune. Constance est alors prête à tout pour récupérer la place qu’elle estime être la sienne.

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