"Citoyen d'honneur", réjouissant Goya du Meilleur film étranger
Salas
Avec la gloire internationale, un Prix Nobel de Littérature, Daniel Mantovani (Oscar Martinez) est devenu un écrivain aigri qui s’est réfugié dans une tour de verre. Dans ses romans, il ne parle pourtant que de ses origines, modestes, dans un petit village argentin, Salas, dont il ne veut plus entendre parler. Mais il ne résiste pas quand le maire le sollicite pour devenir citoyen d’honneur. Est-ce la dernière médaille qui manque à son tableau ? Une revanche sur ses origines ? Une reconnaissance légitime ?...Sans tenir le film sur les épaules, les seconds rôles étant formidables (le maire, la famille d’accueil, l’opposant…), Oscar Martinez compose un personnage très subtil. Au carrefour de l’élite intellectuelle et du déraciné retrouvant ses sources, de l’intello détaché et de l’émotif, de la vedette adulée et du personnage honni. Tous ses contrastes, avec au premier chef l’arrivée d’une personnalité sophistiquée dans un monde rural, est source d’innombrables gags, de situations comiques, de réparties savoureuses. Un délice que renouvellent constamment Mariano Cohn et Gastón Duprat dans l’écriture et la réalisation, qui évoquent les meilleurs moments de la comédie italienne.
Tour de passe-passe
L’on croirait pourtant tout improvisé, ce qui n’est pas le cas. C’est tout le talent des cinéastes de ne pas tourner un faux reportage, mais une vraie fiction, avec une forme documentaire. Ce tour de passe-passe est dû aux situations de plus en plus incongrues qui jalonnent le récit : le défilé sur le camion de pompier, le concours d’arts-plastiques catastrophique, l’hostilité du comité anti-Daniel Mantovani, les origines de la jeune fan amoureuse, jusqu’à une conclusion extrême.
Depuis plusieurs années, le cinéma argentin a démontré son talent avec une énergie, une vivacité, dont "Citoyen d'honneur" témoigne de bout en bout dans son humour irrésistible, à travers une situation plausible portée jusqu’à ses limites. Sans excès, avec élégance et réalisme, Mariano Cohn et Gastón Duprat réussissent un portrait d’homme, un portrait d’artiste, d’intellectuel désenchanté mis face à lui-même, à un passé révolu qui le rattrape sans qu’il s’y attende. Il lui fait prendre conscience d’un présent qui lui échappe, pour lui imposer comme une leçon d’humilité. Une jolie fable.
LA FICHE
Comédie dramatique de Mariano Cohn, Gastón Duprat (Argentine) - Avec : Oscar Martinez, Dady Brieva, Andrea Frigerio, Nora Navas, Manuel Vicente, Belén Chavanne, Marcelo D'Andrea, Gustavo Garzon - Durée : 1h57 - Sortie: 8 mars 2017
Synopsis : L’Argentin Daniel Mantovani, lauréat du Prix Nobel de littérature, vit en Europe depuis plus de trente ans. Alors qu'il refuse systématiquement les multiples sollicitations dont il est l’objet, il décide d'accepter l'invitation reçue de sa petite ville natale qui souhaite le faire citoyen d'honneur. Mais est-ce vraiment une bonne idée de revenir à Salas dont les habitants sont devenus à leur insu les personnages de ses romans ?
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