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Le cinéaste portugais Manoel de Oliveira est mort

Le cinéaste portugais Manoel de Oliveira, doyen des cinéastes mondiaux en activité, est décédé jeudi à l'age de 106 ans dans sa maison de Porto (nord du Portugal). En hommage à cette "fierté nationale", un deuil de deux jours a été décrété au Portugal et un deuil de trois jours a été décrété dans sa ville natale de Porto. L'an passé, le réalisateur tournait encore.
Article rédigé par franceinfo - franceinfo Culture (avec AFP)
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Manoel de Oliveira sur le tournage de son dernier film "Gebo e a Sombra", 2012
 (AFP)

Le réalisateur avait été hospitalisé à plusieurs reprises ces dernières annés, mais il ne voulait pas entendre parler de retraite.

Durant sa carrière, Manoel de Oliveira a tourné plus de 50 longs métrages de fiction et documentaires, réalisant l'ensemble de son oeuvre après 60 ans.

Manoel de Oliveira sort son premier documentaire dans les années 30, "Douro, travail fluvial", sur les activités des habitants des rives du fleuve Douro, et notamment de Porto, sa ville natale. Il se fait remarquer dès son premier long-métrage de fiction, "Aniki Bobo", en 1942. Ce film, qui raconte le quotidien de quelques enfants des quartiers populaires de Porto, annonçait le néoréalisme italien.

Parmi ses principaux films, on retient "Soulier de satin" (1985),  "Non ou la vaine gloire de commander" (1990), "La Divine Comédie" (1991), "La Lettre", "Porto de mon enfance" (2001) et "Le principe de l'incertitude" (2002)

Son dernier long-métrage, "Gebo et l'ombre", date de 2012. Mais il avait sorti un court-métrage l'an passé, "Le Vieux de Restelo", tourné à Porto il y a un an et sorti en salles à Lisbonne le jour de ses 106 ans, le 11 décembre 2014.
Premiers films dans les années 30 et 40

Né le 11 décembre 1908, Manoel Cândido Pinto de Oliveira est élevé au sein d'une famille de la bourgeoisie industrielle de Porto. Il s'intéresse au cinéma dès l'enfance, son père, passionné de cinéma, l'emmenant voir les films de Charlie Chaplin et Max Linder. 

Athlète accompli à l'allure de jeune premier, il débute comme figurant à 20 ans dans un film muet, "Fatima miraculeuse". En 1931, il tourne un premier documentaire - également muet - "Douro, travail fluvial", sur la vie des travailleurs du fleuve qui baigne sa ville natale.

Acteur dans le premier film parlant portugais, "La chanson de Lisbonne", en 1933, c'est surtout la réalisation qui l'intéresse et après plusieurs documentaires il se lance dans la fiction en 1942, avec "Aniki-Bobo" sur la vie des enfants d'un quartier populaire de Porto.

Cependant, le contexte politique (dictature salazariste) et le manque d'infrastructures dans le Portugal le tiennent éloigné des caméras et ce n'est qu'en 1963 que sort son deuxième long métrage, "Le Mystère du printemps", évocation de la passion du Christ.

Manoel de Oliveira revient sur sa carrière chez Bernard Pivot ("Bouillon de culture" - France 2) en 1998 Un film par an à partir de 1985

Après une tétralogie des amours frustrées avec notamment "Amour de perdition" en 1979 et "Francisca" en 1981, il tourne pratiquement un film par an à partir de 1985, année de la sortie du "Soulier de Satin", fresque de près de sept heures qui obtient un Lion d'Or à la Mostra de Venise.

Se succèdent entre autres "Non ou la vaine gloire de commander" (1990), "La Divine comédie" (1991) "La Cassette" (1994), "Belle toujours" (2006), "Christophe Colomb, l'énigme" (2007), "L'étrange affaire Angélica" (2010) ou encore "Gebo et l'ombre" (2012).

En 2008, Manoel de Oliveira avait reçu la palme au festival de Cannes pour l'ensemble de son oeuvre.

Légion d'honneur en 2014

Fin 2014, pour fêter son 106e anniversaire, le cinéaste a tenu a rencontrer encore une fois son public lors de la sortie au Portugal de son dernier film, "Le Vieux du Restelo", un court-métrage qu'il avait tourné quelques mois auparavant malgré sa santé fragile.

Quelques jours plus tôt, il avait reçu les insignes de grand officier de la Légion d'honneur des mains de l'ambassadeur de France au Portugal, Jean-François Blarel.

Réactions

Il était "un témoin incomparable de la culture portugaise" qui a contribué à "projeter le Portugal à l'étranger", a dit le président portugais Anibal Cavaco Silva.

"La culture portugaise a perdu aujourd'hui l'une de ses plus grandes personnalités", a déploré le Premier ministre Pedro Passos Coelho.
   
"Je suis orphelin, comme tout le cinéma mondial. C'était un seigneur", a déclaré sur Twitter le réalisateur français Gilles Jacob, ancien président du festival de Cannes.
   
"Il était éternel. Son cinéma le rend éternel", a réagi Margarida Gil, présidente de l'association portugaise de réalisateurs.

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