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Cannes 2017 : "I am not a witch", la fillette qui refusait d'être une sorcière

La Quinzaine des Réalisateurs a offert à ses spectateurs un magnifique spectacle avec "I am not a witch", de la réalisatrice zambienne Rungano Nyoni. L'histoire d'une fillette de 8 ans accusée de sorcellerie et condamnée à vivre recluse avec un groupe d'autres femmes, souvent très âgées, regroupées dans un camp à l'écart de la société. Mais au fond d'elle, la petite fille refuse cette condition.
Article rédigé par franceinfo
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Maggie Mulubwa, Shula dans "I am not a Witch"
 (DR)

Il existe en Zambie et au Ghana des villages de sorcières. Les femmes convaincues de pouvoirs surnaturels y sont regroupées et y vivent en communauté. Dans certains cas, ces camps comptent parmi les attractions touristiques que des visiteurs occidentaux viennent photographier comme un zoo. Le plus ancien d'entre eux, au Ghana, existe depuis plus de 200 ans.
"I am not a Witch" (Je ne suis pas une sorcière) raconte l'histoire poignante de Shula (Maggie Mulubwa), une petite fille de 8 ans que les habitants d'un village de Zambie soupçonnent d'être l'une de ces femmes à la fois respectées et mises au ban de la société.

Un simulacre de procès aboutit à la décision de l'envoyer dans le camp des sorcières, rejoindre toutes ces vieilles femmes, elles aussi condamnées à cette vie marginale. La légende veut qu'elles puissent voler et se rendre alors coupables de meurtres. La réalisatrice, Rungano Nyoni, a imaginé symboliquement qu'elles en étaient toutes empêchées par un ruban blanc qui les relie à un poids. Elles sont prévenues que si l'une d'elles décide de couper le ruban et de ne plus être une sorcière, elle sera transformée en chèvre.

Dans le camp des sorcières
 (DR)
On ne sait pas d'où vient la petite Shula. Mais sa destinée paraît celle de tous les étrangers, partout. On les accuse de tous les maux. Ici, une femme trébuche en portant de l'eau alors que le fillette la regarde. L'épisode est suffisant pour que la gamine soit accusée de sorcellerie.

Comme autour des palais de justice qui jugent chez nous les meurtriers, la foule s'agglutine et vocifère de sa voix multiple. C'est sûr, elle est une sorcière et doit pour cela être déportée vers un camp qui regroupe toutes les femmes supposées jouir de pouvoirs surnaturels. Rester sorcière ou être transformée en chèvre. C'est le seul choix qui s'offre alors à elles. Alors elles restent là, prisonnière d'un ruban qui les empêche de s'envoler pour commettre des crimes. Shula est toute petite, mais elle a compris le véritable enjeu et elle pose la question : vaut-il mieux rester sorcière et prisonnière ou être changée en chèvre et vivre comme bon lui semble au gré de ses envies ?
Le ruban qui tient les sorcières et les empêche de voler
 (DR)
Maggie Mulubwa, la petite fille qui interprète Shula a été repérée par hasard alors qu'elle jouait avec ses amis à Lusaka, la capitale de la Zambie. La réalisatrice Rungano Nyoni est revenue vers elle après un long casting. Elle a bien fait. La petite fille, toute en retenue, donne à cette histoire au départ typiquement africaine une dimension universelle. Tant il est toujours plus simple d'être sorcier que sorcière. Et l'on pourra remplacer "sorcier et sorcière" par de nombreux autres mots. Shula est toutes les femmes victimes parce qu'elles sont femmes, dans toutes les civilisations. Celles qui partout doivent choisir entre un asservissement et une liberté chèrement payée. Shula restera-t-elle sorcière, prendra-t-elle le risque de la liberté au prix de la menace surnaturelle ? Peut-être choisira-t-elle une troisième voie. Et son séjour chez les "sorcières" aura peut-être, au passage, éveillé leur conscience. 
L'équipe de "I am not a Witch" à Cannes
 (Jean-François Lixon)

I am Not a Witch
Film britannique, français et allemand
de la réalisatrice Zambienne Rungano Nyoni 
avec Maggie Mulubwa, Henry B.J. Phiri, Travers Merrill, Nancy Mulilo, Nellie Munamonga 

Synopsis

Après un incident banal survenu dans son village, une fillette de 8 ans, Shula, est accusée de sorcellerie. Après un rapide procès, elle est reconnue coupable et enfermée dans un camp de sorcières.

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