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"A Dark, Dark Man" : thriller kazakh hors normes, entre Bruno Dumont et Quentin Tarantino

Un polar qui sort des terrains battus et aborde la corruption dans un décor hors les murs.

Article rédigé par Jacky Bornet
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Daniar Alshinov dans "A Dark, Dark Man" de Adilkhan Yerzhanov. (Copyright Arizona Distribution)

A Dark, Dark Man du Kazakh Adilkhan Yerzhanov, qui sort mercredi 14 octobre, confirme la richesse des films en provenance de pays en marge des productions habituelles. La corruption dans la police kazakhe, au coeur du film, est toutefois traitée sur un mode faisant référence au thriller occidental. Son sujet recoupe Léviathan (2014) du russe Andrey Zvyagintsev. Mais sa forme, plus corollaire au film noir, et projetée dans un cadre atypique, en fait toute l'originalité.

Jean-Pierre Melleville, Quentin Tarantino, Bruno Dumont

Bekzat, jeune inspecteur qui baigne dans la corruption policière kazakhe, doit couvrir un nouveau crime pédophile mortel dans son secteur. Mais une journaliste doit l’accompagner dans son enquête sur ordre des autorités. Ses interférences répétées vont faire vaciller son mode opératoire. Bekzat va aller à l'encontre des objectifs fixés par sa hiérarchie, au risque de se perdre...Avec A Dark, Dark Man, Adilkhan Yerzhanov ne se limite pas à l’exercice de style. Il projette sa sensibilité sur son propre pays, en adaptant son récit aux codes du polar. Flic marginal, femme fatale, imbroglio narratif… se retrouvent dans un style qui rappelle Jean-Pierre Melleville autant que Quentin Tarantino. Mais son approche ethnologique du monde kazakh, évoque aussi Bruno Dumont, avec lequel le réalisateur partage également un sens de l'absurde.

L'ailleurs et l'universel

Curieux cocktail ! Il fait tout le sel du récit de cet "homme très, très sombre" ("dark, dark man"), vieux routier d’un système contre lequel il va s’opposer au risque de sa vie. Le récent La Femme des steppes, le flic et l’œuf du mongol Quanan Wang n’est pas loin, dans ses paysages arides, ses références au western et son versant ethnologique. Comme dans tout le cinéma asiatique, Adilkhan Yerzhanov prend son temps, jouant de plans contemplatifs, avec une progression lente du récit, comme un Sergio Leone, pour aboutir comme Quentin Tarantino à un climax violent et sanglant.

Dinara Baktybaeva et Daniar Alshinov dans "A Dark, Dark Man" de Adilkhan Yerzhanov. (Copyright Arizona Distribution)
Signe de l’émergence d’un cinéma riche en provenance d'Asie centrale (kazakh, mongol, bulgare…), A Dark, Dark Man offre un regard novateur et rafraîchissant sur le cinéma mondial. Ce qui pourrait s'avérer un collier de poncifs du film noir, construit en fait une autre réalité, inédite. Le lien à la tradition, du thriller ou du western, est enrichi d'un discours politique, à l'image d'un Alan J. Pakula (Les Hommes du président). Très contemporain, A Dark, Dark Man parle à tout le monde, malgré sa singularité, car il respecte ses pairs. Un futur classique.

L'affiche de "A Dark, Dark Man" de Adilkhan Yerzhanov. (Arizona Distribution)

La fiche

Genre : Thriller 
Réalisateur : Adilkhan Yerzhanov
Acteurs :  Janiar Alshinov, Dinara Baktybaeva, Teoman Khos
Pays : Kazakhstan, France
Durée : 1h50
Sortie : 14 octobre 2020
Distributeur : Arizona Distribution

Interdit aux moins de 12 ans

Synopsis : Bekzat est un jeune policier qui connait déjà toutes les ficelles de la corruption des steppes kazakhes. Chargé d’étouffer une nouvelle affaire d’agressions mortelles sur des petits garçons, il est gêné par l’intervention d’une journaliste pugnace et déterminée. Les certitudes du cow-boy des steppes vacillent.

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