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"Possédé par le souvenir d'une femme", le réalisateur Volker Schlöndorff se confie sur son nouveau film "Retour à Montauk"

Volker Schlöndorff fait part, lors d'une interview, de sa vision de son nouveau film "Retour à Montauk". 

Article rédigé par Thierry Fiorile
Radio France
Publié
Temps de lecture : 5min
Volker Schlöndorff, réalisateur allemand (MAURIZIO GAMBARINI / ANADOLU AGENCY)

À 78 ans, l'un des plus grands cinéastes européens qui a ausculté l'histoire et la politique offre son film le plus intime. Retour à Montauk de Volker Schlöndorff sort en salle mercredi 14 juin. Palme d'or à Cannes en 1979 pour Le Tambour, l'allemand raconte ici l'histoire d'un écrivain qui cherche à retrouver un amour perdu, incarné par l'actrice Nina Hoss. Un récit très autobiographique dans lequel Volker Schlöndorff ne s'épargne pas.

Interview de Volker Schlöndorff, réalisateur de "Retour à Montauk".

Franceinfo : D'où vous est venue l'idée du film ? 

Volker Schlödorff : Il y a eu un épisode qui a duré des années, des décennies, 30 ans ou plus, où j'étais comme possédé par le souvenir d'une femme. Le propre d'un littéraire c'est qu'il en fasse un roman, alors j'ai dis je vais essayer d'en faire un film. On n'a pas été tendre avec lui, mais certainement lui croit être la victime alors que, quand il se rend compte quand il rencontre cette femme de sa vie, il voit que c'est elle qui a été détruite par sa négligence, par le fait qu'elle voulait avoir des enfants, maintenant c'est trop tard. Il s'aperçoit que c'est un 'tueur'. Les écailles me sont tombées des yeux et j'ai compris quel goujat j'ai été. 

Est-ce-que c'est le propre de l'homme artiste d'être égocentré et égoïste comme ça ? 

Moi je crois même qu'il le faut, et peut-être que je ne suis pas artiste parce que je ne le suis pas assez. Mais je me rends compte que les grands artistes avec qui j'ai travaillé : Günter Grass, Arthur Miller ou d'autres sont des "égomans" absolus. 

Et l'enfer est dans les détails ? C'est ce qu'on voit dans ce film sur des petits détails, on voit qu'effectivement l'égoïsme masculin est terrible. 

C'est là qu'il se trahit, il veut être aimé donc il essaye de charmer toujours. Tel que je l'ai bien connu je pense à des gens comme Louis Malle ou autre. J'étais toujours stupéfait de ce numéro de charme et de séduction et qui marchait au premier abord. Mais après, au bord de la route, restait les cadavres. Il ne peut pas contrôler tous ses gestes. Donc la façade c'est de charmer la séduction et puis il se trahit un peu partout. Il y a toujours la tentation de vouloir revenir sur le passé. On m'a dit qu'il y a des cas où ça réussit (très rare).  Il faut faire l'essai pour se rendre compte que ça n'est pas possible. Pour exorciser quand on est obsédé par un regret comme ça, il faut le faire. En tout cas moi j'ai pu m'en libérer en faisant le film. 

Est-ce-que ce film aurait été possible sans l'actrice Nina Hoss ? 

Je ne crois pas. Pour moi, elle est devenue le film. Je la connaissais du théâtre surtout à Berlin après je la vois au théâtre tout le temps et c'était pendant une séance de Little Foxes : Petit renard, quand je l'ai observé je me suis dis : 'Mais ce serait formidable si c'était elle !'. Puis j'ai commencé à façonner le personnage de plus en plus pour ce qui est sa force. C'est une vedette tout de suite, c'est un personnage plus grand que nature, même quand on la rencontre comme ça. Elle a cet aura d'une vedette et puis elle est très très vulnérable et elle est très très sensible, mais elle cache bien bien son jeu et quand ca apparaît alors la c'est formidable. Elle peut être très drôle aussi, très spontanée, et elle a ce qui fait une vedette : un mystère. Elle reste toujours un petit peu énigmatique. C'est la Isabelle Huppert allemande. D'abord parce que comme Isabelle elle fait beaucoup de théâtre, puis les films de Peter Sehr. Maintenant en participant à la série Homeland et avec pas mal de proposition des États-Unis, elle va passer de ce côté là. Mais évidemment c'est toujours basé sur travail. Elle est extrêmement disciplinée, très exigeante, mais aussi extrêmement généreuse. Souvent j'étais confondu parce qu'elle donnait devant la caméra d'un coup. De se mettre à nu et de dire : 'Voilà, voilà mon intérieur' et ça c'est très rare que des actrices aussi contrôlées ouvrent une telle fenêtre. 

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