Oscars : trois questions sur ces Français choisis pour désigner les lauréats
De nombreux Français figurent dans le jury de la grande messe du cinéma, qui se tiendra, dimanche à Los Angeles. Franceinfo a demandé à plusieurs d'entre-eux de dévoiler les coulisses de cette mécanique bien huilée.
Les lauréats des Oscars seront dévoilés dans la nuit du dimanche 26 au lundi 27 février, à Los Angeles (Etats-Unis), lors de la 89e cérémonie de ces récompenses du cinéma international. Et comme chaque année, plusieurs Français font partie du jury. Ces votants appartiennent à l'Académie des arts et des sciences du cinéma, un cercle très restreint, chargé de désigner les futurs détenteurs de la célèbre statuette.
Entre sélection draconienne, choix cornéliens et visionnages chronophages, le vote est un long processus. Franceinfo a recueilli le témoignage de ces Français dont la voix compte.
Qui sont-ils ?
L'Académie ne diffuse ni la liste, ni le nombre de ses membres. Mais une étude du Los Angeles Times (en anglais), datant de 2016, révélait que 6 261 personnes sont concernées. Elles sont toutes nommées à vie. Selon les informations de franceinfo, environ 140 Français en font partie. Ces derniers se répartissent entre 17 métiers de la production cinématographique, allant des acteurs aux réalisateurs, en passant par les costumiers.
L'Académie communique cependant sur les nouveaux venus. Ils étaient 683 nouveaux membres invités pour l'édition 2017, dont les françaises Catherine Breillat, Anne Fontaine, Nicole Garcia, Mia Hansen-Løve et Marjane Satrapi, rappelle Le Monde. Toutes ont pu accéder au cercle très fermé de l'Académie des Oscars, qui avait fait polémique en 2016 pour son manque de diversité. La campagne #OscarSoWhite avait ainsi amené certains participants à boycotter la cérémonie.
Comment sont-ils choisis ?
Chaque catégorie de votants (acteurs, réalisateurs, monteurs, etc.) a ses propres exigences, explique le site des Oscars (en anglais). Pour intégrer la section des acteurs, par exemple, il faut remplir une des trois conditions demandées : avoir joué dans au moins trois films "correspondant aux standards élevés de l'Académie, dont un depuis les cinq dernières années", ou avoir été nommé par le passé. On est donc sûrs que Michel Hazanavicius, Jean Dujardin ou Marion Cotillard, qui ont tous reçu une statuette, ont le droit de voter. Il est enfin possible d'être sélectionné par les membres pour votre "contribution exceptionnelle" à la production cinématographique.
Dans tous les cas, il faut être invité par deux membres. Anne Seibel, nommée en 2012 pour la direction artistique de Minuit à Paris, de Woody Allen, a, par exemple, été invitée par "son mentor", Rick Carter, chef décorateur notamment oscarisé pour son travail dans Avatar, de James Cameron. Mais "je ne sais même pas qui est la deuxième personne" qui l'a invitée, s'étonne-t-elle auprès de franceinfo.
Tous les anciens nommés peuvent postuler à l'Académie des Oscars. Mais tous n'ont pas franchi le pas, à l'instar d'Alain Gagnol, récompensé en 2012 dans la catégorie meilleur film d'animation pour Une vie de chat.
Je n'ai jamais reçu d'invitation des Oscars.
Alain Gagnolà franceinfo
Le scénariste affirme à franceinfo n'avoir jamais fait de démarches pour pouvoir en être, car il "vote déjà aux César", la version française des récompenses cinématographiques.
Comment font-ils leur choix ?
L'élection se déroule en trois étapes. D'abord, les membres d'une catégorie votent pour une liste de films qu'ils estiment dignes d'être récompensés. Ensuite, ils votent à nouveau pour réduire la liste à cinq films, qui seront les nommés aux Oscars. C'est là qu'intervient le vote final : tous les membres de l'Académie choisissent quel film doit être récompensé parmi les cinq nommés. Cette année, la dernière phase de vote était ouverte pendant huit jours, du 13 au 21 février.
L'Académie semble choyer ses votants européens. Chaque année, les nouveaux membres sont présentés lors d'une "Drink party", qui a eu lieu à Londres en 2017. "On se sent respecté, sourit Anne Seibel. Ils envoient des petites vidéos sur internet, qui permettent de voir comment ils ont fait les films, et des vidéos de tables rondes à propos des œuvres." Des projections sont également organisées en France.
"Je reçois des DVD par l’ensemble des distributeurs et des producteurs, raconte Laurent Witz, Oscar du meilleur court-métrage d'animation en 2014 pour Mr Hublot. Une activité assez chronophage, selon lui.
Pendant quatre mois, c'est assez intense, mais j’essaie de voir le maximum de films au cinéma, avant de les recevoir.
Laurent Witzà franceinfo
Egalement jury du festival international du film Nancy-Lorraine, le réalisateur est rompu à l'exercice. Il a même créé sa propre grille de notation. Qualité artistique, technique, originalité, émotion, scénario, réalisation... Mais pour lui, "tout est important". "C’est justement quand on peut réunir tous ces critères qu'on rentre dans ce genre de compétition", estime-t-il.
Pour d'autres, comme Mathilde Bonnefoy, oscarisée en 2015 pour le film-documentaire Citizenfour, nul besoin d'organisation.
Je trouve qu'il y a peu de vrais bons films. Ce n'est pas difficile de me souvenir de ce que j'ai aimé !
Mathilde Bonnefoyà franceinfo
"Je choisis comme on aime, c'est-à-dire en suivant mon instinct", ajoute la monteuse franco-américaine. Si tous les membres peuvent participer aux choix des lauréats, rien ne les oblige à regarder tous les films. "Je vote dans les catégories où j'ai tout vu", affirme Laurent Witz. "Je vote pour toutes les catégories que je connais, comme les décors", assure, quant à elle, Anne Seibel.
Concrètement, les votants ont deux possibilités pour envoyer leurs choix à l'Académie. Soit ils choisissent le vote électronique sur un site internet dédié, "grâce à un login et un mot de passe envoyés par les Oscars", comme l'explique Anne Seibel, soit par courrier. L'institution affirme que seulement deux salariés d'une société de comptabilité et de conseil seront au courant des résultats, jusqu'à la révélation finale, le soir de la cérémonie à Los Angeles.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.