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"Kabul I love you": le message d'espoir de 10 cinéastes en herbe

Article rédigé par franceinfo - franceinfo Culture (avec AFP)
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Dix réalisateurs afghans déclarent leur amour à leur capitale Kaboul, marquée par trois décennies de guerre, où le poids social de la tradition entre en conflit avec des valeurs plus modernes. "Kabul I love you" décortique en 10 histoires entremêlées les problématiques régentant la vie des Kabouli(e)s: vol de terres, chômage, immigration clandestine, division ethnique, mariage forcé, condition féminine, mines anti-personnelles....

Un bel exercice dans un pays où les cinémas étaient fermés et les télévisions pendues aux lampadaires. Les talibans, au pouvoir de 1996 à 2001, considéraient que toute image était impie parce qu'elle déshonorait le prophète. Cinq ans de rigorisme religieux ont mis à mal l'industrie cinématographique locale, fragilisée par 15 années de guerre de 1979 à 1996. La filière peine à s'en remettre dans un pays ravagé économiquement. D'autant qu'une décennie de conflit, entre rebelles et forces gouvernementales pro-occidentales, a succédé au règne taliban.

L'Unama épaule le cinéma local
Une centaine de fictions sont produites chaque année en Afghanistan, estime Malek Shafi'i, documentariste afghan. Mais ces films, tournés avec des budgets étriqués, sont de piètre qualité. D'où la volonté de l'Unama, la mission de l'ONU en Afghanistan, d'épauler le cinéma local en finançant "Kabul I love you". "Depuis le départ, l'idée est d'aider des réalisateurs... De les soutenir. Qu'ils communiquent avec le peuple afghan. Mais pas avec nos messages. Avec les leurs", explique Ario Soltani, producteur à l'Unama.

Sur 200 scénarios reçus, 11 ont été retenus et commandés, à hauteur de 8.000 dollars l'unité. "Kabul I love you" a été tourné, monté... et projeté à l'Institut culturel français de Kaboul. Néophytes, des réalisateurs ont grossi les traits de personnages à l'extrême, exagéré les dialogues, ralenti le tempo jusqu'à l'ennui. Mais d'autres se sont sublimés.  

Comme Farhad Rezae, avec le court-métrage "Virgin towers" (les tours vierges) aux images épurées. On y voit un gardien de mosquée perturbé quand une jeune femme se réfugie dans son lieu de culte. Quelques échanges pudiques lui permettent de comprendre qu'elle fuit sa famille et un mariage forcé. "Ce gardien, c'est moi, quand j'avais 20 ans", explique Farhad Rezae. La jeune fille, dénoncée par un voisin, finit par fuir la police en courant. Son souffle haletant et son champ de vision restreint par une burqa qu'elle porte font partager la dureté de la condition de la femme afghane au spectateur.

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"Une femme peut être traitée comme un être humain sans porter la burqa", estime Farhad Rezae, refusant une dimension "politique" à son court-métrage. "Rezae a réussi à se rapprocher des réalités afghanes, entre les conditions de vie actuelles et la religion, contrairement à d'autres réalisateurs du film", estime Malek Shafi'i. 

"En Afghanistan, on franchit difficilement les barrières culturelles car on est une société traditionnelle. Récemment, des jeunes artistes ou écrivains ont osé", poursuit-il. Certains à l'excès. Des scènes de "Kabul I love you", jugées trop crues pour les standards afghans, ont été coupées au montage. Comme dans le court-métrage "Sima" de Mohmad Nasir Hashimi.

"Kabul I love you", tournage décembre 2011
 (Unama/AFP)
"Kabul I love you", tournage décembre 2011
 (Unama/AFP)

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