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"La Porte du paradis" : le chef-d’œuvre de Cimino dans un somptueux coffret DVD
"La Porte du paradis", sorti à l'origine en 1980, fait l’objet d’une triple édition chez Carlotta : en DVD, en Blu-Ray et en coffret collector numéroté. Film fleuve de 3h36, ce chef-d’œuvre que Michael Cimino a réalisé après cet autre film ultime qu’est « Voyage au bout de l’enfer » méritait bien cette réhabilitation après bien des vicissitudes.
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Temps de lecture : 7min
Histoire d’un désastre
Fort de son succès précédent, avec « Voyage au bout de l’enfer », les studios United Artists donnaient carte blanche à Michael Cimino. Engagé dans un tournage fleuve de 165 jours, le cinéaste est à l’origine d’un échec critique et public retentissant, qui ruina la célèbre major initiée en 1919 par Charles Chaplin, Douglas Fairbanks, Mary Pickford et D. W. Grifith. Après nombres d’aléas elle reviendra à la production à la fin de l’année 2000. Les projections de presse furent tellement catastrophiques en 1980, que le film fut amputé de plus de 300 coupes, le ramenant à une durée de 2h30, au lieu des 3h39 initiales. L’échec n’en sera pas moins retentissant et reste un des plus grands fiascos de l’histoire du cinéma. En effet, à l’époque, « La Porte du paradis » n’engrangera qu’un million et demi de dollars de recettes, pour un investissement trente fois supérieur. Cimino est alors la bête noire du tout Hollywood et ne pourra tourner un autre film que cinq ans plus tard, « L’Année du dragon », qui sera aussi assassiné par la critique américaine.
Amnésie américaine
Il faudra attendre 1989, pour qu’une première version intégrale sorte sur les écrans. Le film en est transfiguré et acquiert son statut de véritable fresque épique sur un des épisodes les plus noirs de l’histoire des Etats-Unis naissant. Aucun doute que la presse assassine du début des années 80 résulte de ce choix consistant à rouvrir des plaies mal fermées. Celle de « la bataille du comté de Johnson » en 1890, dans le Wyoming, où de riches éleveurs levèrent une milice afin d’exterminer des immigrés d’Europe de l’est, accusés de vol de bétail, et d’entraver leur expansion. Gênant, en cette ère reaganienne naissante, au triomphalisme libéral et patriotique. Après s’être auto flagellés sur le génocide indien dans les « westerns crépusculaires » des années 70, le massacre d’Occidentaux par les descendants d’autres immigrés avant eux, était insupportable pour la bonne conscience étasunienne, forte de son étendard de la libre entreprise.
Paradis perdu
Michael Cimino fut traité de marxiste, accusé d’être l’auteur du plus grand gâchis de l’histoire du cinéma, avec un scénario incompréhensible, à la mise en scène dispendieuse, et à la maniaquerie mégalomaniaque.
Si le film visualise effectivement l’assassinat des plus pauvres par les plus riches, « La Porte du paradis » traite en filigrane de la perte des illusions, des utopies perdues de la jeunesse, du passage du temps : « James, te rappelles-tu le bon vieux temps d’antan ? » demande le personnage de Billy Irvine (John Hurt), à son ancien compagnon de chambrée à Harvard, James Averill (Kris Kristofferson). Le film s’imprègne d’une profonde mélancolie, née du magnifique prologue universitaire, où les étudiants de la promotion 1870 prennent conscience de la fin d’un temps, d’une époque, de leur jeunesse, désormais irrémédiablement perdue. Slavité
Des lambris de Harvard et des crinoline virevoltantes au rythme des valses viennoises, l’on passe à la boue du Wyoming, au lynchage d’un voleur de bétail, préambule à l’extermination à plus grande échelle d’autres migrants fraîchement débarqués. La reconstitution est remarquable à plus d’un titre, avec l’arrivée d’un train en gare d’une ville pionnière, la scène du drugstore, celle du bal en patins à roulettes, emblématique du film… le tout auréolé de la splendide photographie du grand Villmos Zsigmond. Kris Kristofferson campe un sheriff charismatique, Christopher Walken, un éleveur pragmatique et violent, néanmoins bouleversé par le charme d’Ella Watson, qu’interprète tout en finesse Isabelle Huppert, alors que John Hurt endosse le rôle d’un aristocrate décadent, perclus d’alcool, désabusé par un monde en déliquescence.
« La Porte du paradis » est enfin habité de slavité, thème récurrent chez Cimino, avec sa communauté russophone, comme dans « Voyage au bout de l’enfer », ou le personnage de Stanley White (Mickey Rourke) d’origine polonaise dans « L’Année du dragon ». La profusion et la complexité des personnages, l’ampleur du sujet et son traitement passant de la fresque à l’intime, le thème de la fin d’un monde sans l’ébauche d’un autre meilleur, renvoient tout autant à cette sensibilité. « La Porte du paradis », c’est un peu Tolstoï en Amérique. Bonus
De très beaux compléments alimentent les différentes éditions du film qui bénéficie d’une restauration exceptionnelle, restituant les magnifiques images de Villmos Zsigmond filmées dans le Wyoming. Le coffret DVD/Blu-Ray, comprend le film, une introduction par Cimino, une interview exclusive du réalisateur de 50 mn (!), et d’autres d’Isabelle Huppert, Kris Kristofferson, de Jeff bridges, et du compositeur David Mansfield dont un CD de sa magnifique musique s’ajoute à ce très bel objet d’exception. Un documentaire sur la restauration du film est également de la partie.
Mais ce n’est pas tout ! Le coffret comporte également un livret de 20 pages, fac-similé de celui distribué à la sortie du film, la reproduction du scénario, annoté par Cimino, qui lui a servi de « Bible » pendant le tournage (288 pages), un portfolio de 44 pages, enfin un livret de 56 pages regroupe des photos de tournage, d’autres documents inédits, ainsi qu’un essai sur Cimino signé Jean-Baptiste Thoret.
Certains bonus figurent dans les simples éditions DVD et Blu-Ray, mais ils sont loin d’être aussi nombreux.
La Porte du paradis
De Michael Cimino (Etats-Unis, 1980), avec : Kris Kristofferson, Christopher Walken, Isabelle Huppert, John Hurt, Jeff Bridges - 3h36
Coffret prestige, limité et numéroté DVD/Blu-Ray : 79,99 euros
Blu-Ray Collector : 24,99 Euros
DVD : 19,99
Editions Carlotta Films
Fort de son succès précédent, avec « Voyage au bout de l’enfer », les studios United Artists donnaient carte blanche à Michael Cimino. Engagé dans un tournage fleuve de 165 jours, le cinéaste est à l’origine d’un échec critique et public retentissant, qui ruina la célèbre major initiée en 1919 par Charles Chaplin, Douglas Fairbanks, Mary Pickford et D. W. Grifith. Après nombres d’aléas elle reviendra à la production à la fin de l’année 2000. Les projections de presse furent tellement catastrophiques en 1980, que le film fut amputé de plus de 300 coupes, le ramenant à une durée de 2h30, au lieu des 3h39 initiales. L’échec n’en sera pas moins retentissant et reste un des plus grands fiascos de l’histoire du cinéma. En effet, à l’époque, « La Porte du paradis » n’engrangera qu’un million et demi de dollars de recettes, pour un investissement trente fois supérieur. Cimino est alors la bête noire du tout Hollywood et ne pourra tourner un autre film que cinq ans plus tard, « L’Année du dragon », qui sera aussi assassiné par la critique américaine.
Amnésie américaine
Il faudra attendre 1989, pour qu’une première version intégrale sorte sur les écrans. Le film en est transfiguré et acquiert son statut de véritable fresque épique sur un des épisodes les plus noirs de l’histoire des Etats-Unis naissant. Aucun doute que la presse assassine du début des années 80 résulte de ce choix consistant à rouvrir des plaies mal fermées. Celle de « la bataille du comté de Johnson » en 1890, dans le Wyoming, où de riches éleveurs levèrent une milice afin d’exterminer des immigrés d’Europe de l’est, accusés de vol de bétail, et d’entraver leur expansion. Gênant, en cette ère reaganienne naissante, au triomphalisme libéral et patriotique. Après s’être auto flagellés sur le génocide indien dans les « westerns crépusculaires » des années 70, le massacre d’Occidentaux par les descendants d’autres immigrés avant eux, était insupportable pour la bonne conscience étasunienne, forte de son étendard de la libre entreprise.
Paradis perdu
Michael Cimino fut traité de marxiste, accusé d’être l’auteur du plus grand gâchis de l’histoire du cinéma, avec un scénario incompréhensible, à la mise en scène dispendieuse, et à la maniaquerie mégalomaniaque.
Si le film visualise effectivement l’assassinat des plus pauvres par les plus riches, « La Porte du paradis » traite en filigrane de la perte des illusions, des utopies perdues de la jeunesse, du passage du temps : « James, te rappelles-tu le bon vieux temps d’antan ? » demande le personnage de Billy Irvine (John Hurt), à son ancien compagnon de chambrée à Harvard, James Averill (Kris Kristofferson). Le film s’imprègne d’une profonde mélancolie, née du magnifique prologue universitaire, où les étudiants de la promotion 1870 prennent conscience de la fin d’un temps, d’une époque, de leur jeunesse, désormais irrémédiablement perdue. Slavité
Des lambris de Harvard et des crinoline virevoltantes au rythme des valses viennoises, l’on passe à la boue du Wyoming, au lynchage d’un voleur de bétail, préambule à l’extermination à plus grande échelle d’autres migrants fraîchement débarqués. La reconstitution est remarquable à plus d’un titre, avec l’arrivée d’un train en gare d’une ville pionnière, la scène du drugstore, celle du bal en patins à roulettes, emblématique du film… le tout auréolé de la splendide photographie du grand Villmos Zsigmond. Kris Kristofferson campe un sheriff charismatique, Christopher Walken, un éleveur pragmatique et violent, néanmoins bouleversé par le charme d’Ella Watson, qu’interprète tout en finesse Isabelle Huppert, alors que John Hurt endosse le rôle d’un aristocrate décadent, perclus d’alcool, désabusé par un monde en déliquescence.
« La Porte du paradis » est enfin habité de slavité, thème récurrent chez Cimino, avec sa communauté russophone, comme dans « Voyage au bout de l’enfer », ou le personnage de Stanley White (Mickey Rourke) d’origine polonaise dans « L’Année du dragon ». La profusion et la complexité des personnages, l’ampleur du sujet et son traitement passant de la fresque à l’intime, le thème de la fin d’un monde sans l’ébauche d’un autre meilleur, renvoient tout autant à cette sensibilité. « La Porte du paradis », c’est un peu Tolstoï en Amérique. Bonus
De très beaux compléments alimentent les différentes éditions du film qui bénéficie d’une restauration exceptionnelle, restituant les magnifiques images de Villmos Zsigmond filmées dans le Wyoming. Le coffret DVD/Blu-Ray, comprend le film, une introduction par Cimino, une interview exclusive du réalisateur de 50 mn (!), et d’autres d’Isabelle Huppert, Kris Kristofferson, de Jeff bridges, et du compositeur David Mansfield dont un CD de sa magnifique musique s’ajoute à ce très bel objet d’exception. Un documentaire sur la restauration du film est également de la partie.
Mais ce n’est pas tout ! Le coffret comporte également un livret de 20 pages, fac-similé de celui distribué à la sortie du film, la reproduction du scénario, annoté par Cimino, qui lui a servi de « Bible » pendant le tournage (288 pages), un portfolio de 44 pages, enfin un livret de 56 pages regroupe des photos de tournage, d’autres documents inédits, ainsi qu’un essai sur Cimino signé Jean-Baptiste Thoret.
Certains bonus figurent dans les simples éditions DVD et Blu-Ray, mais ils sont loin d’être aussi nombreux.
La Porte du paradis
De Michael Cimino (Etats-Unis, 1980), avec : Kris Kristofferson, Christopher Walken, Isabelle Huppert, John Hurt, Jeff Bridges - 3h36
Coffret prestige, limité et numéroté DVD/Blu-Ray : 79,99 euros
Blu-Ray Collector : 24,99 Euros
DVD : 19,99
Editions Carlotta Films
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