Cinéma. "Moi capitaine" de Matteo Garrone, l'auteur de "Gomorra" filme ces migrations héroïques qui finissent souvent si tragiquement

Sorti cette semaine, "Moi capitaine" est visible depuis septembre en Italie, où il a obtenu le Lion d'argent à la Mostra de Venise, et où il est montré dans des écoles. "Une leçon pour nous", dit le réalisateur qui voit les jeunes se reconnaître dans ses personnages.
Article rédigé par Thierry Fiorile
Radio France
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Temps de lecture : 2min
"Moi capitaine", le récit d'une odyssée héroïque. (GRETA DE LAZZARIS)

Moi capitaine de l'Italien Matteo Garrone est sorti mercredi 3 janvier. Le réalisateur de Gomorra, Dogman et Pinocchio, s'attaque à un sujet qui concerne son pays au premier plan : le sort des réfugiés qui traversent la Méditerranée au péril de leur vie, le récit d'une odyssée héroïque.

Seydou (Seydou Sarr) et Moussa (Moustapha Fall) sont deux jeunes Sénégalais qui rêvent d'ailleurs, d'une autre vie, en Europe, celle qu'ils idéalisent sur les réseau sociaux. Un premier passeur, la traversée du désert, les premiers drames et l'enfer des camps en Lybie, où les candidats africains à l'exil sont traités comme des esclaves.

"Les personnages sont comme nous !"

Matteo Garrone filme de leur côté, au plus près de cette épopée, les morts abandonnés en route, la misère absolue et ce bateau dont Seydou doit la prendre la barre, avec la peur au ventre de tomber dans ce cimetière marin qu'est devenue la Méditerranée. Matteo Garrone explique : "C'est un gamin de 15 ans, qui se retrouve à piloter un bateau pour essayer de sauver 250 vies, qui se retrouve à faire un geste héroïque. Il le fait, arrive et dit : 'C'est moi qui l'ai fait, c'est moi le capitaine' et on le met en prison. Et en même temps, on sait que l'Europe donne de l'argent à la Lybie, où il y a des trafiquants d'êtres humains... C'est un film d'aventure, j'ai pensé au récit maritime de Stevenson, Jack London. En Italie, il est sorti en septembre et a tourné dans beaucoup d'écoles, où les jeunes me disent : 'Mais les personnages sont comme nous ! Ils ont les mêmes désirs, les mêmes rêves, on est comme eux'."


Ce récit épique puise sa force dans la véracité de ses interprètes, majoritairement recrutés dans des écoles de théâtre au Sénégal : "Il fallait garder cette innocence, relate Matteo Garrone, les acteurs avaient les mêmes aspirations que leur personnage, de venir en Italie ou en Europe. Mais ils ne savaient pas ce qu'ils allaient jouer, il vivaient avec cette tension de vouloir y arriver, jour après jour, ils traversaient les épreuves, sans avoir la certitude d'arriver en Italie. C'est une leçon pour nous."


Il y a dans Moi capitaine un souffle de vie, celui qui anime ses protagonistes et qui ne peut que nous interroger, ici en Europe. Par souci d'honnêteté, Matteo Garrone modère son esthétique habituelle, ose quelques envolées oniriques, entre Gomorra et Pinochio, dit-il.

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