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Cannes 2015 : "Carol" avec Cate Blanchett dans un film lesbien sans relief

Alors que Todd Haynes, couronné dans les festivals internationaux, est très original dans ses sujets, son écriture et son traitement, avec "Carol" - adapté de Patricia Highsmith qui a sorti ce roman sous le pseudonyme de Claire Morgan -, il reste d'une sagesse extrême, à l'image des années 50 américaines qu'il évoque. C'est sans doute là que l'originalité demeure. Mais faut-il chercher plus loin ?
Article rédigé par Jacky Bornet
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié
Temps de lecture : 3min
Cate Blanchett dans "Carol" de Todd Haynes
 (UGC Distribution )
La note Culturebox
3 / 5                  ★★★☆☆

So fifties

Todd Haynes avait déjà dirigé Cate Blanchett dans "I'm not there" (2007), où elle endossait une des sept incarnations de Bob Dylan, dans ce faux biopic très réussi. Il avait également remporté le Prix de la meilleure contribution artistique à Cannes en 1998, pour "Velvet Goldmine", formidable film sur le Glam rock du début des années 70, resserré autour du triumvirat David Bowie/Iggy Pop/Lou Reed. Sa filmographie est jalonnée d'excellents films, comme "Safe" (1995) sur l'hygiénisme compulsif, ou "Loin du paradis" (2003), sur la société américaine des années 50. Déjà…


Car c'est à cette époque, 1953, que se situe "Carol". Todd Haynes lui est donc fidèle  puisqu'elle demeure véritablement l'incarnation de l'Amérique resplendissante. Aussi parvient-il à l'évoquer à merveille dans la première partie de son film.  D'autant qu'elle se déroule lors des préparatifs de Noël, période clés dans la cellule familiale étasunienne. Il capte et transmet cette atmosphère avec une distinction pleine d'élégance et de communicabilité touchante. En petite vendeuse modèle, Rooney Mara n'est pas sans rappeler Audrey Hepburn par son visage fin et juvénile, ce qui colle parfaitement à l'époque.

Code Hayes

Face à elle, Cate Blanchett incarne toute l'aristocratie de la côte Est. Sophistiquée, tirée à quatre épingles, au langage choisi, elle incarne l'inaccessible. C'est pourtant elle qui va séduire Thérèse (Rooney Mara) qui ne va se faire prier par cette femme en rupture de sentiments, et qui retrouve en elle sa propre déception des hommes. Tout cela marcherait à merveille s'il y avait un peu plus d'audace dans la mise en scène. Todd Haynes colle à la lettre au code Hayes (loi de censure très stricte aux Etats-Unis appliquée de 1934 à 1966) alors en vigueur. Après tout est-ce un choix de mise en scène en accord avec l'époque du film ? Mais sur deux heures, cela ronronne.

Rooney Mara  et Cate Blanchett dans ""Carol" de Todd Haynes 
 (UGC Distribution)

Il y a bien sûr une scène de sexe qui déroge au code Hayes, mais c'est comme une figure obligée. "Carol" n'en reste pas moins plein de charme, la reconstitution et la photographie sont d'un très haut niveau, mais l'impact de la passion ne passe guère. On finit par s'ennuyer. Les deux actrices sont formidables et d'une beauté renversante, mais c'est justement trop, comme si ce perfectionnisme déconnectait d'une réalité tragique. Comme si Todd Haynes était passé à côté de son sujet par un surplus de mise en scène.

Carol
De Todd Haynes (États Unis) avec Cate Blanchett, Rooney Mara, Sarah Paulson, Kyle Chandler - 1h58, Date de sortie inconnue.

Synopsis : Dans le New York des années 1950, Therese,  jeune employée d’un grand magasin de Manhattan, fait la connaissance d’une cliente distinguée, Carol, femme séduisante, prisonnière d'un mariage peu heureux. À l’étincelle de la première rencontre succède rapidement un sentiment plus profond. Les deux femmes se retrouvent bientôt prises au piège entre les conventions et leur attirance mutuelle.

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