Cinéma : "Les Derniers Parisiens", par amour de Pigalle
Les deux rappeurs Hamé et Ekoué du groupe La Rumeur signent leur premier film,"Les Derniers Parisiens", tourné dans leur quartier, Pigalle, en pleine mutation. Une histoire de générations, sans concessions, qui sonne juste.
Une virée dans Pigalle, c'est ce que propose Les Derniers Parisiens, un film franceinfo qui sort en salles mercredi 22 février. Pigalle la nuit, Pigalle qui brille, là où les gamins de banlieue viennent depuis des années se payer un bout du rêve parisien, mais aussi se brûler les ailes.
Arezki, le grand-frère, l'a compris et gère son bar, Le Prestige, sans faire de vagues. Mais c'est dur : le quartier est en pleine gentrification, des populations plus aisées remplaçant les habitants les moins favorisés. Son petit-frère Nas sort de prison et croit encore que l'argent peut être facile. Entre les deux, le clash est inévitable. "On montre la complexité de ces petites gens, dit Hamé, leur part de pathétique, leur part de noblesse."
Au coeur du film, de "l'argent de pauvres"
Filmé en marchant sur les trottoirs, ce film déborde de vie, sans juger ni glorifier ces Parisiens nés en banlieue et descendants d'immigrés. Au cœur de ce film, l’argent. Quand le grand-frère, Slimane Dazi, peine à faire face à la réalité, Nas, interprété par Reda Kateb, s’imagine qu’en organisant des soirées bling-bling avec une nouvelle espèce inquiétante de maîtres de la nuit, l’argent coulera à flots. "Mais c’est de l’argent de pauvres, dit Ekoué, du liquide qui passe de main en main, on se paye une part du rêve et ça file vite."
Il est rare de voir à l’écran deux générations issues de l’immigration aussi bien évoquées. Le duo de La Rumeur évite les pièges de la glorification et de la moralisation.
Le film est aussi une histoire d’amitié, Hamé et Ekoué sont proches de tous les interprètes. Cette histoire, c’est un peu la leur, entre rêves, drames, illusions perdues et réalité.
"Grand-frère", le rôle de sa vraie vie
Slimane Dazi tient là sans doute son meilleur rôle : il a une "gueule" et a commencé très tard sa carrière d'acteur. Dans Les Derniers Parisiens, il joue un rôle qui a longtemps été le sien dans la vraie vie : grand-frère. Né il y a 56 ans dans une famille algérienne de Nanterre, entouré de trois sœurs et cinq frères, Slimane Dazi aurait pu commencer sa carrière plus tôt. Il est avec l'un de ses frangins pas loin des caméras, installe les loges, ventouse les rues pour libérer les espaces de tournage. Mais le déclic viendra plus tard.
C'est Rachid Djaïdani qui le convainc de mettre sa gueule burinée au service du cinéma, mais son film Rengaine est long à monter et ne sort qu'en 2012. Trois ans avant, sur les conseils de Tahar Rahim, Slimane Dazi se retrouve dans Un prophète de Jacques Audiard, Jim Jarmush le repère et le fait tourner en 2013. Sur son CV, il y a aussi des petits boulots et des grosses bêtises, un vécu qui irrigue Les Derniers Parisiens de ses amis Hamé et Ekoué. Dix-sept films en huit ans, des séries dont Braquo et Le Bureau des Légendes : Slimane Dazi est boulimique, mais commence à pouvoir choisir ses rôles.
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