Cannes 2016 : "Captain fantastic" l'utopie hippie d'un père de famille
C'est la fable du bon sauvage revisitée. Sauf que le sauvage est ici et d'une certaine manière plus civilisé que la société à laquelle il se trouve confronté. Ben (Viggo Mortensen) et sa femme, une avocate qui a quitté le barreau pour le suivre, élèvent leurs six enfants, entre 6 et 20 ans, en pleine nature, quelque part dans l'état de Washington, au nord-ouest des Etats-Unis. Au programme : entraînement à la dure, apprentissage des valeurs humaines et solidaires, sérieuse instruction.
Ben, le superhéros de ses enfants, le Captain Fantastic, est sûr de bien faire. Il exècre la société américaine, la religion, l’enseignement, la nourriture manufacturée et il tient à ce que ses enfants partage sa vision du monde. Un exemple : plutôt que fêter Noël, la famille s’offre des cadeaux (des armes de chasse) le 7 décembre, jour anniversaire de la naissance du philosophe anarchiste Noam Chomsky.
Derrière ce paradis digne de Jean-Jacques Rousseau se cache pourtant le drame. Bipolaire, la mère finit par se suicider. Et c’est en allant à ses obsèques, en ville, que tout va changer pour cette famille. La rencontre avec la « civilisation » va tout remettre en cause et Ben va douter.
« Captain fantastic » est un cousin assez proche de « Juno » (Jason Reitman, 2007). Il est aussi ici question d’un voyage, d’une famille, de la remise en cause de certitudes et d’une certaine faculté à regarder la vie et ses difficultés avec optimisme. Le scénario et les dialogues signés de Matt Ross réservent des surprises et ne manquent pas d’humour, même si le coeur de l’histoire reste dramatique. La direction d’acteurs, toujours difficile quand il s’agit de faire travailler des enfants est particulièrement réussie dans cette histoire qui compte six enfants à partir de six ans dans les rôles principaux.
Aux Etats-Unis, cette histoire ne pouvait être produite que par des studios indépendants. Remettant ouvertement en cause le modèle consumériste états-unien, aucune major hollywoodienne n’aurait signé pour le produire. Le film a d’ailleurs été présenté au festival de Sundance, la Mecque du cinéma indépendant. Et pour une fois, le happy ending bien américain ne va pas dans le sens de la glorification du modèle yankee.
« Captain fantastic » est un film familial qui risque de provoquer bien des discussions entre parents et enfants. Il suscitera peut-être aussi des remises en question autour du modèle dans lequel le monde occidental élève ses enfants sans trop se poser de question. Et si la voie était un peu médiane, quelque part entre l’utopie hippie et une vision étroitement économiste de l’existence. A défaut d’y répondre, le film suscite le questionnement.
Synopsis : Dans les forêts reculées du nord-ouest des Etats-Unis, vivant isolé de la société, un père dévoué a consacré sa vie toute entière à faire de ses six jeunes enfants d’extraordinaires adultes.
La fiche
Captain Fantastic Film américain de Matt Ross avec Viggo Mortensen, Frank Langella, George MacKay, Kathryn Hahn, Steve Zahn… 2h Sortie en France le
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