"A la merveille" : Terrence Malick ordonne la messe
De Terrence Mallick (Etats-Unis), avec : Ben Affleck, Olga Kurylenko, Rachel McAdams, Javier Bardem - 1h52 - Sortie : 6 mars
Synopsis : Même s’ils se sont connus sur le tard, la passion qu’ont vécue Neil et Marina à la Merveille - Le Mont-Saint-Michel - efface les années perdues. Originaire d’Ukraine, elle est divorcée et mère d’une fillette de 10 ans, Tatiana. Installés dans l’Oklahoma, leur relation s’est fragilisée : Marina se sent piégée et cherche conseil auprès d’un autre expatrié, un prêtre catholique qui doute de sa vocation. Alors que Marina retourne en France avec sa fille, Neil se console avec Jane, une ancienne amie à laquelle il s'attache. Mais quand rien ne va plus pour Marina, il se sent écartelé. Le prêtre, lui lutte pour retrouver la foi. Face à deux formes d’amour, les deux hommes sont confrontés aux mêmes questions.
Une musique toute en profondeur et monocorde, des travelings sur des actrices batifolant dans les grandes herbes ou les blés, voire les allées de supermarchés, des plans sur le ciel azuré et le soleil éclatant à travers le feuillage, des couples s’embrassant sur le gazon… Ces images inlassables du dernier film de Terrence Malick semblent des copier collés de « Tree of life ». Un scénario mettant en parallèle les vicissitudes amoureuses d’un couple et l’amour de dieu, une voix off éthérée alignant des glorifications déistes ou des doutes…Cela ne vous rappelle rien ?
Si vous n’avez pas vu « Tree of Life » sans doute pas. Si c’est l’inverse, cela doit faire écho. Jamais Terrence Malick n’a sorti deux films dans un si court laps de temps. Grand bien soit-il ! Mais les dates sont ici si rapprochées, et les films d’une facture si semblables, que l’on croirait les deux réalisés en même temps. « A la merveille » apparaît ainsi comme le second pan de ce qui pourrait constituer un diptyque sur la Foi. La Foi dans l’amour entre un homme et une femme ; la Foi en Dieu. Le doute intervenant d’une façon immuable dans les deux cas. Liturgie
Jusqu’à « Tree of Life », Terrence Malick apparaissait dans ses hymnes à la nature - thème récurrent de ses films depuis « La Balade sauvage » - comme panthéiste, voire animiste, du moins spiritualiste. Depuis, il met tellement « Dieu » dans la bouche de ses personnages et dans leur définition, voire la mise en scène et le scénario (le choix du Mont Saint-Michel dans le film n’est pas un hasard), que l’on croirait assister à des prêches évangélistes.
Le lyrisme issu de tous ces mouvements de caméra planants, de la voix off, et du discours, retire toute épaisseur aux personnages, dont il ne reste plus que des abstractions, sans teneur dramatique aucune. Tant et si bien, que l’on s’ennuie ferme devant ce prêche, comme un enfant de 11 ans, obligé d’assister à une homélie. Tout cela pour dire que l’amour entre un homme et une femme peut avoir une fin et être remplacé par un autre ; que l’existence de Dieu peut être mise en doute, même par un prêtre. Dans un autre registre, William Friedkin exprimait ce même doute avec plus de conviction et de force dans « L’Exorciste », à travers son père Karras. La messe est dite.
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